Maroc

Influenceur web : un business florissant hors des radars du fisc

Pas moins de 40% des entreprises marocaines rencontrent des difficultés de trésorerie à cause des effets de la crise sanitaire. En plus de la réduction de leurs effectifs, sous tension, les entreprises souffrent. Des mesures d’accompagnement ont certes été mises en place ; encore faut-il accélérer la cadence pour sauver ces opérateurs d’une crise sans précédent.

L’âge d’or des tableaux publicitaires est révolu… ou presque. Alors que, même dans la rue, tout le monde a les yeux rivés sur son téléphone, les panneaux d’affichage ont perdu de leur pouvoir d’attraction. Jadis considérés comme des endroits idéals pour appâter les piétons ou encore les conducteurs de passage, les zones à fort trafic sont à chercher ailleurs, en dehors des routes très fréquentées. La publicité en ligne, en pole position des investissements publicitaires, est aujourd’hui plus jamais à la mode au grand dam des médias classiques, tels que la radio, la télévision et les journaux papier, lesquels peinent à capter l’attention des cibles des marques.

60.000, voire 80.000 DH par mois
Si dans ce bouleversement, ce sont les GAFA, avec un pouvoir économique et financier considérable, qui se taillent la part du lion, il n’en demeure pas moins que d’autres acteurs tirent profit de ce business florissant. Ceux-là, ce sont les youtubeurs, les blogueurs ou encore les instagramers. Généralement spécialisés dans un domaine précis, comme le gaming, la beauté, le sport, le mode homme ou encore les voyages, ces personnes, que l’on appelle influenceurs, brassent des milliers, voire des millions de DH chaque jour. «Une personne qui publie deux ou trois petites vidéos par jour, filmées avec son smartphone, peut facilement encaisser 60.000, voire 80.000 DH par mois si elle atteint 400.000 vues pour chaque vidéo», confie un spécialiste qui collabore très souvent avec de nombreux créateurs de contenus web au Maroc. Avec un investissement de zéro dirham, on peut facilement gagner sa vie en devenant influenceur, explique-t-il. On retrouve généralement ces relais d’opinion influençant les habitudes de consommation dans un but marketing essentiellement sur Youtube ou Instagram. Et il suffit seulement d’une bonne exposition sur la toile pour faire partie de ces stars du web et des réseaux sociaux, lesquelles ne sont pas que des célébrités. Si la pratique est déjà ancrée dans la culture numérique et plus particulièrement du web et des plateformes de contenu et de réseautage social, beaucoup s’interrogent sur le statut juridique et fiscal de ces travailleurs «au noir» qui gagnent des mille et des cents sans se déclarer au fisc. «Tous les influenceurs ne travaillent pas dans la clandestinité, mais il y en a beaucoup qui n’ont aucun statut juridique ni fiscal. Ils gagnent énormément d’argent sans être inquiétés par le fisc», témoigne un expert de cette activité bien lucrative. «Les rares influenceurs qui ont des statuts légaux se déclarent auto-entrepreneurs», ajoute-t-il.

Un manque à gagner pour le fisc
Pour ce qui est des autres, «ils sont aussi invisibles que l’air», déplore un «geek» qui s’interroge sur le «laisser-faire» dont tirent profit ces stars du web. C’est d’autant plus regrettable que «quelques clics seulement suffiraient pour contrôler ce business florissant», souligne un interlocuteur qui explique préférer témoigner sous couvert d’anonymat plutôt que de se s’attirer la colère de ses «confrères» du web et des réseaux sociaux. Selon cette source, la Direction générale des impôts pourrait facilement déployer tous les moyens pour imposer des taxes aux influenceurs, puisque la régie publicitaire de Google, appelée AdSense et qui utilise les sites web ou les vidéos YouTube comme support pour ses annonces, laisse beaucoup de traces pouvant facilement permettre à l’administration fiscale de remonter jusqu’aux sources de paiements des influenceurs, lesquels sont payés par la firme américaine. «Google envoie ses paiements via société de transfert d’argent ou par virement bancaire direct. Cela veut dire qu’il existe une traçabilité des fonds que reçoivent les créateurs de contenus web», explique-t-on. Un défi de taille subsiste, toutefois. La forme de la rémunération de l’influenceur peut être diverse allant d’un voyage à une participation à un événement en passant par une offre gratuite de produits (objet de la publicité) ou une compensation financière. À ce niveau, la taxation des revenus générés semble presque impossible. Pourtant, une réglementation de ce business serait bien salutaire pour les caisses publiques. Il faut noter que la capacité fiscale du Maroc est évaluée à 27,2% du PIB, alors que les recettes fiscales représentaient 21,2% du PIB, soit un manque à gagner de 6,7 points de PIB. En dehors des considérations fiscales, une règlementation
de la publicité digitale sur les réseaux par le biais des influenceurs permettrait également aux marques de s’offrir des «posts» de qualité, dans la mesure où pas qui veut ne sera créateurs de contenus web. 

Google AdSense.
Comment ça marche ?

Proposé par Google aux éditeurs de site web et aux propriétaires d’une chaîne YouTube, le programme de monétisation de la firme américaine serait utilisé par des millions d’éditeurs de contenu en ligne qui cherchent à générer un revenu publicitaire. Notons que les revenus générés dépendent de plusieurs facteurs, comme la région où sont localisés vos visiteurs, la catégorie dans laquelle peut être placé le contenu proposé ou encore le nombre de pages vues. Google annonce sur son site que, en 2015, près de 10 milliards de dollars ont été versés aux éditeurs partenaires. Pour monétiser ses contenus vidéo ou articles de presse en ligne, il faut disposer d’un compte Google, d’un numéro de téléphone et une adresse postale associés au compte bancaire qui permettra de recevoir les paiements. Google exige que les contenus soient des créations originales. Au vu de ce qui se fait sur les plateformes digitales, pas sûr que la qualité soit une exigence.

Khadim Mbaye / Les Inspirations Éco


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