Crédits et dépôts : la dynamique bancaire confirme sa résilience

Le secteur bancaire maintient sa trajectoire de croissance, entre sélectivité accrue et dynamisme mesuré. Les crédits bancaires enregistrent une progression annuelle de 4,4%, tirée par les financements à l’équipement et à l’habitat, tandis que les dépôts connaissent une hausse encore plus marquée de 8,2%. Derrière ces chiffres, se dessinent toutefois des lignes de tension : durcissement des conditions pour les TPME, différentiel de taux entre grandes entreprises et particuliers, et arbitrages plus fins des banques face aux risques.
Le système bancaire continue d’afficher des fondamentaux solides, dans un contexte marqué par l’attentisme des investisseurs et une croissance économique encore prudente. C’est ce qui ressort du dernier «Flash Crédits-Dépôts» publié par Bank Al-Maghrib (BAM), arrêtant les données à fin mai 2025. Si l’évolution reste globalement positive, le document met en lumière des contrastes entre ménages et entreprises, ainsi qu’entre types de crédits et conditions d’octroi, confirmant un environnement bancaire en pleine recomposition.
Un encours global en progression modérée
Selon Bank Al-Maghrib, l’encours global des crédits bancaires s’est établi à 1.144,8 milliards de dirhams (MMDH) à fin mai 2025, soit une progression annuelle de 4,4% par rapport à mai 2024. Ce rythme, modéré mais soutenu, traduit une demande toujours présente malgré un contexte international moins porteur.
«Les concours aux entreprises non financières privées ont marqué une progression annuelle de 2,8%. Cette évolution résulte essentiellement de la hausse de 11,1% des crédits à l’équipement et de 6,8% des prêts à la promotion immobilière. En revanche, les facilités de trésorerie ont enregistré un repli de 2,8%.», précise BAM dans son rapport.
Les crédits aux entreprises non financières privées ont progressé de 2,8% en glissement annuel, une dynamique largement tirée par les crédits à l’équipement (+11,1%) et à la promotion immobilière (6,8%). En revanche, les facilités de trésorerie ont enregistré un recul de 2,8%, signalant un certain repli des besoins de court terme.
Pour les ménages, l’encours global atteint 387,4 MMDH, en hausse annuelle de 2,4%. Là encore, la composante habitat (+2,5%) domine, tandis que le crédit à la consommation suit un rythme identique (+2,5%).
À noter que le financement participatif, notamment sous forme de Mourabaha immobilière, poursuit sa montée en puissance et s’élève à 26,6 MMDH, soit une hausse spectaculaire de +16,8% sur un an.
Des conditions d’octroi plus sélectives
Au-delà des volumes, BAM souligne également l’évolution des conditions d’octroi. Selon l’enquête sur les conditions d’octroi de crédit au titre du premier trimestre 2025, «les critères auraient été durcis pour les crédits de trésorerie et ceux à la promotion immobilière, et maintenus inchangés pour les prêts à l’équipement. Par taille d’entreprise, ils auraient été assouplis pour les grandes entreprises (GE) et durcis pour les très petites et moyennes entreprises (TPME)», indique l’institution centrale.
Ce double mouvement reflète une prudence accrue des banques face aux risques liés aux TPME, tandis que les GE bénéficient d’un accès au financement relativement plus favorable. Même son de cloche du côté de la demande qui aurait globalement augmenté pour tous les objets de crédit, tirée principalement par les grandes entreprises. En revanche, pour les TPME, la demande est jugée stagnante.
Le coût du crédit baisse pour les entreprises, mais il est en hausse pour les ménages
Un autre indicateur suivi de près est le le coût du crédit. Selon Bank Al-Maghrib, «au T1-2025, les taux appliqués aux nouveaux crédits se sont repliés, d’un trimestre à l’autre, de 9 points de base à 5,17%. Ils se sont établis à 4,96% pour les grandes entreprises et à 5,61% pour les TPME».
Ce différentiel entre grandes et petites entreprises reste notable, illustrant les différences de perception du risque. Pour les ménages, les taux moyens ressortent en légère hausse à 5,96% au T1-2025, recouvrant un accroissement de 14 points de base à 7,13% pour les crédits à la consommation et une quasi-stagnation à 4,74% pour les prêts à l’habitat.
Les dépôts bancaires accélèrent
Si l’offre de crédit reste dynamique, la collecte des dépôts confirme quant à elle un rythme encore plus soutenu. À fin mai 2025, les dépôts bancaires totalisent 1.268,7 MMDH, en hausse annuelle de +8,2%. Les ménages y contribuent pour 935,8 MMDH (+6,6%), dont 211,4 MMDH détenus par les Marocains résidant à l’étranger (MRE), un segment dont le poids reste stratégique pour le secteur bancaire.
De leur côté, les dépôts des entreprises non financières privées atteignent 224,4 MMDH, en progression notable de 14,2%, ce qui traduit une accumulation de liquidités et, probablement, une prudence accrue en matière d’investissement.
Légère détente des taux créditeurs
Sur le front des taux créditeurs, les rémunérations des dépôts reculent légèrement. Les comptes à terme à 6 mois voient leur taux diminuer à 2,36% (contre 2,72% un mois plus tôt), tandis que ceux à 12 mois baissent à 2,70%. Quant au taux minimum de rémunération des comptes d’épargne, Bank Al-Maghrib le fixe à 1,91% pour le second semestre 2025, en repli de 30 points de base par rapport au semestre précédent.
Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO