Les opérateurs mécontents de l’appréciation de la Banque mondiale
Les patrons de l’Agence marocaine de développement de la logistique, de l’Observatoire marocain de la compétitivité logistique et de la Commission transport & logistique de la CGEM contestent l’Indice de performance de la logistique de la Banque mondiale. Ils veulent créer leurs propres indicateurs.
Les logisticiens marocains ne sont pas du tout satisfaits de l’Indice de performance de la logistique (IPL) de la Banque mondiale (BM)! Les patrons de l’AMDL (Agence marocaine de développement de la logistique), de l’OMDL (Observatoire marocain de la compétitivité logistique) et de la Commission transport & logistique de la CGEM l’on fait savoir avant-hier lors d’un point de presse organisé à Casablanca. «Nous avons intérêt à construire au plus vite notre propre indicateur de performance parce que celui de la Banque mondiale sur lequel se base malheureusement les investisseurs du monde entier ne reflète pas les réalités de notre secteur logistique. Alors que sur le terrain nos coûts de fret baissent, cet indicateur affirme parfois le contraire, ce qui fait fuir les investisseurs potentiels dans notre secteur d’activité». a déclaré Rachid Tahri, le président de l’OMCL
Un indicateur contestable
Pour justifier ses propos, le patron de l’OMCL a tiré à bout portant sur l’IPL de la BM qui, rappelons-le, mesure six grandeurs logistiques (l’efficacité douanière, la qualité de l’infrastructure, l’organisation des expéditions, la qualité de services, la capacité de suivi de la traçabilité et le respect des délais). Il a notamment contesté la note de 2,54 points sur 5 attribuée au Maroc par l’IPL de la BM dans son rapport «Connecting to compete 2018 : Trade, logistics in the global economy». Selon lui, cette note, qui classe le royaume à la 109e position sur une liste de 160 pays, contre une 86e position obtenue en 2016, soit une régression de 23 positions en l’espace de deux ans, est tout simplement erronée. «Ce n’est pas vrai que le Maroc a connu une baisse à la fois de la qualité de ses infrastructures, de la qualité de services, du respect des délais et surtout de la traçabilité de ses expéditions entre 2016 et 2018», a-t-il expliqué. Analysant juste l’un des quatre griefs formulés par la BM à l’égard du Maroc, à savoir la baisse de la qualité des infrastructures, Tahri révèle que la BM elle-même publie sur son propre site d’autres indicateurs en contradiction avec cette information. S’appuyant ensuite sur les chiffres de l’UIT (Union internationale des télécommunications), il a rappelé que le volet infrastructure de l’IPL de la B.M inclut aussi la qualité des technologies de l’information et de la communication. Or sur ce plan, le dernier rapport de l’UIT a classé le Maroc et la Tunisie aux premiers rangs des 176 pays concernés par son indice de développement des TIC. Tahri révèle par ailleurs que d’autres indicateurs internationaux sont en contradiction avec l’IPL de la BM Il a notamment montré les tendances contradictoires entre l’indice de l’agilité logistique des marchés émergents et l’IPL, qui pourtant ont beaucoup de similarités.
Premières réunions pour créer des indicateurs locaux
Bref, tout cela pour justifier que l’IPL de la BM ne sert pas le Maroc et qu’il va falloir construire un indicateur propre. Pour commencer, l’OMCL a tenu quelques réunions avec les différentes sources d’informations que sont la Douane, le HCP (Haut commissariat au plan), l’ANP (Agence nationale des ports), Marsa Maroc, RAM, Air Arabia, les transporteurs routiers de marchandises, etc. Et pour le moment, le modèle mathématique à mettre en œuvre n’est pas encore adopté. Sur ce point, Mohamed Talal, le président de la Commission transport et logistique de la CGEM a fourni une piste: «De quoi a besoin un logisticien ? Il a besoin de connaître le coût du fret, le temps de transit et l’impact sur l’environnement. À mon avis, notre futur IPL devrait être construit sur la base de ces trois informations. Il suffit de trouver la bonne formule mathématique, la bonne pondération et le tour est joué. Il faudra aussi faire du lobbying auprès de nos homologues tunisiens et mauritaniens pour que la BM améliore son indicateur». Plus nuancé, Mohammed Yousfi, directeur général de l’AMDL, estime que «nous avons besoin d’indicateurs propres en interne pour notre secteur. Nous avons également besoin de l’IPL de la B.M qui est une référence internationale. Il faut parvenir à travailler en bonne intelligence ensemble».