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«Le nouveau cap sera dévoilé au début du deuxième trimestre»

Fathia Bennis, PDG de Maroclear

A l’occasion des 20 ans de Maroclear, Fathia Bennis, président directeur général de l’établissement revient sur les grands chantiers réalisés par le dépositaire central des valeurs mobilières du royaume, la mutation du marché ainsi que son évolution future.

Les Inspirations ÉCO : Cela fait 20 ans que Maroclear opère. Pensez-vous que le marché des «titres» ait gagné en maturité ces 20 dernières années ?
Fathia Bennis : Depuis sa dernière grande réforme en 1993, le marché des capitaux marocain n’a cessé d’améliorer ses infrastructures et ses règles de fonctionnement. La place de Casablanca dispose désormais d’un cadre réglementaire clair et d’une offre de services adaptée aux besoins des investisseurs. Les infrastructures de marché d’importance systémique telles que le Dépositaire central ont massivement investi pour se doter d’outils technologiques performants. Les opérations sont effectuées conformément aux meilleurs standards internationaux, dans la transparence et la sécurité les plus totales. Plus récemment, on a eu droit à l’ouverture du capital de la Bourse et à la transformation des deux établissements publics en charge du contrôle du marché des capitaux et des assurances en autorités. Si l’on ajoute à toutes ces réformes les mises à niveau importantes opérées par les intervenants du marché (banques, sociétés de Bourse, sociétés de gestion …), on peut considérer en effet que, oui, la chaîne Titres a énormément gagné en maturité à tous les niveaux.

On remarque que les échanges sur la place ont du mal à décoller. Dans quelle mesure les fluctuations de la Bourse, durant cette période, ont-elles impacté votre activité ?
Rappelons d’abord que la capitalisation boursière a progressé de près de 130 MMDH en 2016, et que le nombre de transactions a été plus important qu’en 2015. Mais il est vrai que, globalement, sur les dernières années, on note plutôt une baisse des volumes échangés en Bourse. Cela n’a pas eu d’impact significatif sur les activités et les comptes d’exploitation de Maroclear. En effet, à côté de la filière Bourse qui reste une composante majeure de l’activité du Dépositaire central, Maroclear assure également la gestion des transactions sur d’autres marchés qui affichent plutôt des progressions, notamment le marché des bons du Trésor et celui des OPCVM.

Les efforts des acteurs du marché financier sont visibles (AMMC, loi sur la Bourse…). Quels sont, à votre avis, les autres moyens à mettre en place pour redynamiser la place ?
En effet, les dernières réformes de la Bourse ont une dimension globale et impliquent des efforts de la part de l’ensemble des intervenants. Pour rappel, les reformes en question couvrent à la fois la réorganisation institutionnelle, le développement des produits et le renforcement des moyens d’action des autorités de régulation. Plusieurs autres éléments peuvent contribuer à cette dynamique. La flexibilité du dirham et l’assouplissent du régime de change en sont des exemples d’actualité. Autres exemples, la finance participative et la finance verte sont de nouveaux instruments qui constituent une source de développement stratégique pour notre marché.

Le lord-maire de la City de Londres a été reçu récemment par l’ensemble des acteurs financiers. Comment perçoit-il le marché marocain? Y a-t-il d’autres partenariats en préparation avec le LSEG ?
Cette visite concrétise la volonté de dynamiser les échanges entre les places londonienne et casablancaise, confirmant ainsi les relations privilégiées qu’entretient le Maroc avec le Royaume-Uni. Après sa sortie de l’Union européenne, il est important pour Londres de se reconnecter avec les pays en croissance à travers le monde et construire une relation plus étroite avec des places financières comme la nôtre. Pour la place casablancaise, la visite du lord-mire de Londres revêt une importance capitale à plus d’un titre. En effet, Londres étant un des plus importants points de rencontre de l’économie internationale, les opportunités d’une collaboration entre le Royaume‐Uni et le Maroc contribuera à faire de ce dernier un hub financier d’envergure dans la région et ce, à l’heure où la maturité et la solidité du système financier marocain ont fait leurs preuves, dans un contexte financier international agité.

Vous venez d’enchaîner plusieurs conventions pour inciter à la dématérialisation des titres. Quel est le potentiel de cette niche pour Maroclear ?
Rappelons d’abord brièvement qu’en de plus de la sécurité, de la transparence et de la réduction des coûts, la dématérialisation permet aux sociétés qui l’adoptent de diminuer leur empreinte écologique. Pour promouvoir ce service, Maroclear s’appuie en premier lieu sur ses deux partenaires historiques, à savoir l’Association professionnelle des sociétés de Bourse (APSB) et le Groupement professionnel des banques du Maroc (GPBM). Cela est d’autant est plus important que Maroclear n’a pas pour vocation de cibler et de démarcher directement les émetteurs. Nous avons ensuite effectivement enchaîné plusieurs conventions avec des niches potentielles qui peuvent drainer un nombre important de société non cotées vers la dématérialisation. On peut citer à titre d’exemple l’ensemble des sociétés anonymes bénéficiaires de l’accompagnement de Maroc PME ou encore celles où les investisseurs en capital (AMIC) détiennent des participations. Une convention a été également signée avec l’Ordre des experts comptables en tant que prescripteur/accompagnateur des sociétés non cotées.

