Agadir : la capacité litière, enjeu majeur de croissance pour le tourisme

La destination Agadir a connu une fréquentation record, dépassant le million de touristes à fin août 2025 et plus de 4,3 millions de nuitées. Elle se heurte cependant à une insuffisance des capacités hôtelières, avec un foncier peu valorisé. Une situation qui risque de casser le bel élan observé depuis quelques mois. À l’issue de la deuxième édition des «Souss-Massa days», les professionnels appellent à libérer d’urgence le potentiel de la région pour soutenir la croissance et rester compétitif sur le marché.
La croissance de la destination Agadir sera freinée si elle ne parvient pas à augmenter sa capacité hôtelière, parallèlement à l’évolution des flux touristiques, elle-même dynamisée par le développement du transport aérien. C’est la conclusion que tirent unanimement les participants à la deuxième édition des «Souss-Massa days».
Cet événement, organisé par le Conseil régional du tourisme (CRT) du Souss-Massa, en partenariat avec l’Office national marocain du tourisme (ONMT), s’est tenu le 30 septembre et le 1er octobre. La rencontre a ravivé le débat sur la problématique des hôtels fermés et des parcelles non valorisées, y compris en front de mer.
En effet, une part significative de la capacité d’accueil classée de la destination Agadir se trouve paralysée. 19 établissements (hôtels fermés ou délabrés, chantiers inachevés et parcelles non valorisées), totalisant 6.524 lits, sont ainsi hors service à ce jour.
Cette situation est d’autant plus préoccupante que la destination continue d’enregistrer des performances touristiques positives. Elle a franchi un cap historique du million de visiteurs et a enregistré plus de 4,3 millions de nuitées à fin août 2025, pour une croissance globale de 9,65% au niveau des arrivées et de 8,60% pour les nuitées, en glissement annuel. Le Royaume-Uni est le principal moteur de cette croissance, devant le marché national et la France.
Libérer les capacités litières et foncières
Pour Hamid Bentahar, président de la Confédération nationale du tourisme (CNT) et président du CRT de Marrakech, «à Agadir, devenue la locomotive du tourisme balnéaire africain, le sujet principal était de savoir comment accélérer l’aérien. Un travail approfondi a été fourni à ce niveau. Aujourd’hui, c’est un autre sujet qui doit être soulevé, en l’occurrence la libération des énergies en termes de capacités et foncier hôteliers».
Le président de la CNT a annoncé que son organisme travaillait sur une nouvelle feuille de route baptisée «Oser ensemble». Il a rappelé que Marrakech et Agadir sont deux destinations qui ont déjà dépassé les 70% de taux d’occupation. Désormais, le défi principal pour ces destinations est de «stimuler les capacités pour garder un rythme de croissance à deux chiffres».
«L’industrie hôtelière est consciente de cette problématique et les tour-opérateurs, partenaires internationaux, ont besoin de capacité supplémentaire à Agadir. À défaut, ils vont la trouver ailleurs. Par contre, les autres destinations ont besoin d’aérien et de massifier tant les liaisons aériennes que les capacités litières», souligne Hamid Bentahar.
«Il est important de semer les graines de la croissance future dès maintenant (…) Agadir comme Marrakech ne pourront plus réaliser des croissances à deux chiffres. Les partenaires internationaux sont demandeurs, ils veulent plus de capacité», conclut-il.
La rareté de la capacité fait que le prix augmente
Pour sa part, Abdelhaq Chahli, président de l’Association régionale de l’industrie hôtelière d’Agadir (ARIHA) et vice-président du CRT du Souss-Massa, fait remarquer que la rareté de l’offre tire inévitablement les prix vers le haut. «Si on regarde la projection tarifaire des hôtels à Agadir sur les trois années écoulées, elle est toujours en augmentation. Pourquoi ? Parce qu’il y a une rareté de capacité à mettre à disposition de ces partenaires qu’il s’agisse d’OTA (d’ agences de voyage enn ligne) ou de tour-opérateur», explique-t-il.
Par conséquent, «la majorité des grands tour-opérateurs, quels que soient leur nationalité ou leur marché, passent dernièrement à des contrats de garantie pour s’assurer du contingent de chambres qu’ils veulent mobiliser à n’importe quelle période de l’année».
Agadir réalise un taux moyen d’occupation de 75%. Cependant, par rapport à des destinations comme la Tunisie, la Grèce et l’Égypte, elle est plus chère, relève Abdelhaq Chahli. Le président de l’ARIHA dresse un tableau détaillé de l’évolution du produit d’Agadir Souss-Massa qui est une station balnéaire par excellence.
«C’est un produit de loisirs. Qui dit produit de loisir, dit distribution commerciale sur le tour-operating. Il faut signaler que le tour-operating est étroitement tributaire de l’aérien. Donc, un tour-opérateur a besoin de transport aérien et terrestre, mais surtout de chambres d’hôtel pour pouvoir monter des packagings et les vendre à ses clients», souligne Chahli.
Le président de l’ARIHA précise par ailleurs que, dans les années 1980, Agadir était principalement desservie par les grands tour-opérateurs, avec plus de 90% de connexions aériennes via des charters.
«La métamorphose est survenue en 2011 avec l’Open Sky où le Maroc s’est ouvert sur la libération du ciel. On a alors vu arriver les low-cost qui ont progressivement éradiqué la majorité des charters. Aujourd’hui, plus de 80% des connexions sont faites via des low-cost et quelques vols réguliers, avec seulement 2% de charters», explique Abdelhaq Chahli.
Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO