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Grogne sociale au sein d’ADM : Le point avec Anouar Benazzouz

Anouar Benazzouz, Directeur général d’ADM

Enfin, un accord a été conclu entre la direction de la Société nationale des autoroutes du Maroc et les syndicats après une série de grèves. L’objectif est de définir, dans les prochains jours, une solution pérenne avec les employés d’exploitation portant sur la pérennité de l’emploi et les acquis sociaux tout en répondant aux besoins de modernisation d’ADM. Son directeur général, Anouar Benazzouz, fait le point sur les doléances syndicales et souligne l’impératif d’adaptation avec les nouvelles mutations.

Les Inspirations ÉCO : Pourquoi le dialogue social était-il resté au point mort malgré la grogne sociale au sein d’ADM ?
Anouar Benazzouz : Le dialogue ne s’est jamais interrompu. Trois corps sont concernés : les employés des prestataires de péage et d’assistance ainsi que les cadres et les agents de maîtrise d’ADM. Le problème des employés externes de nos prestataires ne date pas d’aujourd’hui. Le premier mouvement de grève a été observé en 2011 ; une année durant laquelle a été créée une commission interministérielle qui a répondu à certaines doléances alors que d’autres points sont restés sans réponse. En 2014, l’intérêt a été accordé aux droits sociaux en exigeant à nos prestataires une certaine discipline dans l’exécution des contrats. Je tiens à préciser que le dialogue social ne s’est pas arrêté. À un certain moment, la situation financière s’est améliorée de manière significative et la moyenne des salaires a été ramenée à 4.000DH. Par la suite, le débat a porté sur la conclusion d’une convention collective. La loi exige la signature de cette convention entre les employés et leur employeur direct.

Néanmoins, vous avez ouvert directement le dialogue social avec eux autour de la convention collective ?
Au départ, la priorité portait sur l’amélioration de leur situation financière. À cela s’ajoute la pérennité de l’emploi car tous les trois ans, on doit changer de prestataire. L’idée était d’inscrire la convention collective dans le cahier des charges pour donner un marché à un prestataire.

Où en est ce projet ?
Les syndicats exigent qu’ADM soit signataire alors que cela n’est pas conforme à la loi, mais ADM comprend le besoin d’avoir une certaine garantie pour la pérennité de l’emploi. Une commission interministérielle travaille depuis six mois sur le sujet. Nous pouvons trouver une formule en dehors de la convention collective qui répond à ces questions. Nou sommes dans les phases finales de cet accord. Avec la modernisation d’ADM, de nouveaux métiers verront le jour. L’idée est de garantir que le salaire reste le même en cas de mobilité. La finalisation de cet accord se fait avec les partenaires sociaux. Nous œuvrons à trouver une solution pérenne qui satisfait tout le monde. L’équilibre devra se faire entre toutes les parties.

Pourquoi avoir opté pour l’externalisation de l’exploitation alors qu’il s’agit d’un service important pour ADM ?
Il faut rappeler la mission d’ADM lorsqu’elle a été créée pour construire un projet autoroutier important et le développer mais en se basant sur le secteur privé. Nous ne construisons pas l’autoroute. Notre mission est de développer le secteur privé. C’est pour cette raison qu’on a développé l’écosystème dans le BTP. Les entreprises qui n’étaient pas, au démarrage, capables de faire des autoroutes sont actuellement en train de le faire au Maroc et en Afrique. ADM a joué ce rôle dans le BTP et doit faire de même pour l’exploitation. Il ne nous est pas demandé de faire nous-mêmes les métiers mais plutôt de développer le secteur privé pour stimuler l’économie nationale. ADM dispose de 500 employés alors que notre écosystème atteint jusqu’à 5.000 personnes. La construction a été plus importante que les autres métiers. Il fallait arriver à Oujda et Agadir dans un temps record. En parallèle, l’exploitation n’était pas importante. On ne trouvait pas de sociétés de prestation de services. Il fallait développer ce volet. Ce développement permettra à ADM d’aller en Afrique avec les prestataires. Le secteur privé au Maroc est autant important que le secteur public.

Encore faut-il que le secteur privé respecte les droits des salariés…
Nous faisons des audits. ADM agit pour sanctionner les prestataires le cas échéant. Notre mission vise à stimuler le secteur privé pour la promotion de l’emploi. Avec le développement de la technologie, le métier de l’exploitation change complètement. On a opté pour le télépéage car chaque année, des milliers de véhicules s’ajoutent au Maroc. L’augmentation de la capacité s’impose. La vidéosurveillance se fait actuellement.

