Maroc: vers un allègement des mesures barrières pour sauver l’informel ?
L’Organisation démocratique du travail supplie le gouvernement d’alléger les mesures barrières en vigueur dans le cadre de la lutte contre la Covid-19 afin de donner une nouvelle impulsion à l’activité économique informelle.
Le Maroc s’est fait une belle réputation dans la lutte contre le nouveau coronavirus en devenant une figure de proue en Afrique, aussi bien dans la vaccination contre la Covid-19 que dans l’atténuation des effets pervers de la crise. En effet, le royaume ne s’est pas mal débrouillé face au nouveau virus, déployant des efforts considérables en matière de vigilance, de réponses socio-économiques et de mesures sanitaires. Seulement voilà, si ces mesures ont permis de sauver des vies, elles ne sont pas sans conséquences. Le pays a été sévèrement impacté par l’effondrement économique global, qui touche notamment l’Europe, son principal partenaire commercial, comme l’a constaté dans plusieurs rapports le Haut-commissariat au plan (HCP). Les enquêteurs du HCP sont formels : les mesures de confinement pour faire face à la propagation de la pandémie montrent, elles aussi, des effets négatifs rapides sur l’économie».
Et si la crise de la Covid-19 a provoqué un choc sanitaire frappant directement le marché du travail, selon les experts, l’impact socio-économique de la crise a été ressenti en premier lieu -et durement- par les travailleurs du secteur informel, qui représentent une grande majorité des Marocains actifs et des populations étrangères (migrants, réfugiés), généralement employés dans des secteurs particulièrement vulnérables à la crise comme celui du tourisme ou des transports, la vente au détail ou encore la «gig economy», mais également par tous ceux dont le travail ne peut être effectué à distance. Pis encore, vulnérables à l’appauvrissement et aux maladies, les travailleurs informels ne bénéficiant pas des filets de sécurité sociale et des systèmes de soutien nécessaires ont en majorité perdu leurs moyens de subsistance. Dès lors, il convient de desserrer les mesures barrières afin d’atténuer davantage les impacts de la crise sur le chômage, le sous-emploi, la pauvreté au travail, mais aussi l’impact différencié sur les groupes vulnérables comme les travailleurs indépendants, les travailleurs non-protégés et les personnes occupant des formes d’emploi atypiques, urbains et ruraux, notamment les jeunes et les femmes, comme l’ont toujours recommandé plusieurs experts. Aujourd’hui, malgré le démarrage du plan relance économiques qui caresse de grandes ambitions, et le non-renouvellement du premier confinement général qui, au plus fort de la crise, a quasiment mis à genou l’économie nationale, les acteurs de l’informel sont dans le creux de la vague, du fait, essentiellement, de l’état d’urgence toujours en vigueur. C’est du moins ce que déplore l’Organisation démocratique du travail (ODT) qui monte au créneau pour appeler à l’allégement des mesures de restriction en application au niveau national. Les personnes les plus vulnérables sont les plus exposées aux mesures de restriction prises dans le cadre de la lutte contre la propagation du virus, souligne Ali Lotfi, secrétaire général de l’ODT.
«Aujourd’hui, nous avons 4,5 millions de familles dépendant essentiellement de l’informel, qui sont heurtées de plein fouet par les effets négatifs des mesures barrières mises en place par le gouvernement afin de limiter la vitesse de propagation de la Covid-19 dans le pays», explique-t-il. Et d’ajouter qu’en parallèle, les disparités sociales se sont aggravées sous le poids «insupportable» de la crise économique qui continue de faire des ravages.Tant les entreprises du secteur informel que les PME plus ou moins structurées sont confrontées à de graves problèmes de trésorerie, poursuit ce dernier, déplorant les nombreuses faillites de sociétés et la hausse inquiétante du taux de chômage. Ainsi, pour aider les familles pauvres, les entreprises en difficulté et les salariés dans la précarité, Ali Lotfi supplie le gouvernement de lever les barrières restrictives afin de donner une nouvelle impulsion à l’activité économique informelle, d’autant plus les cas de contaminations à la Covid-19 sont en constante baisse, alors que la campagne de vaccination contre le nouveau coronavirus bat son plein.
Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco