Maroc

Enseignement privé : Carence juridique et faiblesse du contrôle !

Faiblesse de l’encadrement juridique, polémiques autour des prix, qualité des services en perdition, le secteur de l’enseignement privé avance en reculant. Il a fait l’objet d’un nouvel avis du Conseil de la concurrence, publié lundi dernier. Un rapport alarmant qui souligne plusieurs maux du secteur, dont l’insuffisance en matière de régulation et de contrôle.

C’est pour délaisser un système éducatif public naufragé que beaucoup de familles marocaines se sont dirigées vers le secteur privé. Il s’agit surtout des classes moyennes et aisées qui optaient pour cette alternative, certes de plus en plus coûteuse, mais qui, globalement, était à la hauteur de leurs attentes. Mais depuis, les choses ont bien changé. Dans un rapport alarmant, le Conseil de la concurrence met en exergue plusieurs insuffisances et lacunes du secteur de l’enseignement privé au Maroc. Mauvaise régulation, faiblesse du contrôle pédagogique et législation inadaptée, le secteur perd de son aura ! Plusieurs des insuffisances, dont pâtit ce système, découlent du cadre juridique et institutionnel. Le Dahir, portant statut fondamental de l’enseignement privé, est jugé obsolète pour régir le fonctionnement des écoles privées. Par ailleurs, l’accès au marché reste facile pour les opérateurs car le législateur n’a pas fixé de conditions particulières. En effet, le secteur est accessible à l’ensemble des investisseurs privés, qu’ils soient marocains ou étrangers, sans spécification du niveau d’éducation ou de qualification dans le domaine, avec la possibilité de se désengager sur la base de garanties offertes par l’État.

«Aussi, l’investisseur dans ce domaine bénéficie de la liberté de choisir le lieu d’implantation de son projet d’investissement, ainsi que les cycles ou branches d’enseignement qui seront dispensés», souligne le Conseil.

Le marché est, également, marqué par la multiplicité des opérateurs, la diversité des services rendus et la fixation des frais de scolarité sur la base de l’offre et de la demande. Or, ces conditions ne sont pas suffisantes pour déterminer la réalité concurrentielle de l’enseignement privé qui est, à la base, un service d’ordre social particulier, dans lequel la dimension humaine constitue un socle.

«La concurrence n’est pas une fin en soi, mais plutôt un moyen pour parvenir à la croissance socio-économique et atteindre les objectifs du système national d’éducation et de formation, étant donné que l’enseignement scolaire privé est un partenaire de son homologue public dans la réussite de la réforme de ce système», souligne le Conseil, présidé par Ahmed Rahhou.

Les frais de scolarité suscitent, par ailleurs, nombre de polémiques. Les professionnels, auditionnés par le Conseil, ont affirmé que lesdits frais oscillent entre 4.000 et 40.000 DH dans les établissements privés. Les prix différent selon la qualité des enseignements prodigués et les ressources mises en œuvre. Ils ont, également, justifié l’écart de ces frais en fonction des régions et des cycles d’enseignement. Le Conseil estime que les frais d’assurances ne doivent pas être facturés. Ce qui est souvent le cas puisque les parents déboursent le montant y afférant alors qu’ils sont censés faire partie du coût du service pédagogique. Ainsi, les établissements scolaires agissent en tant que «prestataires de service d’enseignement» dans un marché où les élèves constituent des «clients-apprenants», et la relation d’échange entre les deux parties est soumise à une logique d’offre et de demande.

Par ailleurs, le rapport souligne l’absence d’une présence forte des associations de parents d’élèves. Il appelle donc les autorités éducatives à veiller à la constitution de ces assemblées au sein des établissements pour qu’elles puissent remplir pleinement leur mission, conformément à leur vocation. Le Conseil, présidé par Rahhou, s’est aussi attaché à démontrer que le secteur souffre d’une faiblesse de la gouvernance, de la multiplicité des intervenants impliqués dans son organisation et le suivi de son fonctionnement, ainsi que de la violation des dispositions législatives le régissant. Ainsi, les mêmes conditions de concurrence ne s’appliquent pas à l’ensemble des opérateurs. Ceci rend difficiles l’évaluation et le contrôle de la qualité des services dispensés. Il a enfin été constaté que l’enseignement privé n’a pas réussi à attirer les élèves du système national dans les proportions ciblées. La structure du marché reste, en conséquence, largement concentrée dans quelques régions, avec une prédominance du cycle primaire.

Tilila El Ghouari / Les Inspirations ÉCO

 


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