Politique

Parlement : la session de la dernière chance

En matière de suivi des engagements du gouvernement, les résultats ne sont pas encore à la hauteur des aspirations, selon des sources proches du dossier.

Dans dix jours, s’ouvrira la session parlementaire printanière, la dernière de l’actuelle législature. Beaucoup de défis restent, néanmoins, à relever. En effet, si les deux Chambres du Parlement ont pu passer, jusque-là, quelque 284 textes, il n’en demeure pas moins que des projets et propositions de lois stratégiques demeurent encore bloqués dans les tiroirs des commissions. Il reste, ainsi, une seule session pour rapprocher les points de vues autour de ces textes en vue de les faire passer à quelques mois de la tenue des élections. On peut notamment citer le fameux exemple du projet de loi amendant et complétant le Code pénal qui peine à franchir le cap de la Commission de la justice et de la législation à la Chambre des représentants en raison des désaccords entre les composantes gouvernementales sur certaines dispositions. Les députés renvoient la balle au gouvernement afin de trancher ce dossier et relancer le processus législatif de ce texte très attendu depuis plus de quatre ans. Il s’agit, aussi, du projet de loi portant Code de la mutualité qui est au point mort à la Chambre des conseillers depuis 2016 alors qu’il est temps de le déterrer en vue d’accompagner le chantier de la réforme de la protection sociale.

Contactés par Les Inspirations ÉCO, plusieurs parlementaires estiment que ce texte aurait dû être réexaminé par la Chambre haute en deuxième lecture après son adoption en 2016 par les députés. Quant au projet de loi organique sur le droit de grève, tout porte à croire qu’il ne passera pas au cours de ce mandat gouvernemental. Le gouvernement n’a, en effet, pas discuté de ce dossier avec les partenaires sociaux qui rejettent plusieurs dispositions de ce texte qui a été adopté par le gouvernement de Benkirane en 2016.

Selon une source proche du dossier, il s’avère difficile de sortir ce texte des tiroirs, à l’approche des élections. S’agissant des propositions de loi, le topo n’est guère plus reluisant. Plus de 200 initiatives législatives des parlementaires ne parviennent pas à entamer le circuit législatif, à cause de leur rejet par le gouvernement. Et ce n’est pas au cours des quatre derniers mois de la vie de cette législature que les choses risquent de changer, de l’avis de nombre de parlementaires. Ceux-ci estiment qu’il faut, à cet égard, lister les priorités en vue de faire passer les propositions de loi les plus importantes dont celles ayant trait à la réforme du Code de la famille qui recueillent plus ou moins l’unanimité au sein des composantes du Parlement. La concrétisation de cet objectif reste tributaire de la volonté de l’ensemble des groupes parlementaires, mais aussi du gouvernement.

Sur le plan du contrôle du gouvernement, les conclusions de plusieurs missions exploratoires sont très attendues. A leur tête, figurent celles qui ont porté sur le secteur de la santé (marchés publics lancés par le ministère de tutelle pour faire face aux répercussions de la pandémie, la Direction du médicament, le système de santé, la situation des hôpitaux). D’autres dossiers seront passés au crible, comme le secteur des établissements de crédits et organismes assimilés, la situation de l’OFPPT et celle de l’ONEE. On s’attend, par ailleurs, à ce que cette session soit on ne peut plus animée tant au sein des commissions permanentes qu’en séances plénières. Ce n’est pas uniquement l’opposition qui tirera à boulets rouges sur le gouvernement, les parlementaires de la majorité ne ménageront aucun effort, de leur côté, pour se positionner auprès des électeurs en cette fin de législature. Les surenchères politiciennes risquent de prendre le pas sur le fond des débats, comme le démontre l’expérience.

Des projets de réforme en suspens
Les deux Chambres du Parlement n’ont pas pu, jusque-là, lancer nombre de réformes déjà annoncées pour améliorer le rendement parlementaire. Plusieurs projets étaient en vue par la Chambre des représentants dont le bureau a affiché, à plusieurs reprises, sa détermination à redresser les dysfonctionnements qui minent l’action parlementaire. Toutefois, il faut dire que sans l’adhésion de toutes les parties, les réformes escomptées sont restées lettres mortes, comme l’amendement du déroulement des séances plénières des questions orales. Parfois, il s’avère difficile non pas d’asseoir de nouvelles réformes mais d’appliquer les dispositions du règlement intérieur. À titre d’exemple, pendant de longues années, il a été impossible d’activer les dispositions ayant trait à l’absence des parlementaires. La Chambre basse est, enfin, parvenue à les faire appliquer tant bien que mal au cours de cette législature. La Chambre haute ne lui a pas emboîté le pas même si elle souffre du fléau de l’absentéisme qui a été récemment camouflé par les mesures de précautions sanitaires à cause de la crise de la Covid-19. En matière de suivi des engagements du gouvernement, outil indispensable pour lier la responsabilité à la reddition des comptes, les résultats ne sont pas encore à la hauteur des aspirations, selon des sources internes. Ce mécanisme est fortement lié à celui du suivi de l’effectivité de l’application des lois et réglementations. Un tiers des lois votées par le parlement et publiées au Bulletin officiel ne sont pas assortis de décrets d’application. Cependant, les parlementaires n’ont pas d’outils pour corriger ce dysfonctionnement. C’est pourquoi nombreux sont ceux qui préconisent la mise en place de mécanismes institutionnels et procéduraux pour permettre aux députés d’assurer le suivi de l’application des lois qu’ils ont votées. 

Jihane Gattioui / Les Inspirations Éco



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