NEET : le CESE alerte sur l’insuffisance des politiques publiques
Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s’est autosaisi, aux fins de préparer un avis sur les jeunes sans éducation, ni emploi, ni formation, connus sous l’acronyme des NEET (not in education, employment or training), et le constat est alarmant.
En 2022, un jeune Marocain sur quatre, âgé de 15 à 24 ans, se trouve dans une situation de NEET, soit 1,5 million d’individus, selon le Haut-Commissariat au plan (HCP). Dans le cadre d’une autosaisine, le CESE a émis une analyse soulignant tout d’abord que «ce chiffre souligne l’insuffisance des stratégies et politiques publiques consacrées à l’intégration socio-économique de cette catégorie particulièrement vulnérable».
Phénomène aux multiples facteurs
Le CESE, dans son étude intitulé «Les jeunes NEET : quelles perspectives d’inclusion socio-économique», identifie trois inflexions majeures. Premièrement, le décrochage scolaire entre les niveaux du primaire et du secondaire collégial, rappelant que 331.000 élèves en moyenne quittent, chaque année, les bancs de l’école. «Cette rupture est principalement due à l’échec scolaire, à des difficultés d’accès aux établissements scolaires, en particulier dans le milieu rural, ainsi qu’à un déficit important en matière d’offre de formation professionnelle», souligne le CESE.
Deuxièmement, une fois sur le marché de travail, les barrières sont nombreuses. «L’inadéquation de la formation avec les besoins du marché du travail et l’efficacité encore limitée des services d’intermédiation pour l’emploi peuvent expliquer cette situation.
D’autres facteurs tels que la discrimination de genre et le poids des tâches domestiques pénalisent particulièrement les femmes qui représentent la plus forte proportion des NEET (72,8%)», lit-on dans l’étude.
Et, troisièmement, la perte d’un emploi ou même un arrêt volontaire peuvent conduire à cette situation de vulnérabilité, selon le CESE. Pour pallier ce phénomène et accélérer l’insertion sociale et économique de ces jeunes, le CESE dresse cinq axes. Le premier axe concerne le renforcement des capacités de repérage et de suivi des jeunes NEET. Pour ce faire, le CESE recommande, notamment, la création d’un système d’information élargi pour le repérage des NEET et le suivi de leurs parcours, qui regroupe des données croisées de sources multiples. Le deuxième axe a trait à la mise en place de mesures préventives pour éviter que de nouvelles catégories de jeunes ne se retrouvent en situation de NEET.
Pour ce faire, le CESE recommande de «garantir l’effectivité de l’obligation de scolarisation jusqu’à 16 ans», en mettant en place les «mesures de rétention et de réinsertion nécessaires», de généraliser les écoles communautaires en milieu rural et de renforcer l’offre publique de formation professionnelle en milieu rural, en adaptant les spécialisations aux besoins de chaque région et de chaque territoire. Le troisième et quatrième axe visent d’abord à mettre en place un écosystème élargi pour accueillir et orienter les jeunes NEET vers des options personnalisées répondant à leurs besoins spécifiques et améliorer la qualité et l’efficacité des services et programmes d’insertion des jeunes NEET. Cela pourrait être possible grâce au développement d’un réseau dense de points d’accueil, d’écoute et d’orientation des NEET ou encore en mettant en place des dispositifs de contractualisation appropriés avec le secteur privé ou le tiers-secteur.
Meilleure cadre de gouvernance
Le dernière axe s’attaque à l’insuffisance des politiques publiques, pour lesquelles il faudrait mettre en place «un cadre de gouvernance, caractérisé par une cohérence et une complémentarité optimale entre les divers programmes, ainsi qu’une coordination continue et efficace entre les différentes parties prenantes concernées». Bien que des initiatives aient été prises auparavant, le conseil appelle à «l’accélération du rythme des réformes majeures au niveau des politiques sociales et économiques telles que l’éducation, la formation professionnelle, l’aide sociale et les politiques sectorielles liées à la création d’opportunités d’emploi».
De plus, il faudrait établir un cadre contractuel clairement défini entre les autorités publiques et les organisations de la société civile partenaires.
Enfin, le CESE appelle à l’attribution de la mission de coordination et de suivi de la mise en œuvre des programmes visant à intégrer les jeunes NEET à un comité spécial présidé par le Chef du gouvernement, comprenant tous les acteurs impliqués dans les questions d’éducation, de formation et d’emploi aux niveaux national et régional, en veillant à impliquer les organisations de la société civile travaillant étroitement avec la catégorie de jeunes NEET.
Faiza Rhoul / Les Inspirations ÉCO