Maroc

Conférence régionale de la FAO pour l’Afrique : la sécurité alimentaire cristallise le débat

Le fléau de la sous-alimentation s’est aggravé en Afrique en 2022, touchant plus de 280 millions de personnes, soit 19,7% de la population. Un taux nettement supérieur à la moyenne mondiale, et qui représente une augmentation de 57 millions par rapport à 2019, année d’avant-pandémie.

L’Afrique devrait compter 1,67 milliard d’habitants en 2030, soit près de 20% de la population mondiale. Compte tenu du niveau élevé de l’inflation et du fait que les projections ne tablent que sur un lent redressement des niveaux de revenus, la croissance démographique restera le principal moteur de l’augmentation de la consommation alimentaire sur le continent. Une donne qui exercera davantage de pression sur les filières agricoles puisque la production agricole, halieutique et aquacole de l’Afrique devrait augmenter de 2,1% par an jusqu’en 2030, ce qui reste inférieur à la croissance démographique attendue dans la région.

Par conséquent, la production par habitant devrait continuer à décliner, poursuivant la tendance observée depuis 2015, selon la FAO. Une situation qui engendrera des perturbations importantes des marchés alimentaires, ce qui nécessitera de combler l’écart de productivité de l’agriculture africaine avec une prise de conscience réelle de la fragilité des systèmes de production et d’approvisionnement.

Face à cette situation, les travaux de la 33e session de la Conférence régionale de la FAO pour l’Afrique (ARC33), qui ont démarré jeudi, à Rabat, mettent en lumière l’importance de la résilience des systèmes agroalimentaires en offrant aux pays africains une plateforme de discussion autour des solutions en matière de sécurité alimentaire et d’amélioration de la production agricole.

Pour rappel, le Maroc a été élu pour organiser cette conférence à l’occasion de la 32e session de la Conférence, accueillie par la Guinée Équatoriale, du 11 au 14 avril 2022.

Le coût moyen d’une alimentation saine en Afrique
En chiffres, le coût moyen d’une alimentation saine en Afrique en 2021 s’établissait à 3,57 dollars en PPA (parité de pouvoir d’achat) par habitant et par jour, ce qui était inférieur au coût à l’échelle mondiale, estimé à 3,66 dollars en PPA.

Depuis 2017, le coût de l’alimentation saine dans la région a augmenté régulièrement, avec une hausse notable de 5,6% entre 2020 et 2021, ce qui est supérieur aux 4,3% d’augmentation enregistrés au niveau mondial. À noter que l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique de l’Est sont les sous-régions qui ont connu, depuis 2019, la plus forte augmentation cumulée des coûts (10,3 et 9,6% respectivement), suivies par l’Afrique australe (9,3%) et l’Afrique centrale (7,6%).

À l’inverse, l’Afrique du Nord a enregistré une baisse de 3,4%  du coût de l’alimentation saine au cours de ces deux années. Ces chiffres ont remis sur le devant de la scène la priorité de l’importance des systèmes agroalimentaires et la question de la souveraineté alimentaire. L’autre aspect qui marque cette conférence est la mise en lumière du Cadre stratégique de la FAO 2022-2031 pour une meilleure production et nutrition pour les 54 membres de la Conférence régionale en Afrique.

Au niveau mondial, la faim est restée relativement stable entre 2021 et 2022, touchant environ 9,2% de la population mondiale, c’est-à-dire entre 691 et 783 millions de personnes. Cependant, la sous-alimentation en Afrique a continué d’augmenter en 2022, touchant plus de 280 millions de personnes, soit 19,7% de la population, un taux nettement supérieur à la moyenne mondiale, ce qui représente une augmentation de 57 millions par rapport à 2019, année d’avant-pandémie.

Nourriture adéquate : 61% de la population africaine
La FAO estime que 29,6% de la population mondiale, soit 2,4 milliards de personnes, n’avaient pas accès en 2022 à une nourriture adéquate, dont 868 millions de personnes environ en Afrique (61% de la population du continent) alors que les systèmes de production alimentaire restent vulnérables aux risques liés aux phénomènes météorologiques extrêmes, à la montée des tensions géopolitiques et aux changements de politique. Ce qui pourrait rompre l’équilibre fragile entre l’offre et la demande et venir obscurcir les perspectives en matière de sécurité alimentaire mondiale.

Actuellement, le déficit commercial régional en Afrique, pour les principaux produits alimentaires, devrait se creuser au cours de la prochaine décennie alors que les besoins en importations augmenteront plus rapidement que l’offre à l’export. Le creusement du déficit devrait s’accélérer par rapport à la dernière décennie, et les déficits alimentaires tenaces devraient être encore amplifiés par le gonflement, dû à l’inflation, de la facture des importations alimentaires et de la dette nationale.

Yassine Saber / Les Inspirations ÉCO



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