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Banques participatives : Les choses sérieuses commencent

Avec les agréments qui donnent le feu vert au lancement des banques participatives, l’année 2017 sera une année charnière pour celles-ci. Les autorités devront aussi appuyer sur l’accélérateur, notamment en ce qui concerne l’assurance takaful et les sukuk, permettant aux banques d’offrir des produits complets.

C’est acté! Comme l’avait annoncé le wali de Bank Al-Maghrib, les banques participatives pourront démarrer dès ce premier semestre. En effet, la Banque centrale a annoncé, via un communiqué diffusé lundi soir, l’octroi de ses agréments à cinq banques et trois windows. Il s’agit en l’occurrence de CIH Bank en partenariat avec la Qatar International Islamic Bank, de BMCE Bank of Africa, conjointement avec le groupe saoudien/bahreini Dalla Al Baraka, de la Banque Centrale Populaire avec le groupe saoudien Guidance (société financière spécialisée dans le financement immobilier), du Crédit agricole du Maroc avec l’Islamic Corporation for the Development of the Private Sector (ICD), filiale de la Banque islamique de développement (BID) et d’Attijariwafa bank, qui est toujours en discussion pour un futur partenariat. Les agréments de windows sont octroyés à la Banque marocaine du commerce et de l’industrie (BMCI), au Crédit du Maroc et à la Société Générale. Selon Abdeslam Bellaji, président de l’Association marocaine de l’économie islamique (ASMECI), «le nombre de banques ayant obtenu l’agrément est en soi une bonne nouvelle pour les citoyens, étant donné que le choix offert sera plus large et qu’il y aura une bonne compétitivité».

À vos marques, prêts, partez!
Maintenant que les agréments sont accordés, c’est toute une dynamique qui devra être activée pour que cette branche participative prenne son envol dans les meilleures conditions. Transformation juridique, étoffement des équipes, mise en place des systèmes d’information, organisation des agences et réseaux, conception des produits, transmission de ceux-ci au CSO pour conformité avec la Charia ou encore communication sur les produits sont autant de démarches qui attendent les banques avant qu’elles deviennent pleinement opérationnelles. Pour ne citer que le CIH et BMCE Bank Of Africa, la première estime pouvoir démarrer dès le deuxième trimestre tandis que la seconde se fixe un délai de six mois. C’est dire que les banques ayant reçu l’avis favorable de la Banque centrale ont encore du pain sur la planche. Pour les experts, les agréments ne sont que le début d’un long processus.

D’ailleurs, selon Rachid Maataoui, directeur général de Financité, «il faut faire la différence entre l’octroi des licences et le démarrage effectif. L’octroi des licences est un feu vert aux banques pour qu’elles commencent effectivement à finaliser les chantiers sur lesquels elles se sont engagées, nécessaires à la préparation de l’offre commerciale ou au fonctionnement prochain de leurs banques commerciales. On peut prévoir une ouverture des premières banques dans une moyenne de six mois». Par ailleurs, une question demeure: ces établissements seront-ils dirigés par les banques marocaines ou leurs partenaires, qui disposent du savoir-faire et d’une expérience très longue en la matière? D’après un article publié dans le  CPI Financial, hier, Al Baraka Banking Group, partenaire de BMCE Bank Of Africa, a précisé que la nouvelle banque participative sera sous sa direction et opérera dans le cadre de son réseau d’unités bancaires auxiliaires, qui sont actuellement situées dans 15 pays et possèdent à leur tour plus de 700 succursales.

Un premier pas franchi
Il n’en demeure pas moins que beaucoup reste à faire pour que l’offre soit complète. Les produits de financement que vont offrir les banques participatives ne peuvent être proposés sans contrat d’assurance conforme à la Charia, soit l’assurance takaful. De même, pour se refinancer via un marché interbancaire, il faut que les sukuk soient émis. Pour Said Amaghdir, président de l’Association marocaine de la finance participative-Sharia compliant (AMFP), «les agréments constituent un premier pas franchi dans l’édification de l’écosystème de la finance participative. Pour que celui-ci prenne vie, il lui manque encore deux autres piliers: l’assurance takaful et les émissions de sukuk». Selon lui, «toute banque ne peut démarrer sans ces deux éléments.

