Éco-Business

Sacha Michaud : “Le Maroc est un marché stratégique pour Glovo”

Sacha Michaud
Cofondateur et CEO de Glovo

En marge de la Tech Catalyst Week organisée à Barcelone, Sacha Michaud revient sur la stratégie globale de Glovo, la croissance de l’entreprise au Maroc et les perspectives d’un écosystème tech en plein essor. Entretien.

Glovo est aujourd’hui présent à l’international. Quelle est la vision stratégique qui sous-tend la Tech Catalyst Week, et quelle place occupe le Maroc dans cette initiative ?
Glovo est une entreprise mondiale, présente sur plusieurs continents et dans des milliers de villes, mais notre ancrage reste profondément local. Partout où nous opérons, nous faisons partie du tissu économique et numérique des territoires. Avec la Tech Catalyst Week, nous voulons partager l’expérience que nous avons acquise en grandissant à l’international, pour en faire bénéficier les écosystèmes locaux.

Dans nombre de marchés où nous sommes présents, la digitalisation n’en est qu’à ses débuts. C’est un défi, mais aussi une formidable opportunité. Le Maroc illustre parfaitement ce potentiel. Le pays entre dans une phase clé de sa transformation numérique.

L’accès au capital y demeure restreint, mais les choses évoluent vite, et le niveau de talent est remarquable. J’ai rencontré de nombreux entrepreneurs marocains formés à l’étranger, notamment à Paris, qui choisissent de revenir au pays pour y bâtir leurs entreprises. C’est un signal très encourageant. Si Glovo peut, à son échelle, accompagner ce mouvement, nous en serons ravis.

Glovo a été l’un des pionniers du Q-commerce. Quelle place ce modèle occupe-t-il aujourd’hui dans votre stratégie, notamment sur le marché marocain ?
Depuis le départ, nous avons voulu proposer une offre multi-catégories, pas uniquement de la restauration, mais tout ce qu’un consommateur peut avoir besoin d’acheter en ville. Là où beaucoup de nos concurrents se limitaient à la livraison de repas, nous avons très tôt choisi d’élargir notre périmètre.

Le Q-commerce, ou commerce rapide, est selon moi le segment le plus prometteur du commerce en ligne mondial. Dans des pays comme le Maroc, où le e-commerce traditionnel reste parfois freiné par la logistique d’importation, le Q-commerce représente une véritable alternative. Il peut aller plus vite et devenir le moteur principal du commerce digital local.

Notre approche est différente de celle des grandes plateformes internationales, nous ne construisons pas d’entrepôts géants, nous travaillons avec les commerçants de proximité, que nous accompagnons dans leur digitalisation et dans la livraison de leurs produits. C’est un modèle qui crée de la valeur locale et qui s’inscrit dans la durée. Contrairement à certains acteurs perçus comme des concurrents du commerce physique, Glovo agit comme un facilitateur.

Quels enseignements ou retombées concrètes souhaitez-vous que les startups marocaines tirent de leur présence à la Tech Catalyst Week ?
J’aimerais qu’elles repartent inspirées et pleines de confiance. Créer une entreprise, c’est un chemin difficile, semé d’obstacles. Si l’on connaissait à l’avance toutes les épreuves qui nous attendent, beaucoup n’oseraient pas se lancer. Ce qui fait la différence, c’est la persévérance et la résilience.

À travers cette semaine, j’espère que ces jeunes entrepreneurs trouveront de quoi nourrir leur motivation, élargir leur réseau, et pourquoi pas rencontrer des mentors capables de les guider. L’idée, c’est qu’ils rentrent au Maroc avec de nouvelles perspectives et une énergie renouvelée pour développer leurs projets.

Le Maroc figure parmi les pays les plus représentés lors de cette édition. Pourquoi cette présence marocaine est-elle si importante pour Glovo ?
Effectivement, cette édition réunit plus de startups marocaines que celles de tout autre pays dans lequel nous sommes présents, et ce n’est pas un hasard. Le Maroc est un marché stratégique pour Glovo. Nous y enregistrons une croissance solide et nous avons la volonté de poursuivre nos investissements dans le pays.

La relation entre l’Espagne et le Maroc est d’ailleurs unique, à la fois sur le plan commercial, institutionnel et humain. Cette proximité culturelle et économique crée un environnement favorable à la collaboration. Je suis convaincu que le Maroc a tout pour devenir le hub technologique reliant l’Europe et l’Afrique.

À chaque visite à Casablanca ou à Rabat, j’y vais au moins deux fois par an, je suis impressionné par la rapidité des évolutions, les infrastructures se modernisent, de nouveaux acteurs émergent, les usages numériques progressent. C’est une dynamique extrêmement stimulante.

Le cadre réglementaire marocain évolue pour accompagner les nouveaux modèles économiques. Comment Glovo s’inscrit-il dans ce processus et quelles avancées concrètes avez-vous observées ?
Dans beaucoup de pays, et le Maroc n’échappe pas à la règle, la réglementation n’a pas été conçue à l’origine pour suivre le rythme d’entreprises en forte croissance comme la nôtre. C’est normal, l’innovation va souvent plus vite que la législation. Ce qui compte, c’est d’entretenir un dialogue ouvert et constructif, et c’est exactement ce que nous avons au Maroc.

Nous avons partagé avec les autorités notre mode de fonctionnement, nos données et nos pratiques, tout en nous engageant sur des actions concrètes, notamment pour améliorer les conditions de travail et la sécurité des coursiers. Tant que les entreprises comme la nôtre restent à l’écoute et s’adaptent aux spécificités locales, tout le monde progresse. Et nous sommes ravis de pouvoir renforcer encore nos investissements au Maroc dès l’année prochaine..

La question de la sécurité routière des livreurs revient souvent dans le débat public. Comment Glovo aborde-t-elle cet enjeu sur le terrain ?
La sécurité des coursiers est une priorité absolue pour nous. Parce que nos livreurs sont très visibles dans l’espace urbain, nous avons une responsabilité particulière. Leur forte visibilité dans l’espace public nous oblige à maintenir des standards élevés en matière de prévention et de comportement responsable.

Il ne s’agit pas d’une question d’image, mais de cohérence avec nos valeurs et nos engagements. C’est pourquoi nous avons intégré, dans notre stratégie 2025, un plan renforcé autour de la sécurité routière et de la formation des livreurs, élaboré en concertation avec les autorités. Nous voulons être un acteur responsable, contribuant à améliorer les conditions de circulation et de sécurité.

À terme, le Maroc pourrait-il devenir la base régionale de Glovo pour piloter ses activités en Afrique ?
Oui, sans aucun doute. Le Maroc est déjà partiellement hub avec plusieurs responsables basés au Maroc qui ont des responsabilités africaines. Le Maroc réunit tous les atouts nécessaires, des talents qualifiés, une infrastructure solide, une économie stable et un environnement propice à l’investissement. S’il fallait choisir un hub pour piloter toutes nos opérations africaines, le Maroc ferait naturellement partie des candidats les plus évidents.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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