Les Cahiers des ÉCO

Efficacité énergétique/bâtiment : Le protocole BIM, une menace pour Binayate ?

Tous les aspects liés au dimensionnement d’un bâtiment peuvent y être configurés avec brio et en un temps record. Cela va de la structure aux fluides, en passant par l’étanchéité, l’électricité ou l’isolation thermique. Le protocole BIM est tellement bien fait que certains parlent déjà de la mort de Binayate, le logiciel délivré par l’AMEE.

La suite du protocole BIM -Building Information Modeling- n’a plus de secret pour les participants au séminaire de Cype et du Cluster EMC, tenu la semaine dernière à Casablanca ! En effet, pendant 48 heures, précisément les 31 mars et 1er avril, plusieurs architectes et ingénieurs de bureaux d’études actifs dans le bâtiment ont eu droit à une présentation très détaillée de la trouvaille de l’espagnol Cype, dévoilée pour la première fois au Maroc lors de la dernière édition du SIB (Salon Internationale du Bâtiment) et par ailleurs très usitée dans les quatre coins du monde. Très complet, cet outil technologique de travail collaboratif n’a pratiquement rien oublié. Tous les aspects liés au dimensionnement d’un bâtiment peuvent y être configurés avec brio et en un temps record. Cela va de la structure aux fluides, en passant par l’étanchéité, l’électricité, la menuiserie, l’acoustique, l’isolation thermique, l’efficacité énergétique…Bref, le protocole BIM est tellement bien fait, y compris dans le dimensionnement des matériaux pour construire un bâtiment répondant au RTBM (Règlement thermique des bâtiments au Maroc), que certains participants parlent déjà de la mort de Binayate, le logiciel délivré par l’AMEE (Agence marocaine de l’efficacité énergétique), à cause notamment de certaines de ses données erronées qui faussent tout calcul de dimensionnement. Ceci étant, on n’en est pas encore là ! Avec quelques petits réglages, Binayate, qui est un logiciel gracieusement mis à la disposition des professionnels de l’acte de bâtir pour leur faciliter l’application du RTBM, peut encore avoir de beaux jours devant lui ! Tandis que le protocole Open BIM a un coût non négligeable. Pour vous donner une idée, le prix de la suite BIM, qui est composée de cinq licences de logiciels, avoisine le million DH. Autrement dit, il faut débourser un prix moyen de 200.000 DH pour se payer une licence. Malgré tout, cela ne semble pas faire reculer certains avisés.

Au Maroc, c’est, entre autres, le cas de Jean Falaise, le gérant du bureau d’études en ingénierie de la construction Asting Invest, présent sur le territoire national depuis 2011. Falaise n’en démord pas, pour lui BIM est un excellent investissement en raison de ses multiples avantages (voir entretien). À l’étranger, comme nous l’avons signalé plus haut, dans certains pays les pouvoirs publics imposent aux entreprises, qui veulent soumissionner aux marchés de l’État, de travailler sur le protocole BIM. C’est un impératif catégorique par exemple en Finlande, au Danemark et aux Pays-Bas depuis 2007. Aux États-Unis également, où 82% des architectes l’utilisent, le United States General Services Administration l’a rendu obligatoire dans ses marchés en 2007. En Norvège, c’est obligatoire depuis 2010, à Hong Kong depuis 2014 et au Chili depuis 2016. Au Royaume-Uni (Angleterre, Ecosse, Irlande, Pays de Galles), 58% des architectes l’utilisent depuis 2011 et c’est obligatoire depuis l’année dernière, tous les marchés publics supérieurs à 5 millions de livres sterling doivent passer par BIM. À Singapour, 80% des marchés publics ont été exécutés via BIM en 2015 et 100% en 2016. Tandis qu’en Allemagne, en attendant que ses professionnels du bâtiment se familiarisent avec l’outil, le protocole sera imposé en 2020.

En France, 25% des architectes utilisent BIM et 43% des projets y recourent grâce à une incitation des pouvoirs publics. Selon Jacques Martin, directeur délégué du Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), qui était invité à présenter l’expérience française par rapport à BIM «dans l’Hexagone, la prise de conscience sur l’apport du protocole BIM s’est exacerbée avec l’organisation de la COP21. C’est à ce moment là que l’on s’est rendu compte que le bâtiment, qui représente 6% du PIB, regroupe 525.000 entreprises et emploie un million de salariés, peut être un important levier de croissance verte». C’est à peu près le même schéma qu’au Maroc qui vient également d’organiser la COP22 et s’est résolument engagé dans la transition énergétique pour baisser son empreinte carbone. En effet, contrairement aux idées reçues, la consommation énergétique et l’empreinte carbone des bâtiments sont beaucoup plus importantes que celles des transports. En France, les bâtiments consomment 45% de l’énergie produite et émettent 40% des Gaz à Effet de Serre (GES), contre 32% de consommation et 25% d’émissions du secteur des transports.