Les produits doivent être adossés à des contrats takaful, d’autant plus que les banques doivent pouvoir se refinancer sur le marché interbancaire. Ainsi, les autorités seront amenées à accélérer la cadence pour la mise en place de ces deux dispositifs afin de pouvoir démarrer effectivement au second semestre de l’année en cours». Un avis d’ailleurs partagé par deux autres experts, notamment Rachid Maataoui, directeur général de Financité et Abdessalam Bellaji, président de l’Association marocaine de l’économie islamique (ASMECI). Pour le premier, l’octroi des agréments ne constitue qu’un pas et il faut encore lancer l’assurance takaful, les sukuk ainsi que les OPCVM et indice boursier Sharia compliant (voir le dixit ci-contre). Le second estime, lui, qu’il est difficile d’imaginer la commercialisation de produits bancaires de financement qui respectent la Charia, adossés à une assurance traditionnelle. Il souligne ainsi que l’on ne peut se réjouir de ces agréments sans la publication des décrets d’application régissant l’assurance takaful, l’octroi des agréments à ces assurances ou encore leur validation par le CSO afin de vérifier leur conformité à la Charia.

Par ailleurs, Maataoui ne manque pas de rappeler qu’hormis l’octroi des agréments, la Banque centrale a encore du pain sur la planche, dans la mesure où elle doit encore publier les circulaires relatives aux banques participatives pour compléter l’arsenal juridique. Enfin, il faut dire que ce n’est pas pour rien que les grands groupes partenaires des banques locales ont misé sur le marché marocain. Le potentiel de la finance participative est prometteur. Il est même estimé, selon une étude de Thomson Reuters, que l’actif des banques marocaines participatives puisse potentiellement passer de 50,3 à 83,1 MMDH en 2018, générant au passage un résultat net de 647,4 MDH à 1,1 MMDH. D’ailleurs, Adnan Ahmed Yousif, membre du Conseil d’administration, président et chef de la direction d’Al Baraka Banking Group, a déclaré à CPI Financial que «l’entrée sur le marché marocain est une réalisation très importante et créera une plus grande diversité dans la constitution de portefeuilles d’actifs et de sources de revenus pour le groupe». Également, Mohamed Hammour, chairman de Guidance Financial Group, avait annoncé aux Inspirations ÉCO qu’ils sont «très fiers et honorés d’être les partenaires de la Banque populaire dans le lancement d’une nouvelle banque participative».


SE Sheikh Saleh Abdullah Kamel,
Président du groupe bancaire Al Baraka.
Source: CPI Financial

Nous sommes très heureux d’avoir obtenu l’agrément de la Banque centrale du Maroc pour la création d’Al Baraka Bank Maroc après un premier avis favorable. Nous avons, ainsi, accompli une étape stratégique importante dans la mise en œuvre de notre programme pour couvrir tous les grands pays du Maghreb à travers notre présence et nos services bancaires, mais aussi pour nous étendre sur le continent africain. Nous avons l’intention de prendre d’autres initiatives à l’avenir pour atteindre cet objectif.

Rachid Maataoui
Directeur général de Financité

L’octroi des agréments constitue un pas, mais il reste tout de même un autre pas à réaliser dans la mesure où les composantes d’un écosystème de finance participative qui soit et crédible sont loin d’être réunies. Ce premier pas était nécessaire, c’est-à-dire un passage obligé, mais maintenant, il reste un long chemin à faire, et le grand pavé de ce chemin est bien évidemment l’assurance Takaful, dans la mesure où s’il n’y a pas d’assurance islamique il n’y a pas de finance islamique et donc tout le travail maintenant et toutes les caméras vont être braquées sur l’instance en charge de préparer l’arsenal réglementaire et organisationnel des offres Takaful, qui n’est autre que l’ACAPS. Par la suite, il y a l’aspect relatif aux sukuk, aux OPCVM sharia compliant, ou encore l’aspect relatif à l’indice boursier sharia compliant et donc tous les éléments à même de former un écosystème de finance islamique complet. Il faut savoir dans ce sens que les attentes du marché et du peuple sont énormes dans la mesure où les attentes concernent une offre complète qui ne soit entachée d’aucune imperfection de compatibilité shariatique.


