Les Cahiers des ÉCO

Gibraltar World Music Festival : Interdire la musique, c’est priver les gens d’oxygène

Dans «They will have to kill us first» et «Mali Blues», les deux documentaires diffusés lors de l’inauguration du Festival World Music de Gibraltar ce mercredi 6 juin, Johanna Schwartz et Lutz Gregor racontent l’histoire de musiciens maliens privés de faire de la musique dans leur pays après le coup d’État de 2012. Est-il possible d’interdire la musique ? La réponse est non. 

La musique assimilée à Satan là où la musique est riche, belle et où elle est un moyen d’exister, de coexister. C’est ce qui s’est passé au Mali en 2012 lorsque le Nord du pays a été assailli par un coup d’État Islamiste qui a contraint tout le monde à changer de vie.

Lors de la première journée du World Music Festival de Gibraltar, deux documentaires sont allés dans les coulisses de l’enfer que vivent ces musiciens, au quotidien. «En matière de politique, on n’a rien compris, mais musicalement, je pense qu’on a compris quelque chose», lance la musicienne Fatoumata Diawara, contrainte à l’exil ainsi qu’Ahmed Ag Kaedi qui résume ainsi la situation. «Mali Blues» de l’Allemand Lutz Gregor raconte le vécu et le regard de ces musiciens, qui ont vu du jour au lendemain la musique interdite après que les islamistes aient pris le contrôle du nord du Mali. Même combat pour Galedon Systeme et sa chanson «Explique moi ton Islam !» ainsi que pour Bassekou Kouyaté qui chante de générations en générations et qui a contesté cette décision «qui est tout sauf liée à l’Islam». «Ils disent que la musique est hram, mais ils n’ont rien compris. C’est à nous, musiciens de leur expliquer cela», conteste une Fatoumata Diawara révoltée qui, par dessus tout, ajoute à cette interdiction son statut de femme en Afrique:  «à 19 ans, j’ai du fuir mon pays, quitter ma maison pour faire de la musique.

Pour une femme, ici, le seul avenir, c’est le mariage. Et moi, je voulais écrire des chansons». Un voyage à les travers les images époustouflantes de Bamako  et Tombouctou, des paysages à couper le souffle et de la musique à en nourrir l’âme, lesquels lèvent le voile sur la richesse de la scène musicale malienne, la où le blues est né. «Interdire la musique, c’est priver les gens d’oxygène», continue la chanteuse Disco, dans le documentaire «They’ll have to kill us first» où Johanna Schwartz, Kheira, Disco, Moussa et Songhoy Blues dans leur combat de vie : chanter malgré tout, même au risque de perdre la vie. Les Songhoy Blues ont une renommée internationale aujourd’hui mais leur biographie relève du thriller. Appartenant au peuple songhaï du nord du Mali, Aliou, Garba, Oumar et Nathanael jouaient ensemble entre Tombouctou, Diré et Gao, mais sans projeter de fonder un groupe.

En 2012, leur vie est bouleversée quand le nord du Mali tombe sous la coupe de mercenaires islamistes qui interdisent toute activité musicale. Les quatre musiciens abandonnent tout et partent, chacun de leur côté, pour la capitale Bamako. Le groupe est né. Devenus réfugiés, voire exilés, leurs chansons deviennent contestataires et sont le reflet de leur nouvelle vie. Mélange de rock electro sur fond de musique traditionnelle, la musique de Songhoy Blues est à la fois fédératrice et nostalgique. Quant aux deux chanteuses Kheira, et Disco, deux grandes voix qui sont habitées par la musique  ont aussi choisi de vivre de leur passion envers et contre tous. Obligées de quitter leur pays, elles décident d’organiser un concert gratuit à Tombouctou quelques jours après que les mercenaires aient été chassés, malgré le danger qui persistait encore. Ces deux documentaires plein de messages forts, qui sont d’actualité et qui prouvent que la musique a le pouvoir de rassembler et de donner espoir en la vie, est une belle tombée de rideau pour le World Music Festival de Gibraltar. Une façon de faire tomber les préjugés sur l’islam, trop souvent assimilés au terrorisme avec un exemple de concert de musiciens musulmans qui se battent contre les idées extrémistes grâce à la musique… 


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