Nous savons que les sociétés cotées (et donc mieux structurées) sont les plus ouvertes à ce genre d’initiatives. Pensez-vous que les autres catégories d’entreprises soient vraiment prêtes pour cette offre ?
Les sociétés cotées sont déjà dans l’obligation légale de dématérialiser les titres. En revanche, la dématérialisation des titres pour les sociétés non cotées est un service qui permet aux entreprises de protéger leurs titres de tout risque de perte, de vol, de destruction ou de falsification et de bénéficier ainsi de plus de sécurité, de visibilité et de transparence. Ce service peut constituer une étape préliminaire (mais non obligatoire) vers la cotation. Sans devoir s’acquitter de toutes les diligences nécessaires à une introduction en Bourse, un émetteur peut facilement dématérialiser ses titres car les formalités à accomplir à cet égard sont relativement simples. Par ailleurs, la dématérialisation peut être très utile à d’autres fins, notamment pour attirer les investisseurs internationaux, grâce à la garantie offerte par le code ISIN attribué aux titres de l’entreprise dès leur dématérialisation. Également, la dématérialisation représente un attribut essentiel lors de la création et la transmission des entreprises.

Avez-vous finalement révisé votre grille tarifaire ?
En effet, Maroclear a procédé à une revue des commissions appliquées à ses affiliés afin de simplifier la grille tarifaire et permettre ainsi un meilleur suivi pour la place. La nouvelle grille tarifaire, entrée en vigueur à partir de janvier 2016, a induit des changements importants. Ainsi, Maroclear a introduit le principe de prorata temporis pour le calcul de la commission de gestion des comptes. Les multiples tranches de capitalisation considérées pour le calcul des droits d’admission ont été également supprimées et remplacées, en fonction du type d’instrument, par un pourcentage unique applicable à toute capitalisation admise. Dans ce cadre, Maroclear a veillé à ce que ces changements n’aient pas d’impact sur le niveau global des commissions payées par les affiliés. Pour s’en assurer au préalable, la détermination des nouveau taux a pris en considération l’historique des années précédant la revue tarifaire en question.

Comment percevez-vous l’ouverture de la BCP sur le marché «titres» ?
À notre connaissance, le groupe Banque Centrale Populaire a toujours été très actif sur le marché des titres. Aujourd’hui, la BCP consacre sa filiale MEDIAFINANCE, qui opère dans les marchés des capitaux depuis plus 20 ans, à devenir une structure entièrement dédiée aux services Titres. Cette initiative est de nature à contribuer au développement des infrastructures du marché de capitaux au Maroc et ne manquera pas de renforcer les atouts et le positionnement de la place financière de Casablanca. En tout cas, Maroclear accompagne favorablement cette initiative, afin que le transfert de toutes les activités titres de la BCP vers MEDIAFINANCE s’opère dans les meilleures conditions.

Vous nourrissez des ambitions à l’international et plus précisément en Afrique. Avez-vous des pays particuliers dans le viseur ?
Conscients de notre enracinement historique en Afrique, nous considérons la coopération Sud-Sud comme une priorité, et Maroclear s’inscrit pleinement dans les efforts du Maroc pour le renforcement de cette coopération. Aussi, le Dépositaire central se met volontiers au service d’institutions similaires de pays amis. Cela s’est traduit par la concrétisation de plusieurs partenariats, notamment l’assistance à la sous-région CEMAC (Communauté économique et monétaire des États de l’Afrique centrale) où un dépositaire central et une Bourse régionale (BVMAC) ont été installés avec succès à Libreville (Gabon). Nous avons également eu à coopérer avec la Banque centrale des États de l’Afrique de l’Ouest (BCEAO) pour la mise en place d’un nouveau système d’adjudication et de gestion des bons du Trésor. Au-delà des exemples précités, Maroclear est un associé actif dans toutes les démarches visant à renforcer la collaboration et permettant de développer et d’approfondir l’intégration entre les marchés financiers africains.

L’intégration régionale pourrait-elle être un autre moyen en vue de l’internationalisation ?
À notre avis, le Maroc doit renforcer son ancrage africain, consolider ses partenariats classiques (Union européenne, pays du Golfe …) et s’ouvrir davantage sur d’autres partenaires (Chine, Inde …). Par rapport à l’ensemble de ces ambitions, nous nous ne sommes pas obligés d’adopter une approche séquentielle.

Quels sont vos prochains projets ?
La résilience et la montée en puissance de notre système d’information a été l’un des axes majeurs de ce plan de développement stratégique Cap 2014-2016. Mais nous avons défini d’autres axes de développement. Il s’agit, notamment, du capital humain, pour porter nos équipes aux meilleurs niveaux d’expertise, mais aussi la poursuite des actions de normalisation et de conformité aux réglementations nationales et internationales. Parmi les axes de développement prioritaires, je cite aussi la création d’une Direction communication & développement commercial en charge de l’image de Maroclear, de la communication interne, externe et digitale et du développement commercial de nouveaux services, notamment la dématérialisation des titres pour les sociétés non cotées dont nous avons parlé précédemment. Globalement, et avec le soutien et le concours de l’ensemble de nos partenaires, nous avons quasiment franchi ce cap. Il nous appartient désormais de définir, en concertation avec nos partenaires, le prochain plan de développement stratégique. La réflexion est déjà entamée à ce sujet, et le futur Cap sera dévoilé au début du deuxième semestre 2017, après validation par notre Conseil d’administration.


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