Dette extérieure : Lourde, l’ardoise !
Nonobstant les warnings sur le niveau de l’endettement du pays, le bulletin trimestriel de la dette extérieure dresse un encours en hausse à 309,1 MMDH au terme des trois premiers mois de l’année contre 301 MMDH à fin 2015.
En dépit des alertes sur les finances publiques qui fusent de toutes parts, la dette du royaume continue de s’alourdir. En témoigne le bulletin trimestriel de la dette extérieure publique que vient de dévoiler le département de Mohamed Boussaid. Ainsi, à fin mars, l’encours de la dette extérieure publique s’est établi à 309,1 MMDH contre 301 MMDH à fin 2015. Durant les trois premiers mois de l’année, les mobilisations auprès des créanciers bilatéraux et multilatéraux se sont en effet élevées à 9,5 MMDH : 6,3 MMDH pour le Trésor au titre des appuis aux réformes et des projets du budget et 3,2 MMDH destinés aux projets d’investissement des établissements et entreprises publics (EPP). L’endettement croissant du royaume commence à inquiéter sérieusement plusieurs institutions nationales et internationales. La Cour des comptes a été l’une des plus actives ces derniers temps pour tirer la sonnette d’alarme.
Warning sur les EEP
Le dernier rapport en date a été consacré aux entreprises et établissements publics. Ainsi, concernant la structure de leurs dettes, «il importe de souligner que la part de la dette extérieure n’a cessé d’augmenter depuis 2008. À fin 2015, elle totalise 160,3 MMDH, soit 65,2% du total endettement du secteur, et représente 17% du PIB. Sur ce stock, 106 MMDH sont garantis par l’État», précise la juridiction financière. Et d’ajouter, en attirant l’attention sur l’un des gros risques encourus: l’augmentation continue de la part de la dette en devises, depuis 2012, est porteuse de risques pour les finances publiques, car toute défaillance des organismes débiteurs dans le règlement de leurs dettes garanties entraînera leur prise en charge par le budget général de l’État. L’augmentation des dettes de financement des EEP est circonscrite au niveau des principaux EEP engagés dans des programmes d’investissement. Il s’agit en l’occurrence du groupe OCP, de l’ONEE, d’ADM, de l’ONCF, de RAM, de la TMSA, de MASEN… et de certaines filiales du groupe CDG. L’encours des dettes contractées par ces organismes représente plus de 90% de l’endettement total des EEP et des dettes contractées en devises. Certes, cette augmentation de la dette a permis d’accompagner le financement de plusieurs programmes structurants suivants (production de l’eau et de l’électrique, développement des énergies renouvelables, réalisation des infrastructures de transport…). Mais cette politique «pourrait constituer une source de fragilité pour le secteur des EEP», met en garde la juridiction présidée par Driss Jettou.
Cercle vicieux
En exposant devant le Parlement le rapport annuel de sa juridiction, le président de la Cour des comptes a précisé que les finances publiques continuent de subir des contraintes liées notamment au poids lourd de la masse salariale qui a atteint, en 2014, près de 101,64 MMDH, soit 11% du PIB, et à l’augmentation, de plus de 10%, des dépenses relatives aux intérêts et commissions de la dette. Certes, les indicateurs des finances publiques se sont nettement améliorés ces dernières années avec un déficit budgétaire qui a reculé à 4,9% du PIB contre 5,6% en 2013 et 7,2% en 2012. Mais cette légère embellie est moins due à une performance de l’économie nationale qu’à des facteurs conjoncturels: l’augmentation des recettes non fiscales et ce, grâce aux aides étrangères et à la baisse des dépenses de compensation, suite à la mise en œuvre du régime d’indexation des prix des produits pétroliers et au recul, au niveau international, des prix des produits subventionnés. Du coup, le montant courant de la dette publique reste sur un trend haussier et atteint 584,2 MMDH, soit 63,9% du PIB. Et selon la Cour des comptes, le volume de la dette publique globale s’est établi à 743 MMDH en 2014, soit 81% du PIB, contre 76% une année auparavant, enregistrant ainsi une augmentation sensible.