Sécurité du travail au Maroc : à quand la nouvelle loi ?
En attente depuis plus de quatre ans, le nouveau cadre relatif à la sécurité et la santé dans les lieux de travail devra faire l’objet d’une étude préalable d’impact, en vue de mesurer l’apport de la loi sur le renforcement des garanties de sécurité pour les fonctionnaires et les salariés des secteurs public et privé.
Si la crise sanitaire a plus que jamais démontré l’urgence de la mise en place d’une vision intégrée qui protège les travailleurs contre tous les risques liés à l’exercice de leurs métiers, il est temps de mettre fin à l’attentisme qui prévaut pour ce volet crucial de la législation du travail. Or la finalisation de la loi sur la santé et la sécurité au travail aussi bien dans le publics et le privé traîne. Les coûts sociaux dus à l’absence d’un programme santé et sécurité du travail au Maroc restent méconnus, de même que les règles régissant la santé et la sécurité du travail sont plutôt orientées principalement vers le secteur privé, alors que l’administration publique n’a pas connu une approche globale visant la protection des fonctionnaires contre les risques professionnels.
Dans le même registre, les risques encourus par les employés, aussi bien du secteur privé que de l’administration publique, peuvent se traduire par le nombre croissant d’accidents de travail et le développement de maladies professionnelles spécifiques. Une étude d’impact des mesures, qui seront insérées dans la version finale de la loi projetée, sera finalisée en vue de définir une stratégie nationale préventive articulée autour des normes de travail décent. L’étude d’impact devra ressortir les axes de l’unification de la politique préventive, ainsi que la mise en œuvre des mesures proposées par la commission interministérielle mise en place. A souligner que des plans d’évaluation des risques à l’échelle sectorielle et régionale seront aussi instaurés, dans l’objectif de permettre aux employeurs de bénéficier de services de formation et d’assistance en matière de sécurité au travail.
Un projet de stratégie nationale
La crise sanitaire impose d’accélérer les délais de finalisation de la nouvelle loi, avant de lancer le processus de finalisation d’une stratégie nationale, qui devra marquer «une rupture grâce à une approche faisant prévaloir la réparation et développer l’accompagnement des travailleurs et des entreprises», indique la feuille de route. «La qualité de vie au travail devra être un objet stratégique ainsi que simplifier les normes, pour une plus grande efficience des règles de prévention». Une liste de priorités de certains risques sera aussi établie, sans oublier « la mise en perspective des données de santé au travail, afin d’assurer une gouvernance partagée et opérationnelle de la santé au travail», selon les mesures projetées. Parmi les priorités durant cette étape figurent l’anticipation des risques émergents ainsi que la prise en compte des risques organisationnels, notamment l’usure professionnelle et les risques psychosociaux. Des objectifs resserrés ont été fixés pour les partenaires sociaux et qui couvrent les conventions collectives, l’élaboration de recommandations sectorielles, mais aussi des actions ciblées auprès des PME et TPE.
Une nouvelle typologie des risques
Les catégories de risques ont été répertoriées, à travers une nouvelle classification qui englobe ceux physiques et chimiques, ainsi que les dangers inhérents aux risques d’accidents. L’État compte également procéder à la création de services sanitaires au sein des délégations régionales du travail, de même que l’élaboration d’un cadre unifié qui sera appliqué à l’ensemble des métiers recensés, et qui devra tenir compte de la liste déjà arrêtée des métiers dangereux. La liste actuelle englobe les travaux durant la nuit, ceux dans les hauteurs non sécurisés, le port des charges lourdes, les travaux présentant un danger manifeste et enfin ceux portant atteinte aux bonnes mœurs. De leur côté, les représentants des salariés ont demandé dans leur contribution à la préparation de la stratégie à l’implantation des services médicaux dans les entreprises industrielles, agricoles et forestières. Un même modèle de couverture est aussi demandé pour les artisans, et pour d’autres catégories avec des modules de formation des salariés au secourisme au sein des ateliers des travaux dangereux. Enfin, l’amélioration des conditions d’intervention sur le terrain des inspecteurs du travail ainsi que l’incitation des unités industrielles et agricoles à respecter les droits élémentaires des salariés ont été également citées comme étant parmi les objectifs à atteindre à très court terme.
Younes Bennajah / Les Inspirations ÉCO