Maltraitance des travailleurs migrants : les Danois boycottent les fruits rouges espagnols
Des leaders danois de la distribution alimentaire ont annoncé leur intention de boycotter les fruits rouges, en provenance des exploitations agricoles de Huelva, du fait du non-respect des droits des travailleurs et des abus rapportés par un média danois.
C’est l’histoire de l’arroseur arrosé ! Après avoir colporté toutes sortes de rumeurs malveillantes sur les exportations marocaines, la filière agricole espagnole se trouve dans la tourmente. Un appel au boycott des fruits rouges en provenance d’Espagne est lancé après la publication, par Danwatch, un média danois, d’une enquête dénonçant les mauvais traitements infligés aux travailleurs migrants irréguliers et aux ouvrières travaillant dans les champs de fraises. C’est ainsi que de grands noms de la distribution alimentaire danoise ont annoncé mettre fin à leur approvisionnement en fruits rouges en provenance de Huelva, après avoir constaté des abus exercés à l’encontre des personnes employées dans ces exploitations.
« Les fraises sont collectées par des travailleurs qui sont soumis quotidiennement à des humiliations, et qui exercent dans des conditions de travail inhumaines, abusives et, parfois, dans l’illégalité », a assené le média danois, épinglant sans ménagement les patrons des exploitations agricoles espagnoles.
Aussitôt le rapport rendu public, Salling group, une holding propriétaire d’une importante chaîne danoise de supermarchés (Fotex et Netto), a décidé de boycotter les barquettes de fruits rouges en provenance de ces exploitations agricoles. De même, le groupe a souligné qu’il mandatera ses propres enquêteurs afin de mener des inspections auprès des patrons des exploitations et des travailleurs, pour vérifier le respect ou non des droits de ces derniers. Et comme un malheur ne vient jamais seul, c’est au tour d’un autre grand nom de la distribution danoise de pointer du doigt les mauvaises conditions de travail des ouvriers agricoles. Coop, qui détient les supermarchés SuperBrugsen et Irma, s’est déclaré sensible à cette cause. Cette décision a été prise après que le portail Danwatch ait transmis les résultats de son enquête sur le terrain aux concernés pour les informer du calvaire des migrants travaillant dans les champs de fraises à Huelva. Le groupe danois pointe du doigt deux géants de cette industrie à l’enjeu financier considérable, en l’occurrence quatre-cent-soixante-quinze millions d’euros, pour le seul premier trimestre 2020. Il s’agit en effet de Tierras Del Condado et Surepxort.
Ce dernier, présent également au Maroc, fait partie des entreprises qui font appel aux saisonnières marocaines pour les campagnes de fruits rouges. À signaler que ce groupe espagnol, qui dispose de deux unités de production sous nos latitudes, avait transmis aux autorités marocaines d’engager les saisonnières également sur ses sites marocains.
Par ailleurs, l’enquête a relevé que les interviewés ont une confiance pour le moins limitée dans les institutions espagnoles, qui ne protègent guère leurs droits. Les enquêteurs se sont déplacés durant le mois de mai dans la région, et ont pu s’entretenir avec seize ouvriers agricoles.
De son côté, la filière danoise du groupe allemand Lidl a confié que ses responsables ont effectué récemment une visite surprise à des exploitations agricoles, à l’occasion de laquelle ils ont pu relever des abus et des atteintes manifestes à la législation du travail. Il serait donc temps que la filière songe à mettre sérieusement de l’ordre dans ses rangs ! Début juillet, la police a fait savoir qu’elle a procédé à l’arrestation, en mai dernier, de deux patrons de fermes agricoles qui, non seulement exploitaient des migrants irréguliers, mais les extorquaient également sans vergogne. Les deux propriétaires véreux faisaient ainsi payer à des travailleurs journaliers la délivrance des contrats de travail grâce auxquels ils pouvaient décrocher un titre de séjour et régulariser leur situation administrative.
Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations ÉCO