Paiement mobile. Les opérateurs sont-ils prêts?
“Les premières opérations interopérées sont maintenant techniquement possibles”
Bank Al-Maghrib vient de rendre publique sa décision réglementaire relative au paiement mobile domestique, le m-wallet. Tout semble prêt mais l’activité n’arrive pas à décoller. Asmaa Bennani, responsable de la Surveillance des systèmes et moyens de paiement et inclusion financière à Bank Al-Maghrib, nous explique les raisons du retard et l’évolution du chantier.
Tout semble prêt pour l’émergence du paiement mobile (réglementation, switch/interopérabilité, produits..) mais le lancement n’a toujours pas eu lieu. Où se situe le blocage ?
Bank Al-Maghrib a annoncé récemment la finalisation des travaux de mise en place du cadre réglementaire du paiement mobile et l’opérationnalisation de la plateforme du Switch Mobile «HPS Switch» qui permet à la solution d’être nativement interopérable. Cette plateforme permettant le routage, l’autorisation et la compensation des transactions mobiles est opérationnelle pour sa mise en production depuis juillet 2018. Depuis, 9 établissements ont désormais finalisé la phase d’homologation auprès du Switch Mobile et 5 établissements dont un établissement de paiement ont déroulé avec succès des tests de transactions interopérées. Parallèlement, Bank Al-Maghrib a publié, début novembre, deux textes réglementaires encadrant le paiement mobile. Il s’agit de la Décision réglementaire qui couvre principalement les modalités de souscription, les spécifications techniques du paiement mobile ainsi que les dispositions liées à la protection du consommateur ainsi que la Lettre circulaire détaillant principalement les règles techniques et de sécurité, le processus et les règles de gestion des réclamations, incidents et litiges. L’ensemble des établissements homologués (banques et établissements de paiement) sont en train de finaliser la mise en conformité de leur produit «m-wallet» avec le cadre réglementaire susmentionné, préalablement à l’inscription de l’ensemble des «m-wallet» précédemment émis, au niveau de la table de correspondance tenue et gérée par le switch mobile ; cette table étant l’outil qui établit le lien entre le numéro de téléphone, qui est l’identifiant unique de la transaction avec l’identifiant technique du «m-wallet» quel que soit l’établissement émetteur ou bénéficiaire. À ce jour, cinq «m-wallet» sur les sept émis sur la place ont été notifiés conformes suite à l’analyse de Bank Al-Maghrib. Le paramétrage de ces «m-wallet» sur la table de correspondance est en cours. Les premières opérations interopérées entre ces établissements sont maintenant techniquement possibles.
Hormis les 11 établissements de paiement agréés, y a-t-il d’autres opérateurs intéressés ?
Plusieurs banques de la place étudient aujourd’hui l’opportunité de créer des filiales «établissements de paiement» et quelques-unes d’entre elles ont d’ores et déjà déposé leur demande d’agrément. D’autres acteurs étudient également le marché. En tout état de cause, tout opérateur qui serait intéressé par le statut d’établissement de paiement doit remplir les conditions exigées par Bank Al-Maghrib et répondre aux conditions communiquées dans le dossier d’agrément type établi par Bank Al-Maghrib.
Les m-wallet sont des applications connectées ; l’utilisation d’un smartphone reste donc indispensable. Comment comptez-vous capter la population rurale et périurbaine, qui représente plus de 80% de votre cible et qui ne dispose pas forcément de smartphones ou de réseau performant ? Y a-t-il des outils adaptés à cette cible en préparation ?
Selon les deniers chiffres de l’ANRT (septembre 2018), la téléphonie mobile est généralisée pour la quasi-totalité des ménages aussi bien en milieu urbain qu’en milieu rural avec un taux d’équipement de 99,8%. Le nombre moyen des individus équipés en téléphone mobile dans le ménage est de 3,9. Près de 92% des individus âgés de plus de 5 ans sont équipés en téléphonie mobile dont 73% sont équipés d’un smartphone. Les plus jeunes (de 5 à 39 ans) sont les plus équipés en smartphones avec des taux avoisinant 80%. Le parc des smartphones est estimé à plus de 22,6 millions. Par ailleurs, les travaux que nous avons menés avec l’écosystème ont permis de prévoir l’ensemble des options permettant l’accès au paiement mobile que ce soit à travers les smartphones via les applications mobiles ou bien les GSM à travers le canal USSD pour les populations ne disposant pas de smartphone ou de connexion internet.