Russie : la chambre haute du Parlement approuve la sortie du traité interdisant les essais nucléaires
Le Conseil de la Fédération, la chambre haute du Parlement russe, a approuvé mercredi la loi sur la révocation de la ratification du Traité d’interdiction des essais nucléaires (TICEN), sur fond de conflit en Ukraine et de crise avec les Occidentaux.
Les sénateurs russes ont adopté la loi à l’unanimité par 156 voix, ouvrant ainsi la voie à sa signature par Vladimir Poutine, qui ne fait guère de doute, le président russe étant à l’origine de cette initiative. Cette loi «vise à rétablir la parité dans le domaine du contrôle des armes nucléaires», a souligné un communiqué publié sur le site du Conseil de la Fédération peu avant le vote. La Douma d’État, la chambre basse du Parlement russe, avait adopté la loi la semaine dernière, son président Viatcheslav Volodine prônant une «réponse à une attitude odieuse des États-Unis envers leurs obligations sur le maintien de la sécurité globale».
Réciprocité
Début octobre, le président russe avait, lui, annoncé que son pays pourrait révoquer la ratification du TICEN en réponse aux États-Unis qui ne l’ont jamais ratifié. «Je ne suis pas prêt à dire si nous devons ou pas reprendre les essais», avait-il ajouté, tout en vantant le développement de nouveaux missiles surpuissants pouvant transporter des ogives nucléaires.
Par ailleurs, Moscou a indiqué mercredi qu’elle ne parlerait de contrôle des armes nucléaires avec les Américains que lorsque les États-Unis cesseront d’être hostiles à l’égard de Moscou. «Nous pensons que sans changement dans l’attitude profondément et fondamentalement hostile des États-Unis à l’égard de la Russie, il est tout simplement impossible de reprendre le dialogue sur la stabilité stratégique, y compris sur New Start», a dit, aux médias russes, le vice-ministre des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov.
Selon lui, Washington a proposé la reprise du dialogue sur ces questions, souhaitant «dissocier» ces discussions «de tout ce qui se passe», semblant faire référence aux nombreux conflits opposant les deux pays, en particulier l’Ukraine, que les Américains soutiennent dans la guerre contre Moscou. «Nous répondrons aux Américains au moment opportun. Sous quelle forme ? Il est encore trop tôt pour le dire», a ajouté le vice-ministre. Les États-Unis s’étaient, de leur côté, dit prêts en juin dernier à respecter les limitations du nombre d’ogives nucléaires fixées par l’accord de non-prolifération New Start «tant que la Russie fera de même». La Russie avait suspendu quelques mois plus tôt, en février, sa participation à ce traité bilatéral, le dernier sur le contrôle des armements nucléaires liant les deux pays. Ce dernier expire en 2026, et son avenir est plus qu’incertain. La Russie, héritière de la puissance nucléaire soviétique, et les États-Unis détiennent à eux deux près de 90 % de toutes les armes nucléaires existantes dans le monde.
Lettre morte
Depuis le début du conflit en Ukraine en février 2022, le président russe a soufflé le chaud et le froid quant au recours à l’arme nucléaire, déployant durant l’été 2023 des armes nucléaires tactiques au Bélarus, son plus proche allié. En février, la Russie avait aussi suspendu sa participation au traité de désarmement nucléaire New Start signé avec les États-Unis en 2010, le dernier accord bilatéral liant Russes et Américains. Le Traité d’interdiction complète des essais nucléaires, lui, a été ouvert à la signature en 1996, mais il n’est jamais entré en vigueur car il n’a pas été ratifié – étape nécessaire pour son entrée en vigueur – par un nombre suffisant d’Etats, parmi les 44 pays qui détenaient des installations nucléaires au moment de sa création. La Russie, la France et le Royaume-Uni l’ont fait pour le TICEN, mais ce n’est pas le cas de cinq États l’ayant signé : les États-Unis, la Chine, l’Iran, l’Égypte et Israël.
Sami Nemli avec agences / Les Inspirations ÉCO