Maroc

Stress hydrique : Turbo sur les projets d’infrastructure

Devant la Chambre des conseillers, le ministre de l’Équipement et de l’Eau a dressé un bilan détaillé de la politique hydrique nationale. Il a annoncé la construction de nouveaux barrages, la multiplication des forages et l’extension du dessalement, tout en reconnaissant la gravité d’une situation marquée par sept années de sécheresse.

Le Maroc traverse une crise hydrique sans précédent. Pour la septième année consécutive, le pays subit les effets d’une sécheresse prolongée qui met à rude épreuve ses barrages, ses nappes phréatiques et ses habitants. Devant la Chambre des conseillers, mardi, le ministre de l’Équipement et de l’Eau a livré un état des lieux à ce sujet.

D’après les données partagées par Nizar Baraka, les apports hydriques du mois de septembre n’ont pas dépassé 160 millions de mètres cubes. Le taux de remplissage des barrages plafonne à 32% contre 40% au mois de mai et le déficit national atteint près de 58%. Malgré ce contexte alarmant, Baraka se veut confiant. Les chantiers engagés traduisent, selon lui, une dynamique inédite depuis des décennies.

Un effort inédit sur les infrastructures
Le ministre a souligné que la politique des barrages reste au cœur de la stratégie nationale. Plusieurs ouvrages ont été achevés entre 2021 et 2024 et quatorze autres sont en cours de réalisation. Onze nouveaux projets sont programmés pour la période 2025-2027, preuve que l’État continue d’investir massivement dans la mobilisation de l’eau de surface. L’action ne se limite pas aux grands ouvrages.

Dans le monde rural, le ministère mise sur les barrages collinaires, les retenues de moyenne capacité et les forages de proximité. À ce titre, 155 barrages de petite taille sont inscrits au programme actuel, dont 50 déjà lancés. L’objectif est d’en construire autant en six ans que ce que le Maroc a réalisé depuis l’indépendance, un symbole fort d’accélération. Ces ouvrages visent à sécuriser l’approvisionnement des populations rurales, à protéger les villages des crues et à renforcer la disponibilité en eau pour le bétail et l’irrigation de proximité.

Le ministre a également évoqué plus de 4.200 forages réalisés à ce jour, représentant 671.000 mètres linéaires creusés et un débit cumulé de près de 900 litres par seconde. Grâce à ce travail de terrain, environ 5,8 millions d’habitants ruraux disposent désormais d’un accès régulier à l’eau potable, parfois pour la première fois. Ces forages sont ensuite raccordés au réseau géré par l’Office national de l’électricité et de l’eau potable afin d’assurer leur exploitation rapide et durable.

Le dessalement comme levier d’avenir
Autre pilier de la stratégie, le recours massif au dessalement de l’eau de mer. De Casablanca à Safi, en passant par El Jadida, Marrakech, Youssoufia ou Benguerir, plusieurs projets structurants destinés à alimenter ces villes sont déjà lancés. Ces stations doivent progressivement couvrir l’ensemble des besoins des zones côtières et libérer les eaux des barrages pour les régions intérieures.

Selon le ministre, l’ambition est d’atteindre à l’horizon 2030 une couverture de plus de 60% des besoins nationaux en eau potable grâce au dessalement. Les zones rurales et montagneuses continueront ainsi de bénéficier des retenues existantes, tandis que les grandes agglomérations seront alimentées par l’eau de mer traitée.

Cette redistribution territoriale s’inscrit pleinement dans les orientations royales en faveur de la justice hydrique et de la sécurité en ressources. Baraka a également insisté sur l’importance du projet d’interconnexion hydraulique entre Sebou et Bouregreg, souvent perçu comme une initiative au profit des métropoles de Rabat et Casablanca. En réalité, a-t-il rappelé, cette liaison bénéficie aussi aux populations rurales riveraines, quelque 500.000 habitants en profitant déjà, dont 127.000 dans la seule région de Ben Slimane.

Des moyens d’urgence pour le monde rural
Face à la persistance du déficit, le ministère déploie des solutions mobiles et temporaires, tient à assurer Baraka. Cent dix stations de traitement et de dessalement d’appoint sont actuellement opérationnelles dans les communes rurales, un chiffre appelé à dépasser les deux cents dans les prochains mois.

Ces unités assurent la potabilisation d’eaux souterraines ou saumâtres et servent de relais pendant les périodes de stress extrême. Pour les localités les plus isolées, le ministre cite l’acquisition de 1.200 camions-citernes et 10.000 citernes fixes, afin d’assurer la distribution d’eau potable. Ces dispositifs ont permis de desservir environ 2,7 millions de citoyens en 2024, illustrant la dimension sociale de la politique hydrique.

Enfin, un programme national, conduit en partenariat avec le ministère de l’Intérieur et la Commission nationale de l’eau, prévoit des interventions ciblées «douar par douar» pour identifier les points de vulnérabilité et proposer des solutions durables, conformément aux orientations royales.

Des élus satisfaits mais vigilants
Les réactions des parlementaires ont convergé vers la reconnaissance des efforts engagés, mais aussi sur les défis persistants. Le groupe istiqlalien, par la voix d’Abdessalam Lebbar, a cité le cas de Tissa, dans la province de Taounate, longtemps confrontée à la soif avant d’être raccordée au réseau.

Le groupe Authenticité et Modernité a pour sa part souligné que le raccordement ne garantit pas toujours un débit constant. Dans plusieurs communes, les habitants subissent encore des coupures répétées malgré le paiement régulier de leurs factures.

Dans ce sens, les élus appellent à des solutions plus équitables pour le branchement domestique en milieu rural, souvent coûteux, et à une vigilance accrue sur la qualité de l’eau dans certaines zones montagneuses. Quant au groupe Haraki, il a adopté un ton alarmiste.

Pour ses membres, le Maroc fait désormais partie des vingt pays les plus menacés par une crise hydrique majeure à l’horizon 2040. Ses membres estiment que la situation impose des mesures rapides, des mécanismes de financement renforcés et une mise en œuvre accélérée des plans déjà adoptés.

Nizar Baraka
Ministre de l’Équipement et de l’Eau

«Ce que nous vivons aujourd’hui est exceptionnel. C’est la septième année consécutive de sécheresse. Malgré tout, nous poursuivons la politique des barrages, développons le dessalement et multiplions les solutions locales afin que chaque citoyen, où qu’il vive, ait accès à une eau potable sûre.»

Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO



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