La loi régissant l’enseignement supérieur va être révisée pour mettre fin aux différentes lacunes qui minent la qualité d’apprentissage. Il ne s’agit pas uniquement de réformer le volet pédagogique, mais aussi de redresser les dysfonctionnements relatifs à la gouvernance du secteur.
Après l’adoption de la loi-cadre de l’éducation et de la formation, fini les tergiversations et la discontinuité dans la mise en œuvre des réformes de l’enseignement supérieur. Le gouvernement est très attendu sur ce dossier. C’est l’une des priorités de cette rentrée politique, d’après une source gouvernementale. Une révision législative s’impose pour rehausser le volet qualitatif, surtout dans les établissements à accès ouvert, et permettre ainsi aux lauréats de s’insérer sans difficulté dans le marché du travail. Il ne s’agit pas uniquement de retoucher la loi 01.00, promulguée en 2000, organisant le système de l’enseignement supérieur et dont nombre de textes d’application ont connu un retard abyssal.
L’enjeu, à l’heure actuelle, est d’élaborer une nouvelle législation prenant en considération la refonte du système dans sa globalité. Cette fois-ci, il faut détailler tout le dispositif ayant trait au secteur privé et à la recherche scientifique. La réforme mise en place il y a presque deux décennies a plutôt été axée sur l’aspect pédagogique et n’a pas permis d’atteindre les objectifs escomptés en matière de promotion de la qualité des diplômes et d’adéquation des profils avec le marché du travail. La réforme en vue devra s’appuyer sur une vision globale et intégrée pour combler toutes les lacunes, à commencer par le renforcement de l’encadrement. Le constat est alarmant. La massification de l’université déteint sur la qualité de l’encadrement.
À ce titre, l’État est épinglé par le Conseil supérieur de l’éducation, de la formation et de la recherche scientifique car il n’a pas accordé l’attention nécessaire au renforcement du taux d’encadrement pédagogique qui s’est dégradé durant la période de la réforme. Ce taux est passé de 38 étudiants par enseignant chercheur dans les établissements à accès ouvert à près de 70 au moment de la révision en 2014 et à près de 83 en 2016. Un grand déphasage est constaté entre la volonté politique d’accroître le nombre d’étudiants dans l’enseignement supérieur (croissance de 108% entre 2011 et 2016) et les ressources humaines qui devaient accompagner cette évolution: l’effectif des enseignants n’a augmenté que de 12% sur cette même période. Les filières des sciences juridiques, économiques et sociales sont les plus frappées par le sous-encadrement pédagogique. Le gouvernement est très attendu sur le volet de l’amélioration de l’encadrement dans les universités dont l’autonomie a besoin d’être consolidée, comme préconisé par la loi-cadre. Le département de tutelle reconnaît les insuffisances en matière d’autonomie des universités qui n’est pas «encore assumée», pour reprendre l’expression du CSEFRS.
À cet égard, notons que plusieurs prérogatives stipulées dans la loi 01-00 n’ont pas été mises en œuvre. À titre d’exemple, la loi permet à l’université de valoriser son capital et de diversifier ses ressources notamment par la création de sociétés filiales ou des prises de participations, mais ces dispositions restent toujours lettre morte.Sur le plan pédagogique, une nouvelle réforme est en cours pour permettre une meilleure adéquation entre la formation dispensée au niveau de l’enseignement supérieur et l’emploi. La réforme de 2003, rappelons-le, consistait à instaurer le modèle Licence-Master-Doctorat (LMD). Au fil des ans, elle a montré ses limites et est actuellement marquée par un essoufflement qui limite la portée de ses objectifs, surtout au niveau des établissements à accès ouvert. Le département de tutelle entend maintenir le système LMD tout en révisant la licence qui devra passer de trois à quatre ans. La nouvelle réforme consistera à introduire une année fondatrice comme première année de la formation supérieure à l’instar de ce qui se passe sous d’autres cieux pour réussir la transition entre les deux cycles.
Le renforcement des compétences linguistiques est un élément clé pendant cette première année. L’enjeu est de pouvoir faire disparaître la fracture linguistique entre le secondaire et le supérieur. Ainsi, des modules de langues étrangères seront dispensés à l’étudiant pendant les deux premières années. L’étudiant ne pourra décrocher sa licence qu’après avoir atteint le niveau B2 en langue étrangère. Le système d’orientation sera revu et renforcé pour prendre en considération les compétences de l’étudiant aussi bien disciplinaires que linguistiques. L’offre de formation sera étoffée pour répondre aux exigences du marché de l’emploi dans les divers secteurs. Des filières adaptées seront créées, permettant à l’étudiant de choisir la passerelle qui lui convient. La mise en place de passerelles est en effet fondamentale pour réussir l’orientation ou la réorientation.
Améliorer la gouvernance
La réforme de la législation régissant l’enseignement supérieur est une exigence de la loi-cadre de l’éducation et de la formation qui insiste sur la diversification des partenariats et la nécessité d’impliquer le secteur privé dans la promotion de l’enseignement et de la recherche scientifique. On s’attend à ce que ce texte mette fin aux changements entamés après chaque formation d’un gouvernement sans prendre en considération la nécessité de continuer la mise en œuvre de la réforme. Sur le plan de la gouvernance, la loi-cadre stipule, entre autres, le renforcement de l’autonomie effective des universités dans un cadre contractuel avec la mise en place d’un mécanisme de suivi, d’évaluation et d’audit périodique. Le texte exige l’encouragement des partenariats régionaux et locaux entre les universités, les établissements d’enseignement supérieur et de recherche scientifique, les AREF, les collectivités territoriales et les instances publiques et privées pour réaliser des programmes et projets communs en vue de renforcer les infrastructures scolaires et universitaires.