Présidence de la BAD : le Mauritanien Sidi Ould Tah succède à Akinwumi Adesina

L’ancien ministre mauritanien de l’Économie, Sidi Ould Tah, a été élu jeudi président de la Banque africaine de développement (BAD). Il va succéder au Nigérian Akinwumi Adesina à la tête de cette institution qui doit faire face au désengagement financier des États-Unis.
Il n’aura fallu que trois tours de scrutin pour que Sidi Ould Tah l’emporte, avec 76,18% des voix, devançant largement son rival zambien Samuel Munzele Maimbo, qui a recueilli 20,26%.
Le Sénégalais Amadou Hott termine troisième avec 3,55% des voix. Fondée en 1964, la BAD, qui compte 81 pays membres, dont 54 africains, est l’une des grandes banques multilatérales de développement. Ses ressources proviennent notamment des souscriptions des pays membres, des emprunts effectués sur les marchés internationaux, ainsi que des remboursements et revenus des prêts.
Pour remporter l’élection, il fallait obtenir une double majorité : celle des votes de tous les pays membres, mais aussi celle des pays africains. Et sur ce terrain, Ould Tah a obtenu un score fleuve avec 72,37% des suffrages africains.
Une victoire stratégique dans un contexte tendu
«Je veux féliciter le Dr Sidi Ould Tah pour son élection réussie (…) Je suis entré dans cette course mû par l’amour pour notre continent et pour offrir une vision pour le futur de l’Afrique. Aujourd’hui, les gouverneurs ont choisi le leader qui, selon eux, va donner la vision de l’Afrique que nous voulons à ce moment décisif», a déclaré Maimbo dans un communiqué.
Le nouveau président de l’institution va être immédiatement confronté à un environnement économique international chamboulé, notamment par les annonces de l’administration Trump. Outre les droits de douane, certaines décisions affectent directement la BAD, puisque les États-Unis veulent supprimer leur contribution d’un demi-milliard de dollars au fonds de la banque destiné aux pays à faible revenu du continent. Cinq candidats étaient en lice pour l’élection de jeudi, dans la capitale économique ivoirienne, où se trouve le siège de l’institution.
Au fil des tours de vote, Ould Tah a rallié les voix de nombreux pays, dans ce scrutin où le poids de chaque État actionnaire est pondéré par la hauteur de sa participation au capital de la banque. Les cinq plus gros contributeurs africains — le Nigéria, l’Égypte, l’Algérie, l’Afrique du Sud et le Maroc — étaient particulièrement courtisés, tout comme les États-Unis et le Japon, plus gros contributeurs non régionaux.
Une trajectoire internationale pour renforcer l’Afrique
À la tête de ce prestigieux poste d’une institution qui s’est imposée au niveau international, Ould Tah devrait mettre à profit ses dix années passées à la tête d’une autre institution multilatérale, la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA). Il devrait toutefois rester dans la continuité des «High 5», les cinq priorités établies par le président sortant : éclairer, nourrir, industrialiser, intégrer et améliorer la qualité de vie des populations.
«Je suis fier de l’héritage que je laisse derrière moi. Nous avons construit une institution financière de classe mondiale qui va continuer à faire progresser la position de l’Afrique dans un environnement international qui évolue rapidement», a déclaré Akinwumi Adesina, le président sortant, mardi, précisant que 565 millions de personnes en Afrique ont bénéficié de projets de la BAD ces dix dernières années.
La banque a, par exemple, aidé à la construction de la plus grande station d’épuration d’Afrique, à Gabal el Asfar en Égypte, contribué à la réalisation d’un pont entre le Sénégal et la Gambie, à l’extension du port de Lomé au Togo, ou encore à des projets d’assainissement au Lesotho et d’accès à l’électricité au Kenya. Pendant les dix ans de gouvernance de l’homme au nœud papillon, le capital souscrit de l’institution a par ailleurs triplé, passant de 93 à 318 milliards de dollars.
Sami Nemli / Les Inspirations ÉCO