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Compléments alimentaires : un marché parallèle hors de contrôle

Face à la prolifération de compléments alimentaires, dits «naturels», vendus hors du circuit officinal, la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc tire la sonnette d’alarme. Invoquant des risques sanitaires et des violations du cadre légal, elle interpelle les autorités sur l’urgence d’une régulation plus stricte. En parallèle, elle s’inquiète des réformes à venir sur les prix des médicaments.

La multiplication de produits, dits «naturels», en vente libre, vantant des bienfaits pour le sommeil, la mémoire, l’immunité ou encore la gestion du stress, ne cesse d’alimenter les étals des marchés informels, des boutiques bien-être et les pages de nombreuses plateformes en ligne. Des produits qui ont envahi aussi les réseaux sociaux dont les bienfaits sont défendus par les présumés professionnels de la santé. Mais derrière ces allégations santé se pose une question réglementaire de fond. Ces produits échappent-ils aux règles encadrant les substances à visée pharmacologique, et quels risques pour les consommateurs ?

Anarchie
C’est précisément cette dérive que dénonce aujourd’hui la Confédération des syndicats des pharmaciens du Maroc (CSPM), dans un courrier officiel adressé au ministre de la Santé et de la Protection sociale.

L’organisation, représentative de la profession officinale à l’échelle nationale, met en garde contre la vente massive, et selon elle illégale, de compléments alimentaires à base de plantes relevant du monopole pharmaceutique. La lettre, transmise également à l’Ordre national des pharmaciens, à l’Agence marocaine du médicament et des produits de santé (AMMPS), ainsi qu’à l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA), dénonce la présence sur le marché de produits contenant des substances actives, inscrites aux pharmacopées officielles européennes et américaines.

«Depuis l’arrêté ministériel du 30 avril 2019, ces pharmacopées sont reconnues comme références officielles au Maroc. Or, la loi 17-04 encadrant les médicaments stipule clairement que toute substance ayant un effet physiologique, dès lors qu’elle figure dans l’une de ces pharmacopées, doit être dispensée exclusivement par un pharmacien», prévient Mohamed Lahbabi, président de la CSPM.

En effet, l’organisation affirme avoir recensé plusieurs produits en vente libre contenant des extraits de Panax ginseng (vitalité, mémoire), Hypericum perforatum (humeur, anxiété), Passiflora incarnata (insomnie), Echinacea purpurea (défenses immunitaires) ou encore Valeriana officinalis (stress, sommeil). Commercialisés dans des herboristeries urbaines, des marchés informels, sur des sites de e-commerce ou via les réseaux sociaux, ces produits échappent à tout contrôle pharmaceutique.

«Bien que présentés comme naturels, ces compléments contiennent des principes actifs à effet pharmacologique reconnu et ne devraient être délivrés que sous supervision officinale», rappelle la CSPM, qui évoque une atteinte manifeste au monopole légalement établi de la profession.

Une enquête s’impose
Outre une alerte sanitaire, la démarche de la CSPM revêt une dimension juridique claire. L’organisation s’appuie sur les articles 4, 30 et 108 de la loi 17-04, qui définissent le médicament, consacrent le monopole des pharmaciens sur la dispensation, et interdisent toute vente de substances actives hors du circuit officinal. Elle réclame l’ouverture d’une enquête sur les circuits parallèles, la saisie des produits concernés, une clarification réglementaire sur le statut des plantes utilisées, ainsi que des campagnes de sensibilisation auprès du public sur les risques encourus. Elle appelle également à l’application stricte des sanctions prévues par la législation pharmaceutique. La confédération ne s’arrête pas là.

Dans un autre courrier, elle sollicite une réunion urgente avec le ministère pour discuter du projet en cours de révision des prix des médicaments. La CSPM y exprime ses craintes concernant certaines recommandations émises par le cabinet Southbridge, chargé d’une étude sur le sujet, qui pourraient, selon elle, menacer la viabilité économique des pharmacies de proximité, notamment en milieu rural.

Dans un souci de recouper les informations et de recueillir la position de l’Agence marocaine du médicament, nous avons tenté à plusieurs reprises de joindre cette dernière, en vain.

Mohamed Lahbabi
Président de la CSPM

«Depuis l’arrêté ministériel du 30 avril 2019, ces pharmacopées sont reconnues comme références officielles au Maroc. Or, la loi 17-04 encadrant les médicaments stipule clairement que toute substance ayant un effet physiologique, dès lors qu’elle figure dans l’une de ces pharmacopées, doit être dispensée exclusivement par un pharmacien».

Maryem Ouazzani / Les Inspirations ÉCO



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