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Violences faites aux femmes : Le CNDH appelle le gouvernement à revoir sa loi

Incrimination du viol conjugal, interdiction du mariage des mineures, renforcement de la définition des formes de violences faites aux femmes en y incluant la violence psychologique, redéfinition du harcèlement sexuel sont autant de recommandations émises par le CNDH dans son avis sur le projet de loi relatif à la lutte contre les violences faites aux femmes. La balle est dans le camp des députés pour réviser ce texte controversé.

Décrié par le mouvement féministe, le projet de loi portant sur la lutte contre les violences faites aux femmes nécessite d’être amendé. Cette fois-ci, ce ne sont pas uniquement les acteurs associatifs qui plaident pour la refonte du texte, mais aussi le Conseil national des droits de l’Homme, qui vient d’émettre pas moins d’une quarantaine de recommandations pour réviser ce projet de loi adopté par le Conseil de gouvernement en mars dernier et soumis à la Chambre des représentants.

Avant même d’entamer le débat au sein de l’institution législative, la chambre basse a saisi le CNDH autour de ce texte qui a suscité une grande polémique dès la présentation de la première version en 2013. La seconde mouture, qui est aujourd’hui entre les mains des députés, est critiquée ouvertement et constitue, de l’avis des militants associatifs, «une régression» par rapport à la première. Les députés de la Commission de la justice, qui ont déjà achevé la phase de discussion du texte, sont désormais appelés à prendre en considération les observations de l’instance de Driss El Yazami dans la formulation de leurs propositions d’amendements.

Le CNDH a visiblement pris en considération bon nombre de remarques de la société civile. Pour éviter toute ambiguïté, le conseil appelle au renforcement des définitions relatives à la lutte contre la violence à l’encontre des femmes en y incluant, outre les préjudices physiques, sexuels et économiques, la violence psychologique. C’est l’une des requêtes principales des différentes associations. Même la complicité et l’aide à toutes les infractions de violence à l’encontre des femmes doivent être incriminées. Le CNDH recommande également d’incriminer le viol, et ce «abstraction faite de la relation entre la victime et l’auteur». Cette formule permet d’inclure le viol conjugal.

Le mariage des mineurs doit être interdit en mettant fin aux exceptions aux dispositions de l’article 19 du Code de la famille qui stipule que «la capacité matrimoniale s’acquiert, pour le garçon et la fille, jouissant de leurs facultés mentales, à dix-huit années grégoriennes révolues». S’agissant du harcèlement sexuel, le conseil plaide pour la révision de sa définition en remplaçant les termes «injonctions, menaces ou moyens de contrainte» par les termes «tout comportement verbal, non verbal ou physique à caractère sexuel». Le CNDH estime nécessaire d’inclure un nouvel article dans le Code de procédure pénale stipulant que la charge de la preuve (la preuve de non harcèlement) incombe, dans le cas du harcèlement sexuel visé par l’article 503-1 du Code pénal, à l’accusé lorsque ce dernier dispose d’une autorité sur la victime dans les sphères professionnelles ou scolaires. Dans le même sillage, le CNDH appelle aussi à punir tout acte relevant de la notion de «stalking» même s’ils n’ont pas de visée sexuelle, comme les tracasseries répétées et délibérées, le recours à une tierce personne à cette fin, l’utilisation des données personnelles de la victime pour lui proposer des marchandises ou des services, ainsi que tout autre acte susceptible de violer le mode de vie de la victime de manière sérieuse.

Le renforcement de l’implication de la société civile figure aussi parmi les recommandations du conseil. C’est d’ailleurs l’une des requêtes incessantes du mouvement féministe qui reproche au projet du gouvernement de limiter l’implication des associations dans les affaires de violences faites aux femmes en stipulant un accord écrit de la victime. Afin d’éviter la récidive et mettre en place une approche globale de lutte contre le fléau de violences faites aux femmes, des mesures supplémentaires à la fin des peines prononcées s’imposent. À ce titre, le conseil propose un cycle de stage ou de formation au sein d’un service, d’un établissement sanitaire, social ou professionnel ou d’une association spécialisée dans la lutte contre les violences faites aux femmes, pour une période ne dépassant pas trois mois dans un délai inférieur à dix-huit mois à compter de la date de la fin de la peine privative de liberté prononcée ou du prononcé de la décision judiciaire lorsque la peine est avec sursis ou assortie d’une amende. Pour les rendre applicables, ces mesures doivent être accompagnées de toutes les dispositions organisationnelles et institutionnelles nécessaires.

De nouvelles mesures pour protéger les victimes
Le CNDH recommande d’ajouter des mesures de protection qui doivent être prises immédiatement par la police judiciaire ou le ministère public, selon le cas, dans les affaires de violences faites aux femmes. Il s’agit notamment d’orienter la victime vers une cellule de prise en charge de la femme victime de violences, de lui donner la possibilité d’élire domicile dans le cabinet de l’avocat la représentant ou au siège d’une personne morale habilitée l’accompagnant lors de la période de l’ordonnance de protection, de permettre à la victime d’accéder à une liste de personnes morales habilitées et pouvant l’accompagner durant toute la période de l’ordonnance de protection (des associations spécialisées par exemple). Le CNDH exhorte les collectivités locales à participer, en partenariat avec l’État, à la création de centres sociaux d’hébergement des femmes victimes de violence en vue de garantir une plus grande proximité dans le domaine de la protection des femmes victimes de violence.


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