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Assises de la fiscalité. Quelles priorités ?

Mohammed Berrada, président du comité scientifique des Assises de la fiscalité de 2019, nous livre ses trois priorités pour ce rendez-vous majeur de la politique économique du pays.

«Le système fiscal marocain est marqué par des distorsions catastrophiques », s’inquiète Mohammed Berrada, professeur en économie et ex-ministre de l’Économie des finances dans les années 80, lors des Matinales de la fiscalité organisées par le Groupe Le Matin le 29 mars à Casablanca. Cet expert et observateur de l’évolution de la situation économique du pays a eu la charge de travailler sur le programme scientifique des Assises de la fiscalité prévues en mai prochain. Il a livré sa vision et ses quatre priorités pour ce rendez-vous très attendu par les opérateurs économiques de tous bords. L’ambition de la future réforme sera une nouvelle fois «Atteindre l’équité fiscale». Cet objectif, affiché depuis 2013, n’a pas encore été atteint par la configuration actuelle du système fiscal marocain. Le principe directeur de la réforme entend «orienter la fiscalité vers le financement des investissements productifs et, in fine, ne pas encourager la rente», explique Berrada.

Quatre priorités
Berrada ne cache pas son insatisfaction du bilan de l’application de la TVA au Maroc. «Le système de la TVA est à revoir», affirme-t-il en ouverture de ce panel. Le directeur de Links, centre de recherches en économie, veut rendre à la TVA sa neutralité. «Dans sa formule actuelle, la TVA devient une charge, un problème pour l’entreprise. Or, les entreprises ne sont que des collecteurs de cette taxe pour l’État», souligne Berrada.

Deuxième priorité: élargir l’assiette fiscale. Un objectif plusieurs fois repris par les différents architectes de la fiscalité au Maroc, mais difficile à atteindre, comme l’a montré la récente crise entre le gouvernement et les commerçants sur la transparence fiscale. «Cette réforme est nécessaire, il faut la mener graduellement et sans brutalité», propose Berrada.

Ce dernier insiste pourtant sur son caractère urgent. «Seules 0,8% des entreprises au Maroc contribuent à 80% des recettes à l’IS. C’est une situation catastrophique», alerte t- il. Deuxième chiffre choc: «385 entreprises déclarent leur chiffre d’affaires positif; ceci représente à peine 0,16% des entreprises au Maroc». L’autre mal fiscal au Maroc concerne la pression fiscale sur les salariés. «60% de l’IR proviennent de prélèvements à la source. C’est aussi un problème fondamental», continue Berrada dans un argumentaire bien huilé, amenant les changements à entreprendre en mai prochain. «Le constat est que beaucoup de gens continent d’échapper à l’impôt», affirme Berrada.

La dernière priorité de Berrada et de son équipe consiste à assurer un équilibre entre les recettes des impôts directs et de ceux indirects. Un chantier à long terme, qui renvoie à la structure de l’économie marocaine, portée par la consommation interne et une même demande orientée vers la consommation de produits et services importés. «Le fait que les impôts indirects dépassent les recettes des impôts directs n’est pas un signe de bonne santé de l’économie. Il faut pouvoir revoir situation », recommande Berrada.


Issam El Maguiri
Président de L’Ordre des experts-comptables
Le niveau de la pression fiscale au Maroc est un débat trompeur. Il faut prendre ce niveau national de 22% et le comparer à d’autres pays dans le monde, tout en s’interrogeant sur le niveau de dépenses fiscales. Notre objectif est de pouvoir faire contribuer le maximum de personnes en travaillant à élargir l’assiette fiscale.

Mohamed Manchoud.
En charge de l’animation du réseau au sein de la DGI
Un nouveau Code général des impôts et des taxes sera une prouesse. Un tel chantier permettra d’apporter une clarté fiscale aux citoyens et à l’investisseur. Un code commun réunissant les taxes locales et de l’État .permettra d’avoir un seul interlocuteur. C’est un chantier important que nous devrons aborder lors des Assises.

Mohamed Hdid.
Président de la Commission fiscalité à la CGEM
Il faut relativiser certains constats sur la fiscalité au Maroc. La concentration des contribuables de l’IS n’est-elle pas due à la concentration de la richesse entre les mains de ces quelques entreprises? Élargir l’assiette passe aussi par le développement de la richesse créée. Deuxième remarque, la pression fiscale subie par la classe moyenne ne correspond pas à la qualité des services publics offerts aux citoyens.



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