Arrivera-t-il le jour où les gares autoroutières seront totalement équipées en télépéage ?
Tout dépend des habitudes des consommateurs. La société doit faire des propositions au consommateur. La réaction est déjà positive pour le télépéage. Nous avons vendu 78.000 tags de télépéage et on va bientôt arriver à 150.000 tags. Quelque 350.000 véhiculent par jour passent dans notre réseau. Arriver à 20% jusqu’à 30% en télépéage est faisable.

Quid du projet de la convention collective avec les employés permanents ?
Nous sommes toujours en dialogue avec les agents de maîtrise. Nous sommes en train de nous transformer d’une société de construction à une société de services. Toutes les sociétés d’autoroutes dans le monde basculent vers les services clients lorsqu’elles arrivent à 800 km. Et à 2.200 km, elles exportent leur métier. Jusqu’à 1.600 km, ADM ne faisait que la construction. Avec le développement de notre trafic, ADM passe à une phase de services clients avec les mêmes personnes. Il faut ainsi faire une transformation dans les compétences. ADM académie a été lancée en janvier 2015. Nous sommes en train de changer les métiers des employés, ce qui crée un sentiment d’angoisse et de doute. C’est moi-même qui ai proposé la convention collective. Pour l’exécuter, il faut revenir au conseil d’administration. Des échéances sont à respecter. Un accord a été signé portant sur le timing et ce qui est faisable. Le plus important reste la définition des nouveaux métiers et les changements qui devront être opérés à ce niveau-là. C’est ce que nous sommes en train de construire petit à petit avec eux. En effet, les métiers changent lorsqu’on passe au service client. Le rattrapage ne se fait pas en une année. Il nécessite trois ans voire cinq ans. Les employés ont besoin d’être rassurés.

Faites-vous ce travail de communication ?
Peut-être qu’on ne le fait pas assez. En tout cas, le strict minimum est fait. Les employés demandent davantage de détails. On ne peut pas leur préciser les métiers dans cinq ans. Le plus important est le chemin à parcourir. La communication ne passe pas par les rumeurs.

La mobilité géographique est redoutée. Que prévoyez-vous en la matière ?
La mobilité géographique est toujours redoutée. Notre société est étalée sur tout le territoire. Il faut concilier entre les intérêts personnels et professionnels. Avec le dialogue, nous pouvons trouver des solutions. Cela fait quatre années qu’on gère cette mobilité sans aucun problème.

Où en est le plan de réorganisation du statut du personnel qui est vertement critiqué ?
Le statut du personnel a été mis en conformité avec le Code du travail. Sa refonte n’a pas encore commencé. C’est un chantier qu’on va commencer en 2017 avec les partenaires sociaux. Pour le dossier du départ volontaire, c’est le conseil d’administration qui l’a décidé pour plusieurs raisons dont le changement de métiers d’ADM. Des cadres ont été intéressés par ce processus en 2016.

Certains ont intenté un procès contre ADM…
Nous faisons les choses dans les règles de l’art. Si certaines personnes considèrent qu’elles sont lésées, elles peuvent recourir à la justice.

Sur le volet financier, quelle évaluation faites-vous des pertes à cause des jours de grèves observés ?
Je ne veux pas répondre à cette question. L’enjeu de la sécurité est plus important que les pertes financières. L’enjeu est le futur d’ADM et la réussite de la transition. ADM œuvre à résorber ces pertes. Le bilan sera fait sur toute l’année. Nous allons communiquer sur ces pertes le moment opportun.

Quelle est la situation financière d’ADM ?
En 2014, ADM était presque en faillite. On parlait d’un équilibre financier à l’horizon 2034 dans les meilleurs des cas. On a procédé à une restructuration financière et on a équilibré notre bilan. On est en train de faire le reprofilage de la dette en remplaçant une dette chère par une dette moins chère en augmentant la maturité de la dette qui était en moyenne de 15 ans à 20 ans et 25 ans. Aujourd’hui, l’horizon de l’équilibre financier passe à 2023. Il reste d’autres choses à faire pour rapprocher cette date le plus possible sauf en cas de programmation de nouveaux tronçons d’autoroutes ; une décision qui revient au gouvernement. Sur le plan de l’équilibre financier, la situation actuelle est de loin meilleure qu’en 2014 grâce à ce travail de restructuration financière : changement d’une partie des amortissements, étalement du délai de la concession, remplacement de la dette chère…ADM a été avant-gardiste dans la gestion de sa dette. Le problème d’ADM est le même que celui d’autres établissements publics car l’investissement dans les infrastructures nécessite de grands moyens. Cette ingénierie financière d’ADM est réplicable à tous les autres établissements publics.

Où est en le contrat-programme qui tarde à voir le jour ?
Le contrat-programme dépend du gouvernement. Les discussions ont commencé avec l’ancien gouvernement et se sont arrêtées avec les élections. Elles devront bientôt reprendre avec l’actuel gouvernement. On va voir si les mêmes choix seront gardés. 


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