Maroc

Taux directeur : le marché réclame une baisse !

Baisse ou maintien du taux directeur ? Bank Al-Maghrib rendra sa décision lors de son conseil trimestriel prévu demain. Les attentes du marché se cristallisent autour d’une possible réduction du taux directeur de 25 points de base. Dans un contexte où l’inflation semble sous contrôle et les prévisions économiques pour 2025 promettent une reprise soutenue, les observateurs espèrent une nouvelle impulsion pour soutenir l’économie. BAM, elle, devrait maintenir le statu quo.

La tension est palpable à la veille de la réunion du Conseil de Bank Al-Maghrib, prévue ce 17 décembre 2024. Les observateurs économiques et les analystes du marché retiennent leur souffle, anticipant une possible baisse du taux directeur de 0,25%. Une telle décision, si elle était prise, marquerait un épisode supplémentaire dans l’ajustement graduel de la politique monétaire amorcée depuis juin dernier.

Pour rappel, Bank Al-Maghrib a adopté une stratégie prudente tout au long de 2024. Après une première baisse de 0,25 point du taux directeur à 2,75% en juin, inchangé en septembre, les analystes du marché estiment que la banque centrale vise un atterrissage à 2,5% en cette fin d’année et probablement une nouvelle baisse pour mars 2025.

Cette approche reflète une volonté de maîtriser les pressions inflationnistes tout en soutenant une forte reprise économique.

Les arguments en faveur d’une nouvelle baisse

Selon plusieurs analystes, les conditions sont réunies pour justifier une nouvelle diminution du taux directeur d’au moins 0,25%. Trois facteurs principaux viennent appuyer cette hypothèse. Déjà, les taux obligataires à court terme évoluent actuellement toujours en dessous du taux directeur, signalant un potentiel d’assouplissement monétaire pour réduire davantage les coûts d’emprunt.

En outre, avec des taux réels positifs et une prévision autour de 2,5% pour 2025, une marge de manœuvre existe pour réduire le taux directeur sans risquer un dérapage inflationniste. Par ailleurs, les analystes abordent un contexte macroéconomique rassurant. Car, malgré des tensions géopolitiques et des défis nationaux tels que la sécheresse ou les subventions au gaz, l’inflation continue de se décélérer. Les données disponibles indiquent une variation de l’indice des prix à la consommation (IPC) de seulement 0,7% entre octobre 2023 et octobre 2024.

L’inflation moyenne devrait s’établir entre 1,8% et 2% en 2024, ce qui reste en ligne avec l’objectif de la banque centrale. «Les indicateurs sont clairs : la situation actuelle offre une marge de manœuvre suffisante pour une nouvelle baisse. Les taux réels sont positifs, l’inflation est sous contrôle, et les taux obligataires à court terme soutiennent cette direction», explique un analyste financier.

Les obstacles à surmonter
Cependant plusieurs facteurs pourraient freiner une décision de baisse ce mois-ci, notamment la matrice de risque liée aux élections en Europe et aux États-Unis, ainsi que l’impact potentiel d’évolutions géopolitiques comme le retour de Donald Trump, qui ajoutent des zones d’ombre susceptibles de peser sur l’arbitrage du Conseil.

Par ailleurs, Bank Al-Maghrib maintient une approche prudente, contrastant avec la BCE qui poursuit des baisses graduelles de ses taux directeurs, n’ayant pour sa part réduit son taux que de 25 points de base cette année.

«Il y a des incertitudes globales qui doivent être prises en compte. Les événements géopolitiques et les évolutions économiques mondiales pourraient influencer le Conseil dans une approche plus prudente», souligne un analyste.

Tout dépendra de l’équilibre que le Conseil choisira d’adopter entre le soutien à l’économie et la gestion des incertitudes globales.

Une dynamique économique prometteuse pour 2025
La décision à venir doit également être envisagée à la lumière des perspectives économiques pour 2025. Selon un expert en économie, l’année prochaine devrait connaître une reprise économique notable, portée par les secteurs non agricoles avec une croissance proche de 4%. Les secteurs de l’infrastructure, du BTP et de l’immobilier affichent une forte dynamique, soutenue par des mesures fiscales ciblées telles que des hausses salariales et des transferts sociaux. Ces actions renforcent la demande interne tout en stimulant l’activité économique.

«2025 s’annonce comme une année charnière. Les secteurs non agricoles vont continuer à tirer l’économie, et les mesures fiscales renforceront la demande interne, mais une surveillance de l’inflation reste cruciale», note l’expert.

En parallèle, le dirham continue de bien se comporter face aux devises majeures, en particulier le dollar. Cette stabilité soutient les importations tout en préservant les avoirs officiels de réserve.

Quelle décision pour le Conseil ?
Alors que le marché espère une baisse de 25 points de base, le Conseil de Bank Al-Maghrib qui devrait maintenir le statu quo sera amené à trancher entre les opportunités offertes par un environnement inflationniste sous contrôle et les incertitudes pesant sur l’économie mondiale. Une chose est sûre : la décision de demain sera scrutée de près par les investisseurs, les entreprises et les ménages, tant son impact sur les conditions de financement et la reprise économique est déterminant.

Pour le moment, tout semble indiquer que la prudence prévaudra, avec une baisse limitée à 25 points de base, suivi d’une stabilisation au cours du premier semestre 2025. L’économie locale semble bien engagée pour une reprise soutenue, mais le chemin reste semé d’embûches à mesure que les événements mondiaux continuent d’évoluer.

BKGR penche pour un statu quo

Contrairement à l’optimisme de certains acteurs du marché, BKGR (BMCE Capital Global Research) se montre plus prudent et anticipe un maintien du statu quo lors du Conseil de Bank Al-Maghrib. Selon ses analyses, la banque centrale pourrait privilégier l’observation des évolutions économiques avant tout ajustement du taux directeur.

BKGR met en avant la consolidation en cours de l’inflation, qui converge vers l’objectif cible de 2%, ainsi que l’amélioration des indicateurs macroéconomiques, notamment la croissance, prévue à +2,8% pour 2024.

Enfin, cette approche prudente reflèterait la volonté de Bank Al-Maghrib de surveiller les risques externes et de garantir la stabilité avant d’envisager une éventuelle réduction de son taux directeur dans les mois à venir.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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