Fès : Jafife, la startup qui veut mener la révolution agricole en Afrique
Une startup de Fès veut révolutionner l’agriculture grâce au séchage solaire digitalisé. Cette technologie innovante réduit la consommation d’énergie, augmente la valeur ajoutée des produits et améliore les conditions de travail des agriculteurs, notamment des femmes. «Jafife» ambitionne de devenir le leader africain de la transformation durable des produits agricoles.
Le soleil, source d’énergie naturelle et inépuisable, devient un acteur majeur de la révolution agricole en Afrique. Jafife, une startup innovante basée à Fès, a prouvé que cette énergie pouvait être mise au service de la transformation et de la valorisation des produits agricoles.
Grâce à une technologie de séchage solaire digitalisé, elle ambitionne de révolutionner le secteur, en boostant les rendements, en préservant l’environnement et en améliorant les conditions de travail des agriculteurs, notamment des femmes. L’aventure Jafife a débuté il y a plus de trois ans, au cœur de la Cité de l’innovation de l’USMBA, avec une ambition claire de développer des solutions durables pour un secteur agricole en pleine mutation.
Fatima El Khou, ingénieure en mécanique système automatisé, a su insuffler à son équipe une énergie contagieuse pour concevoir des séchoirs solaires adaptés aux besoins spécifiques des agriculteurs marocains et africains. L’innovation réside dans la digitalisation de ce processus, permettant un contrôle optimal de la température et de l’humidité, et une optimisation de l’efficacité énergétique. Actuellement, la startup est en cours d’aménagement d’une nouvelle usine dans la ville de Fès.
Un marché juteux et un besoin en évolution
Le marché des produits séchés est en pleine expansion à l’échelle mondiale, avec un chiffre d’affaires estimé à 47,1 milliards de dollars en 2024 et des prévisions de croissance atteignant 65,34 milliards de dollars d’ici 2029. Au Maroc, le secteur représente plus de 1,3 milliard de dollars, et la région de Fès-Meknès concentre une part importante de ce marché, avec une valeur estimée à 400 millions de dollars (données du CRI Fès-Meknès).
Face à cette opportunité, Jafife propose une solution pour optimiser le processus de séchage tout en limitant l’impact environnemental.
«Nous avons développé une technologie qui permet de réduire la consommation d’énergie jusqu’à 65% et de minimiser l’empreinte carbone, tout en augmentant la valeur ajoutée des produits agricoles jusqu’à 45%», explique Fatima El Khou, soulignant que les séchoirs développés sont conçus pour répondre aux besoins spécifiques des agriculteurs, des coopératives et des agro-industries, en offrant une solution flexible et adaptable.
Une reconnaissance internationale qui confirme le potentiel
L’innovation et la pertinence de la solution proposée par Jafife ont été récompensées par une série de distinctions prestigieuses. La startup a brillé lors de plusieurs événements internationaux, représentant dignement le Royaume. Son apogée a été l’obtention du premier prix du GoGettaz Africa agripreneur prize 2024, un prix qui récompense les startups les plus innovantes du continent africain.
<«C’est une reconnaissance internationale qui valide notre travail et nous encourage à poursuivre nos efforts», souligne Fatima El Khou.
Jafife a également été primée au niveau national, remportant le premier prix de la compétition Innova Greeen, un programme qui vise à soutenir les projets innovants dans les secteurs de l’Agritech, du CleanTech et du Green Tech.
«Cette reconnaissance nous a permis de bénéficier d’un accompagnement précieux pour développer notre projet et le faire passer à l’étape suivante», précise l’entrepreneure.
L’émancipation des femmes au cœur du projet
Au-delà de son impact environnemental et économique, Jafife porte une attention particulière au rôle des femmes dans le secteur agricole.
«Nous croyons fermement que l’autonomisation des femmes est essentielle pour le développement durable de l’agriculture», affirme Fatima El Khou.
«Nos séchoirs sont conçus pour faciliter le travail des femmes, en leur offrant des conditions de travail plus sûres et plus confortables», précise-t-elle.
En réduisant la pénibilité des tâches liées au séchage, Jafife contribue à libérer du temps pour les femmes, leur permettant de se consacrer à d’autres activités génératrices de revenus et de renforcer leur rôle au sein de leurs communautés.
Vers une agriculture durable et connectée
L’avenir de Jafife s’inscrit dans une vision de devenir le leader africain de la transformation durable des produits agricoles. La startup est en phase de lancement de ses premiers pilotes sur le marché de la région de Fès-Meknès. Elle prépare le déploiement de sa plateforme digitale, qui permettra de connecter les agriculteurs aux agro-industries.
Cette plateforme offrira une multitude de services, de l’accès à des formations en ligne aux conseils techniques, en passant par la mise en relation avec des acheteurs potentiels.
«Notre objectif est de créer un écosystème agricole durable et connecté, qui permettra aux agriculteurs d’accéder à de nouvelles opportunités et de valoriser leurs produits de manière optimale», explique Fatima El Khou.
Fès-Meknès : terreau fertile pour les startups
Youssef Atif, directeur d’Incubooster, souligne l’importance de l’écosystème d’innovation de Fès-Meknès dans l’émergence de startups comme Jafife. «La Région Fès-Meknès, premier pôle universitaire du Maroc et berceau de l’Université Al Quaraouine, possède un terreau fertile pour l’innovation», explique-t-il.
Des initiatives telles qu’InovaGreen, un programme d’accompagnement des porteurs de projets dans les secteurs Agritech, CleanTech et Green Tech, et le fonds InovaInvest, porté par Tamwilcom, contribuent à dynamiser l’écosystème entrepreneurial et à soutenir les startups innovantes.
«Aujourd’hui, il y a une vraie dynamique dans la région, avec tous les acteurs qui avancent pour créer un écosystème innovant et qui accompagnent les jeune entrepreneurs dans la réalisation de leurs projets, dans leur financement et surtout leur concrétisation à travers la réalisation des premières commandes», conclut Youssef Atif.
Mehdi Idrissi / Les Inspirations ÉCO