Élections syndicales. Les urgences des centrales pour le prochain mandat
Les syndicats les plus représentatifs, qui pourront siéger au sein de la Chambre des conseillers durant le prochain mandat, devront finaliser une feuille de route conjointe pour relancer le dialogue social et aboutir à une formule consensuelle autour du projet de loi 24-19, relatif au statut des syndicats.
La prochaine carte syndicale différera de celle ayant prévalu lors du mandat précédent, de même que la stratégie d’action des centrales syndicales, au sein de la 2e instance législative, devra s’adapter aux nouvelles orientations qui se sont dégagées des élections professionnelles.
En effet, les scores obtenus, lors des élections de juin dernier, dénotent de la poursuite du creusement de la crise de représentativité des syndicats puisque plus de 50% des représentants des salariés ne sont affiliés à aucune centrale syndicale.
Si l’Union nationale du travail au Maroc (UNTM) n’a pas pu réaliser le seuil de 6% exigé, elle aura réussi malgré tout, avec l’Union marocaine du travail (UMT) et l’union générale des travailleurs au Maroc (UGTM) à conserver sa place, les scores respectifs réalisés s’établissant à 15,4% et 12,5%, la CDT, quant à elle, ayant pu franchir le seuil requis, avec un score de 7,2%.
Il faut préciser que seules trois centrales, celles qui dépassent la barre des 6% de délégués, disposent, actuellement, du droit de participer aux prochains rounds du dialogue social.
Par ailleurs, ces centrales auront le droit de participer aux différentes réunions tripartites régionales et mondiales ainsi qu’aux comités consultatifs prévus par le Code du travail.
La nouvelle carte syndicale, au sein de la Chambre des conseillers, sera ainsi formée du collège électoral qui sera appelé à élire les 20 représentants des salariés au sein de la 2e instance législative.
Dans son dernier verdict rendu en vue de valider les révision apportées à la loi organique de la Chambre des conseillers, la Cour constitutionnelle a indiqué que la Chambre des conseillers devra, de ce fait, préparer une révision des normes de fonctionnement internes, après l’adoption de la nouvelle loi organique, notamment les mesures portant sur la mise en place des régimes électoraux différenciés pour chaque instance élue au sein de la Chambre des conseillers, «en tenant compte de sa spécificité et en garantissant sa représentativité».
Une disposition particulière a été aussi validée. Il s’agit de l’interdiction du changement de groupe, pour les élus des organisations professionnelles.
La cour a estimé, dans ce sens, que cette mesure sera de nature à «permettre aux représentants des employeurs de défendre leurs droits et les intérêts sociaux et économiques des catégories qu’elles représentent».
Une feuille de route conjointe
La domination des «sans appartenance syndicale», parmi les nouveaux représentants des salariés, impose aux trois centrales, qui sont légalement représentatives, de préparer une feuille de route conjointe pour la rentrée sociale et de former un bloc uni au sein de la 2e chambre.
La sortie du bras syndical du PJD de la liste des centrales, qui ont le droit de participer au dialogue social, demeure aussi un facteur qui plaide pour un rapprochement des points de vue de l’UMT, de l’UGTM et de la CDT qui avaient déjà formé un bloc commun, au sein de la 2e chambre, durant le mandat précédant.
Bloc bâti, essentiellement, autour des priorités du dialogue social et de la contribution à la finalisation de la nouvelle loi sur les syndicats.
A souligner que le projet de loi 24-19 est toujours en stand by en raison de la discordance des points de vue entre le gouvernement et les trois centrales les plus représentatives sur une série de dispositions, jugées, par ces dernières, comme étant en contradiction avec l’esprit de la constitution.
A noter que le chantier de la couverture sociale occupe, également, une place centrale dans le plan d’action des futurs représentants syndicaux au sein de la seconde chambre. Il en va ainsi du volet légal et réglementaire visant l’intégration des activités informelles qui privent une large frange des salariés de leurs droits sociaux de base.
La représentativité des femmes s’améliore
L’un des principaux faits marquants reste, sans aucun doute, le nombre de déléguées femmes qui a grimpé de 5.349 en 2015 à 9.444 en 2021 dans le secteur privé, soit une augmentation de 76,5%, représentant le quart des délégués.
Sur un autre registre, l’UMT a réalisé des performances inégalées, jusqu’à présent, dans l’histoire de sa participation aux élections syndicales, en dépit de la forte percée de l’UGTM.
Ainsi, des scores impressionnants, allant jusqu’à 100% des sièges, ont été réalisés dans plusieurs secteurs stratégiques, comme l’automobile, l’aéronautique, les ports, les autoroutes et les banques.
Le syndicat historique a pu aussi améliorer sa présence au sein du secteur public avec plus de 18,2% de délégués dans l’administration publique, 30% dans les collectivités territoriales et 53% dans les établissements publics.
Enfin, la base électorale, pour les futurs sièges au sein de la 2e chambre, sera formée de 47.573 délégués élus, à la fois dans le secteur public et le secteur privé, soit une hausse de l’ordre de 36% par rapport au mandat écoulé, et dont 81% revient au secteur privé.
Younes Bennajah / Les Inspirations ÉCO