Transport routier : enfin l’heure de la réforme ?

Le ministre du Transport et de la Logistique a rencontré lundi plusieurs acteurs du transport routier, dans le cadre de la réforme du secteur. La rencontre intervient à un moment où ces opérateurs sont confrontés à des difficultés à la fois conjoncturelles et structurelles. Les professionnels espèrent que la réforme tant attendue aura enfin lieu.
Considéré comme le parent pauvre de la grande famille des transports, le secteur routier semble enfin bénéficier de l’intérêt des nouveaux responsables du ministère de tutelle. C’est du moins ce qu’espèrent les professionnels qui ont participé lundi à la séance de travail organisée au siège du ministère du Transport et de la Logistique. Une rencontre dirigée par le ministre Abdessamad Kayouh en personne.
La rencontre, qui s’est tenue l’après-midi au Royal nautique club Bouregreg à Rabat, visait à relancer la réforme du secteur, longtemps laissée au point mort. Chez les professionnels, les attentes demeurent nombreuses pour enfin aller de l’avant et sortir leurs activités du statut de l’informel qui le caractérise de façon structurelle. Mais, lors de cette réunion, il était, avant tout, question «des urgences du moment» que le gouvernement est appelé à résoudre rapidement pour faciliter la vie aux professionnels concernés.
«Les principales urgences sont de trouver des solutions aux difficultés que rencontrent les chauffeurs aux ports de Casablanca et de Tanger Med. Il y a également la problématique des carrières de sable», confie un responsable syndical des transporteurs contacté par les Inspirations Éco.
Informel persistant
L’une des attentes majeures des transporteurs, notamment les chauffeurs de bus et de cars, c’est la formalisation de leurs activités. Autrement dit, que l’on mette fin à leur statut de journaliers et chauffeurs occasionnels en les régularisant avec des contrats de travail en bonne et due forme, garantissant leurs droits sociaux les plus élémentaires.
«À ce jour, les seuls conducteurs qui disposent de contrats de travail sont ceux qui assurent le Transport international routier (TIR), parce que sans ces contrats et les justificatifs de versements à la CNSS, ils ne peuvent pas obtenir des visas pour transporter les exportations nationales vers l’Europe, par exemple. Hormis ceux-là, tous les autres, c’est-à-dire 90% des chauffeurs, sont plongés dans l’informel», poursuit un transporteur routier.
Ces doléances viennent s’ajouter à d’autres plus structurelles, et qui touchent de façon globale la réforme en profondeur du secteur. Ces maux empêchent ce segment, vital à la mobilité des personnes et des biens sur le territoire et au-delà, de s’engager dans une véritable phase de modernisation.
«La vérité est que les choses sont quasiment au point mort, là aussi. Cela, alors que notre secteur a vraiment besoin d’être mis à niveau. L’informel continue de gangréner les activités des transporteurs routiers. Il est donc vraiment temps que l’on avance de façon sérieuse pour parvenir à une situation où l’on assainisse le secteur du transport routier dans toutes ses composantes», déclare-t-on du côté de la Fédération nationale des chauffeurs et professionnels du transport au Maroc.
Nécessité d’une feuille de route
Ce besoin de réforme fait suite à une longue phase d’interventions du gouvernement consistant en des subventions octroyées aux transporteurs, et ce, au lendemain du début de la guerre en Ukraine, avec ses impacts sur les prix du carburant. Plus d’une dizaine de versements avaient été effectués en plusieurs phases, permettant au département de tutelle de différer les revendications des professionnels, reportant ainsi une prise en charge sérieuse et approfondie des véritables maux du secteur.
D’ailleurs, cet «effet doliprane» n’avait pas manqué de subir les critiques des principaux concernés. L’heure est sans doute venue d’explorer des pistes plus durables à même de permettre de s’engager sur une véritable feuille de route. Une condition sine qua non pour élever le secteur au niveau d’exigence requis pour l’accueil par le Royaume de grands événements internationaux comme le Mondial 2030.
Plaques d’immatriculation à l’étranger : quelle solution pour les transporteurs ?
La réunion d’hier a certainement été l’occasion de remettre sur la table la fameuse question liée aux plaques d’immatriculation. Sur ce point, le processus de changement de la carte grise et des plaques, en vue de se conformer aux normes européennes et internationales, prend énormément de temps.
«Pour s’y conformer, il faut immobiliser son camion pendant des mois, le temps que tous les papiers du véhicule soient changés. Nous appelons là aussi les autorités à agir, sous peine de voir les transporteurs nationaux se faire distancer», déclarait récemment Mohamed Mitali, secrétaire général de la Fédération nationale des chauffeurs et professionnels du transport au Maroc.
Sur ce point, il faut noter que l’Agence nationale de la sécurité routière (NARSA) a fait savoir que les véhicules affectés au transport international sont autorisés à arborer en permanence le format de plaque conforme aux normes internationales, sous réserve de présenter un document justificatif de leur activité.
Abdellah Benahmed / Les Inspirations ÉCO