Circulaires qui doivent paraître

La Banque centrale a bien octroyé les agréments, mais il reste néanmoins des circulaires qu’elle doit encore publier. Il s’agit en l’occurrence de:

• La circulaire sur les fonds de garantie,
• La circulaire sur les conditions et modalités de fonctionnement de la fonction de conformité (ou les comités sharia en interne),
• La circulaire sur les conditions dans lesquelles se transmet le rapport de conformité à la banque centrale,
• La circulaire sur les conditions et modalités de collecte et de placement des dépôts,
• La circulaire sur les caractéristiques techniques et modalités de présentation à la clientèle des produits et contrats,
• La circulaire sur l’ouverture de windows (départements) dédiés à la finance participative dans les établissements de crédit, les sociétés de financement, les associations de micro-financement, les établissements de paiement et la CDG.


Ahmed Rahhou
Président-directeur général du CIH

Nous sommes, bien évidemment, ravis. Nous avons déposé notre avis il y a à peu près une année. Après, il y a eu des séances d’auditions avec la Banque centrale et beaucoup d’allers-retours. Nous sommes ravis de figurer en début de liste des agréments. Nous avions commencé à travailler depuis le dépôt du dossier. Nous sommes sur des niveaux de préparation assez avancés puisque le choix des équipes, du système d’informations et des procédures a été très largement établi. Le staff dirigeant a été choisi. Comme il s’agit d’un communiqué, nous attendons notre agrément de manière officielle. À partir de là, il y a un travail de préparation, notamment sur le plan administratif. Parce qu’il faut créer la banque, changer les statuts, puisque nous avons déjà une structure qui travaille, tout ceci nécessitera quelques semaines. Concernant les effectifs, les dirigeants, les membres du directoire sont déjà désignés. De même, des personnes devant être affectées au niveau des agences et des services de fonctionnement sont aussi sélectionnées et nous continuerons à recruter les prochaines semaines. Pour ce qui est des agences, nous avons déjà identifié une dizaine de points que nous comptons ouvrir cette année et puis nous verrons en fonction du marché comment réagir pour accélérer la cadence, étant donné que notre objectif est d’être présent partout au Maroc et dans les principales villes et en particulier les chefs de file des régions. Nous souhaitons être présents de la façon la plus large possible et tout dépendra de la réaction du marché; si elle est rapide ou lente, nous accélérerons ou ralentirons le rythme des ouvertures. Pour cette année, notre objectif est d’être présent est visible dans les principales villes. Nous espérons démarrer courant ce semestre, plus précisément au début ou au milieu du deuxième trimestre de cette année.  


Mohamed Maarouf
DG de la banque participative du groupe BMCE Bank Of Africa Al Baraka Bank

Les Inspirations  ÉCO : BMCE Bank Of Africa vient de recevoir l’agrément de la part de la Banque centrale pour le développement de la finance participative. Quand Al Baraka Bank entamera-t-elle son activité ?  
Mohamed Maarouf : D’abord, nous devons nous féliciter de l’aboutissement de cet important processus mené efficacement par la Banque centrale. Cette démarche permettra au Maroc de se doter de système de finance participative capable de jouer pleinement son rôle dans l’économie nationale et d’apporter la valeur ajoutée souhaitable. En ce qui concerne notre groupe, BMCE Bank Of Africa, nous envisageons de lancer notre activité d’ici exactement 6 mois, le temps de terminer les dernières démarches nécessaires au lancement.
   
Concernant Al Baraka Bank, aurez-vous un réseau d’agences dédiées? Combien d’agences comptez-vous inaugurer ?
Notre banque participative est dotée de son propre réseau d’agences, comptant une dizaine de succursales pour cette première phase.
   
Quels seront les produits phares que vous proposerez lors du lancement de cette activité ?
Il est encore tôt pour donner plus de détails sur notre offre. Sachez que nous sommes porteurs d’un projet ambitieux. Nous avons déjà commencé à travailler sur plusieurs dossiers, notamment les besoins des particuliers et des entreprises avec des packages de produits à même de répondre de manière optimale à ces besoins.



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