Appréciation du dirham face au dollar : une aubaine pour la balance commerciale
Près de 50% des importations marocaines sont libellées en dollar contre 35 à 40% des exportations.
Il est difficile de contester que le durcissement ou le resserrement des politiques monétaires des banques centrales des pays développés et émergents, dans l’optique d’étouffer les poussées inflationnistes, a quelque part mis à mal la stabilité des principales monnaies utilisées dans le commerce international et les transactions transfrontalières. Après une série de baisses relevées face au dollar (valeur refuge) en 2022, l’euro s’apprécie en ce début d’année 2023 par rapport au billet vert, en chute libre.
Au cours de la journée du mardi 10 décembre 2023, le dollar américain a frôlé son plus bas niveau depuis sept mois par rapport aux autres principales devises. À titre illustratif, le repli du billet vert a hissé l’euro à un sommet de sept mois, à 1,07605 dollar.
Parmi les raisons qui peuvent être invoquées et qui sont susceptibles d’être à l’origine de la perte de terrain de la monnaie du pays de l’Oncle, citons la modération des salaires aux États-Unis. Une donne de nature à réduire les anticipations de hausse de taux de la Fed (Banque centrale américaine). Ce qui, à l’évidence, se fait au détriment du dollar.
Au-delà de ces explications, la courbe baissière du billet vert par rapport aux principales devises, s’est traduite au niveau national par l’appréciation du dirham face au dollar américain qui n’est autre que la monnaie la plus utilisée au monde pour les transactions. Quelles peuvent être les conséquences du trend haussier de la monnaie nationale face au dollar, notamment pour l’économie ?
Quelques retombées positives
L’économiste Omar Bakkou, spécialiste en politique de change, livre une analyse édifiante en réponse à l’interrogation. «La baisse du dollar a pour conséquence l’appréciation du dirham (face à cette devise) et un recul par rapport à l’euro», avance l’économiste. Tout en évoquant l’effet palier, notre source suggère une correction ou un redressement. Faudrait-il le rappeler, plusieurs mois de l’année 2022 ont été marqués par la dépréciation du dirham face à la monnaie américaine. «50% des importations de notre pays sont libellées en dollar, pour ne citer que les hydrocarbures et les produits alimentaires. L’appréciation du dirham par rapport au billet vert a un impact positif sur la facture des achats à l’étranger.
De surcroît, cette configuration agit favorablement sur l’inflation interne, laquelle est très sensible aux cours des marchés internationaux et à la variation de la monnaie nationale face à l’euro et au dollar», analyse l’expert. Notons tout de même que la hausse du dirham par rapport à la monnaie américaine n’a pas que des répercussions bénéfiques sur l’économie nationale. À ce titre, il importe de rappeler que 35% à 40% des exportations du Maroc sont libellées en dollar. À en croire notre source, l’impact du phénomène de la hausse de la monnaie nationale, observée ces derniers temps, pourrait impacter négativement les exportations marocaines. Et ce, du fait d’un léger renchérissement des produits exportés facturés en dollar. Tout compte fait, le renforcement du dirham face au billet vert est profitable à la balance commerciale, du reste, structurellement déficitaire.
En termes de valeur, le Maroc importe plus de produits en dollar qu’il n’exporte de biens libellés dans la monnaie du pays de l’Oncle Sam. À l’heure où les cours mondiaux des hydrocarbures et les prix des matières premières, ainsi que ceux des produits alimentaires, sont toujours élevés à l’international, il est clair que l’appréciation du dirham face au dollar est, quelque part, une situation bénéfique pour la balance commerciale, mais pour combien de temps ? Difficile de répondre à cette interrogation en raison de la récurrence des fluctuations de la valeur des principales devises, sous l’effet des politiques monétaires restrictives des banques centrales, désormais préoccupées par la lutte acharnée contre l’inflation.
Momar Diao / Les Inspirations ÉCO