Maroc

Misogynie : Pourquoi les mentalités ne changent pas ?

La profonde misogynie ancrée dans les mentalités marocaines se confirme de plus belle pendant Ramadan, un mois qui se veut sacré pour les musulmans, et où le corps de la femme est, pourtant, davantage diabolisé. Pourquoi les mentalités ne changent-elles pas ? Pourquoi est-ce autant ancré dans notre culture ?

Bien que Ramadan soit un mois de piété, de jeûne et de rapprochement du bon Dieu pour les musulmans, il est généralement caractérisé par des pratiques culturelles et sociales spécifiques, particulièrement à l’égard des femmes. Elles sont, en effet, souvent considérées par les hommes comme des tentatrices qui peuvent les distraire dans la pratique de leur religion.

Éternelle objet de tentation
Cette identification issue d’un discours misogyne, devenu avec le temps une croyance, «ne fait que répondre à un désir et non à un besoin chez l’homme, qui, de plus, s’intensifie si on le lui interdit», soutient Driss Ait Lhou, sociologue. Et d’ajouter que «tout est question de dosage. Pendant le mois de Ramadan, l’homme perd son ‘’équilibre». Il s’oblige à se résigner aux interdits, ce qui crée plus de frustration et le besoin d’imposer sa domination masculine». Objet de tentation, la femme a depuis toujours ‘’hérité’’ de l’homme cette étiquette pour qu’il puisse assouvir des désirs et apaiser les consciences. Il suffit que la femme – ose – porter des vêtements courts ou juste au corps pour qu’elle soit systématiquement stigmatisée. Tout cela parce qu’elle est perçue comme étant une provocatrice qui cherche à attirer l’attention des hommes. Une vision dans la majorité des cas erronée.

Les hommes, eux, considèrent généralement le corps des femmes comme intrinsèquement «plus sexuel» que le leur. Il doit donc être caché. Une idéologie qui date de la nuit des temps, qui ne risque pas de changer de sitôt comme le confirme Ait Lhou. Le sociologue souligne que cette persécution provient de nombreux facteurs qu’ils soient juridiques ou sociaux. «Le fait que c’est toujours l’homme qui commande est ancré dans la culture marocaine, parce que cette croyance a été alimentée à travers les cultures et les religions, et systèmes éducatifs, pendant des décennies». Plus optimiste, une autre source nous confie que les mentalités au Maroc changent, mais pas rapidement. «Le débat public autour de la femme et la famille en est l’illustration. On y va doucement mais sûrement. Même dans les pays dits démocratiques, on est très loin de l’équité tant espérée. La société marocaine des années 1980 n’est pas celle d’aujourd’hui», assure notre interlocuteur.

Cela peut partir en insultes, si ce n’est plus !
Pire encore, les femmes sont souvent confrontées à des comportements agressifs de la part des hommes qui se sentent frustrés par leur présence, en particulier pendant Ramadan. Ces comportements peuvent aller de commentaires inappropriés aux attaques physiques. «Je me rendais à mon travail, j’attendais tranquillement un taxi quand deux jeunes hommes dans la trentaine ont commencé à m’insulter sans aucune raison sans même me connaître», raconte Ghizlane, qui estime avoir été bafouée pour la seule et unique raison d’avoir oser porter un jean serré.

Ghizlane n’est pas la seule victime à souffrir le martyre. Tous les jours, femmes et jeunes filles subissent des violences gratuites, quand elles ne sont pas physiquement violentées. «Une bande d’adolescents m’ont jeté des pierres en pleine rue, devant tout le monde. Personne n’a réagi pour m’aider», témoigne, larmes aux yeux, Meryem.

Quel que soit leur âge, certains hommes s’octroient le droit de martyriser les femmes comme bon leur semble. «L’homme ne fait que théoriser sa supériorité. Il a construit le mythe masculin à travers ce qui est appelé la virilité», fait connaître le sociologue. Il est plus qu’urgent de sensibiliser la société à cette question et de promouvoir des valeurs de respect et d’égalité entre les sexes, conformément aux principes de l’Islam.

Kenza Aziouzi / Les Inspirations ÉCO

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