Poivron : le Maroc bouscule le marché européen

En pleine ascension, le Royaume s’affirme comme un acteur incontournable du marché européen du poivron. Tandis que l’Espagne, leader historique, voit ses exportations chuter depuis 2019, le Maroc enregistre une croissance impressionnante de plus de 65%, profitant d’une demande en forte hausse et d’une offre plus compétitive.
La demande de poivrons marocains explose en Europe, comme en témoignent les derniers chiffres de la direction générale de la Commission européenne chargée de l’information statistique (Eurostat). Autrefois dominé par l’Espagne et les Pays-Bas, le marché du poivron est en pleine mutation.
En l’espace de cinq ans, les exportations marocaines vers l’Union européenne ont connu une hausse spectaculaire, portées par une demande croissante. Face au déclin progressif de la production espagnole et à une offre restreinte d’autres pays, le Maroc s’impose désormais comme un fournisseur incontournable pour les distributeurs et détaillants européens.
Des exportations en forte hausse
Le Maroc occupe aujourd’hui la troisième place sur le marché européen du poivron, derrière l’Espagne et les Pays-Bas. Entre 2019 et 2024, le pays a vu ses exportations vers l’UE augmenter de 65,6%, atteignant 188,13 millions de kilos vendus en 2024, contre 113,61 millions cinq ans plus tôt.
Cette progression tranche avec la situation de ses principaux concurrents. L’Espagne, bien qu’encore leader avec 37,75% des parts de marché, a vu ses exportations chuter de 192 millions de kilos sur la même période, enregistrant une baisse de 26,4%. Les Pays-Bas ne sont pas en reste, avec une diminution de 20,65% de leurs volumes exportés depuis 2019.
La production marocaine gagne en compétitivité
Le succès du Maroc s’explique par plusieurs facteurs : une production en forte croissance, un positionnement stratégique et une adaptation aux attentes du marché européen. Alors que l’offre espagnole se raréfie, les distributeurs européens se tournent vers le Maroc, qui assure un approvisionnement régulier, notamment en Scandinavie où la demande explose.
Cette tension sur le marché entraîne une hausse significative des prix. En 2024, le poivron s’échange en moyenne à 2,01 euros par kilo, contre 1,52 euro en 2019. Le Maroc en tire largement profit, son chiffre d’affaires lié aux exportations de poivrons vers l’UE ayant grimpé de 122 millions d’euros en cinq ans, atteignant 235,41 millions d’euros en 2024. L’essor du poivron marocain repose sur une structure de production qui s’est considérablement renforcée ces dernières années.
Avec plus de 220 hectares de serres à Agadir et une production en plein champ en expansion, les agriculteurs marocains misent sur une offre diversifiée, notamment avec des variétés très prisées comme le poivron italien rouge.
Cette montée en puissance s’explique aussi par des coûts de production plus bas que ceux de ses concurrents européens, ainsi que par une logistique efficace permettant une distribution rapide sur les marchés clés. En été, lorsque la production néerlandaise est au plus fort, le Maroc reste un acteur compétitif, proposant une alternative viable aux poivrons hollandais. Si la tendance actuelle se poursuit, le Maroc pourrait à terme menacer la suprématie espagnole sur le marché du poivron en Europe.
Avec des infrastructures agricoles en développement, une demande croissante et des prix attractifs, le Royaume semble bien positionné pour continuer son ascension. Cependant, des incertitudes subsistent. La dépendance aux conditions climatiques, la réglementation européenne sur les importations et la concurrence turque, qui connaît également une croissance rapide (+46,93% en cinq ans), sont autant de défis à anticiper.
Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO