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Population carcérale : Nos prisons débordent !

La surpopulation dans les prisons au Maroc s’aggrave au fil des années. L’Observatoire marocain des prisons tire encore une fois la sonnette d’alarme: cette situation fait de la vie des détenus un enfer et constitue une entrave à toute politique visant leur insertion et resocialisation. 

Les prisons marocaines sont surpeuplées. Le nombre des prisonniers dans les 82 établissements pénitentiaires que compte le Maroc est passé de 74.039 en 2015 à 79.368 en 2016, soit une augmentation de 5.329 détenus. Une situation on ne peut plus inquiétante car il s’agit d’un indicateur significatif qui renseigne sur les conditions de vie au sein des prisons.

En effet, la surpopulation des prisons affaiblit les capacités du système pénitentiaire à répondre aux besoins des personnes détenues aussi bien en matière de soins de santé primaires, d’alimentation et d’hébergement que de réadaptation, d’éducation et de formation. L’Observatoire marocain des prisons (OMP), qui vient de rendre public son rapport annuel 2015/2016, tire la sonnette d’alarme sur la question. Certains établissements pénitentiaires sont plus touchés que les autres. Les taux de surpopulation à l’intérieur des prisons peuvent atteindre des seuils très élevés: 328,42% à la prison locale de Marrakech, 245,2% à celle de Nador, 190,4% à celle de Souk Larbaâ, 157,16% à l’établissement de Aïn Sbaâ (Casablanca), 140% à celui d’Aït Melloul… Seuls deux établissements pénitentiaires constituent l’exception: la prison agricole de Zayou, avec un taux de 85,8%, et le centre de réforme et d’éducation de Salé avec 82,75%. Les responsables gouvernementaux sont appelés à mettre en œuvre les mesures nécessaires en vue de mettre fin à cette déplorable situation, à commencer par la nécessité de faire baisser le nombre trop élevé des détentions provisoires. En effet, les détenus prévenus représentent 40,8% de la population carcérale totale. Les statistiques de la Délégation générale de l’administration pénitentiaire et de la réinsertion relatives à l’année 2016 font état de la persistance de la hausse du nombre des condamnés prévenus à 33.627 personnes contre 30.340 en 2015. Le constat de l’observatoire est sans équivoque: ce phénomène constitue le facteur principal amplifiant la dégradation de la surpopulation et fait des prisons des établissements punitifs au lieu d’être des établissements privatifs de libertés et jouant leur rôle en matière de qualification et de réinsertion sociale.

L’observatoire relève que le nombre élevé des détenus préventifs pèse lourdement sur le budget de l’État et amplifie sérieusement la surpopulation carcérale, ce qui impose inéluctablement de trouver des solutions réalistes à ce phénomène pour réduire son ampleur, à commencer par l’élaboration d’issues juridiques et pénales permettant d’accélérer les procès et l’adoption des dispositions légales relatives à la libération conditionnelle et d’aboutir à la mise à niveau des prisons en vue de garantir la dignité des prisonniers et protéger leurs droits. Les responsables et le législateur doivent mettre en place des peines alternatives à travers l’amendement du Code pénal et du Code de procédure pénale.

Le Conseil national des droits de l’Homme, rappelons-le, abonde dans le même sens, recommandant l’élargissement de l’offre des peines alternatives dans le système pénal national (surveillance électronique à titre d’exemple). Même les condamnations courtes sont à remplacer par des peines alternatives car elles sont jugées inutiles pour les détenus dans la mesure où les prisonniers concernés ne bénéficient d’aucun programme de réinsertion durant leur séjour carcéral. Les politiques de justice pénale sont pointées du doigt car elles accordent un poids excessif aux sanctions. L’observatoire estime qu’il est urgent de revoir l’approche sécuritaire prônée par l’institution judiciaire et les institutions concernées par le phénomène de criminalité et de faire baisser le nombre des prévenus. Il s’agit d’une question qui suscite une grande polémique parmi les juristes et les défenseurs des droits de l’homme.

Peine de mort: 92 condamnés en 2016
L’OMP appelle à l’abolition de la peine de mort des législations nationales et la ratification du deuxième protocole facultatif se rapportant au Pacte international des droits civils et politiques. Il recommande aussi la commutation des peines de mort en peines alternatives et l’amélioration des conditions des condamnés à mort dont le nombre à fin novembre 2016 est de 92 condamnés (88 hommes et 4 femmes) contre 117 (114 hommes et 3 femmes) à fin décembre 2015.

Recommandations
Au niveau de la magistrature, de la justice et des règles normatives, l’Observatoire marocain des prisons note que la réalisation d’avancées et l’amélioration des conditions des prisons exigent une harmonisation totale du système juridique national régissant les prisons avec les normes internationales en la matière. Il s’avère également nécessaire de lancer le processus de mise en place du mécanisme national de surveillance des lieux de détention. Le cadre juridique national régissant les établissements pénitentiaires doit être réformé et les dispositions de la loi 23-98 relative à l’organisation et au fonctionnement des établissements pénitentiaires doivent être révisées en parachevant les concertations avec la société civile pour la finalisation du projet de la Délégation générale de l’administration pénitentiaire et de réinsertion. Au niveau des conditions des prisons, l’observatoire recommande, entre autres, l’augmentation du budget alloué à la délégation pour améliorer les conditions de vie des détenus, l’amélioration des conditions matérielles et morales des fonctionnaires et le renforcement des mécanismes de contrôle administratif et judiciaire. Il faut aussi mener des enquêtes rapides et impartiales sur tous les cas de décès, mauvais traitement, torture, violence, transfert abusif, corruption, drogue…


Les besoins en santé en milieu carcéral

L’Observatoire marocain des prisons appelle à la mise en place d’un plan d’action dans le cadre du programme «Prison et santé» pour lutter contre les maladies graves et les maladies psychiques et mentales et détecter des cas de Sida.
L’amélioration des services de santé au sein des prisons est, en effet, un élément clé pour améliorer les conditions de vie des détenus. Les efforts entrepris au cours des dernières années sont certes salués mais demeurent insuffisants. La délégation a triplé le budget annuel alloué à l’achat des médicaments et du matériel médical et a renforcé ses ressources humaines en matière de santé pour atteindre quelque 613 prestataires de santé en 2015. Les unités médicales au niveau des établissements pénitentiaires ont été mises à niveau et d’autres unités conformes aux normes ont été créées. Dans le cadre de l’appui du Fonds mondial au renforcement du système de santé au niveau national, il a été programmé l’amélioration de l’accès à l’offre de soins en milieu carcéral par la révision du paquet minimum de service et de la réhabilitation de dix unités de santé. Afin d’identifier ces unités, le ministère de la Santé a décidé de recourir à une assistance technique nationale pour réaliser un état des lieux des unités de santé en milieu carcéral au préalable afin d’établir les besoins en réhabilitation et en équipement. 


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