La situation est analogue à celle que l’on retrouve au Maroc. Partant, il est donc urgent d’engager toute initiative pour faire reculer l’impact du réchauffement climatique causé par les bâtiments. «Un objectif auquel contribue le protocole BIM qui digitalise les usages en mettant en réseau des informations, des objets et des acteurs», est-il expliqué. BIM est une approche globale pour une meilleure collaboration entre les architectes, maîtres d’ouvrages, bureaux d’études, entreprises, exploitants et industriels lors de la conception, de l’exécution et de la maintenance des bâtiments, basée sur des formats standards et des flux de travail ouverts. Sa technologie permet de créer un flux de travail collaboratif pluridisciplinaire et multi-utilisateur autour d’un même projet d’une manière ouverte cordonnée et simultanée entre les différents acteurs dans la conception et l’optimisation technique de l’enveloppe, de la structure et des équipements des bâtiments. Toutefois, pour commencer la conception d’un projet dans un environnement BIM, il est nécessaire de partir d’un modèle 3D architectural du projet au format IFC qui peut être généré à partir de n’importe quel logiciel de modélisation existant sur le marché. Parmi ceux-ci, il y a notamment le logiciel gratuit de modélisation IFC Builder de Cype. Une fois la connexion établie entre le modèle architectural et les modèles de calculs, tous les intervenants du projet travaillent avec la même information, ce qui permet ainsi d’éviter les ressaisies du projet et les possibles incohérences qui en découleraient. Bien entendu, tous les logiciels métiers sont totalement autonomes et découplés l’un de l’autre. Cette caractéristique du flux de travail est essentielle, notamment pour fixer les responsabilités de chacun, un technicien d’une application particulière ne pouvant pas modifier le travail réalisé dans une discipline autre que la sienne.

En effet, l’une des principales problématiques d’un projet est d’intégrer les évolutions apportées au projet de départ. Et dans ce cadre, il ne s’agit pas simplement d’importer le modèle BIM modifié, car un nouvel import impliquerait de recommencer complètement toute l’étude technique à chaque fois qu’un changement a lieu sur le modèle initial. Pour faire face à ces ajouts, modifications ou suppressions d’éléments dans le projet, les logiciels disposent d’une fonctionnalité clé qui constitue un élément différenciateur de la technologie BIM. En effet, les logiciels de Cype permettent l’actualisation unidirectionnelle du modèle BIM sous la supervision de l’utilisateur. Cette opération est rendue possible par le maintien des GUID (Globally Unique Identifier -identificateur global unique) de chacun des éléments de la maquette fournie.  


Travail collaboratif et HQE

Le travail collaboratif est très encouragé par les certificateurs HQE (Haute qualité environnementale). En effet, il montre qu’un groupe de professionnels de l’acte de bâtir travaille selon les mêmes standards, notamment en respectant des normes d’application obligatoire ou non qui assurent un certain niveau de qualité à leurs ouvrages. Du coup, son signalement dans une demande de certification HQE est très apprécié puisqu’il permet au certificateur de faire l’économie de diagnostiquer certains critères déjà respectés par le demandeur. Rappelons que la HQE est une démarche qualité qui vise à limiter à court et à long terme les impacts environnementaux d’une opération de construction ou de réhabilitation, tout en assurant aux occupants des conditions de vie saine et confortable.


Jean Falaise
Gérant d’Asting Invest

Les Inspirations ÉCO : Que pensez-vous du protocole technologique BIM ?
Jean Falaise : C’est un excellent outil de travail qui nous a tout de suite séduit lors de sa présentation par Cype au Salon International du Bâtiment. Bien sûr, nous avons investi sur toute la suite qui comprend cinq métiers différents et depuis cinq mois nos ingénieurs sont en train progressivement de se familiariser avec l’outil.

Combien cela vous a coûté ?  
Ecoutez, je préfère ne pas parler de coût mais plutôt de retombées attendues à travers cet investissement pour lequel il nous a également fallu recruter des compétences pour les former. En raison des multiples avantages qu’offre le protocole BIM, je suis persuadé que notre investissement sera rapidement rentabilisé.

Comment ?
Grâce à cet outil, nous allons pouvoir aller  plus vite que d’habitude pour satisfaire nos clients. Une fois que le maître d’ouvrage ou l’architecte nous aura fourni son plan de base, nous pourrons en un temps record faire les modélisations de tout le bâtiment notamment en lui fournissant toutes les maquettes détaillées sur la structure, l’électricité, les fluides etc…Ce qui lui permettra de faire baisser considérablement ses délais de construction et d’édification de son bâtiment.    l


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