Karim Gassemi. “L’économie marocaine a toujours été dynamique”
«Voyage au cœur de la compétitivité de l’économie marocaine». C’est le titre de l’ouvrage collectif réalisé sous la direction de Karim Gassemi, professeur ENCG Casablanca. Il est le fruit d’une collaboration entre des professionnels et un groupe d’experts de différents secteurs d’activités.
Derrière toute idée d’ouvrage, il existe une volonté mais également un contexte déterminant faisant de cette publication une nécessité. Pourriez-vous nous présenter «Voyage au cœur de la compétitivité de l’économie marocaine» ainsi que son contexte de publication ?
Le projet de cet ouvrage a démarré en décembre 2015. Il vient dans un contexte précis et pour répondre à une nécessité précise. Le contexte est marqué par les différents efforts faits par le Maroc depuis 2004/2005 pour structurer son économie et ainsi augmenter son attractivité au niveau régional et international. Cet ouvrage répond aussi à la nécessité d’avoir un recueil d’informations structuré au profit des différents acteurs internes et externes impliqués dans le développement économique de notre pays. Cet ouvrage comporte trois parties complémentaires. Une première partie concerne le positionnement géostratégique et géopolitique fait par le Maroc ainsi que les différents projets structurants réalisés sous le règne de sa majesté le roi Mohammed VI. Une deuxième partie se focalise sur la structuration de notre économie depuis le premier rapport McKinsey en 2005 en passant par le Plan national de l’émergence industrielle (PNEI) jusqu’à l’actuel Plan d’accélération industrielle (PAI). Et finalement, la troisième partie concerne une analyse de la compétitivité de certains secteurs d’activités au Maroc. Cet ouvrage collectif est entièrement conçu par des professeurs du Laboratoire d’analyses marketing et stratégiques des organisations (LAMSO) et des cadres en activité professionnelle lauréats de l’École nationale de commerce et de gestion de Casablanca.
Dans votre ouvrage, vous avez établi une analyse de la compétitivité des secteurs de l’économie marocaine. De votre point de vue et au prisme de cette analyse, comment se comporte notre économie ?
Dans notre économie, il y a des secteurs d’activité qui se portent bien et d’autres qui sont à la traîne ou enregistrent un développement moyen pour différentes raisons (manque d’importance, faiblesse des actions de l’État, etc…). Mais dans l’ensemble, si on compare notre économie à celle des pays voisins, force est de constater plusieurs aspects de distinction. Ces aspects rassurent les investisseurs et améliorent le degré d’attractivité de la destination économique du royaume. Si on devait comparer notre économie à un tableau. Il n’est ni noir ni rose et un travail sur le long terme est indispensable. Au moins, nous avons le mérite d’avoir une vision claire ainsi que des objectifs stratégiques déclinés et ceci grâce à l’impulsion de sa majesté le roi Mohammed VI.
Comment imaginez-vous le Maroc de 2030 ?
La prévision futuriste est tellement difficile à envisager. L’économie marocaine comme celle d’autres pays d’ailleurs est insérée dans un écosystème global. Cet écosystème est le résultat de plusieurs forces. Le seul mot d’ordre est le changement. Le mérite ou le crédit à donner à ce gouvernement est de pouvoir structurer l’économie en se positionnant sur des secteurs d’activités stratégiques avec des objectifs précis (Énergies renouvelables, l’aéronautique, l’automobile, etc…). Sommes-nous capables de rester compétitifs à l’horizon 2030 ? Cette question doit être le souci principal de notre stratégie économique.
Quels sont les secteurs les plus prometteurs ?
Cette question trouve sa réponse au niveau du plan d’accélération industrielle. C’est le fondement même de la compétitivité de notre économie. Je prendrai deux exemples pour illustrer mes propos. Le secteur de l’automobile qui enregistre une forte progression sur le plan de la réalisation des objectifs et du développement d’un écosystème propre à la notion de l’automobile. Les réalisations au niveau de Tanger et de Kénitra témoignent d’une stratégie pour drainer les investisseurs et renforcer l’écosystème dans sa totalité. Le secteur des énergies renouvelables (ER) à terme permettra une réduction de la facture énergétique du Maroc et diminuera de facto notre dépendance énergétique. Le projet Noor à Ouarzazate est une belle illustration concrète de la stratégie du royaume à cet égard. Nous ne pouvons pas citer ces secteurs sans évoquer le taux d’intégration qui environne ces secteurs. Ce taux varie actuellement entre 60% et 75%. L’impact du taux d’intégration est énorme sur le développement social en se portant garant de la création des emplois directs et indirects. Maintenant, on ne va pas se voiler la face. Il faudra à mon sens passer de l’aspect quantitatif en chiffrant le degré d’attractivité et le taux d’intégration à un aspect qualitatif en favorisant le transfert de technologie et de la connaissance. Prenons le cas du secteur de l’automobile. Le Maroc ne produit pas des voitures. Ce sont les entreprises françaises qui produisent des voitures sur le sol marocain et c’est toute la différence. La réflexion doit être lancée sur l’aspect transfert du savoir et de la technologie aux ressources humaines marocaines. La pérennité des différents plans stratégiques du Maroc dépend forcément de cet aspect. Le rôle de l’université marocaine est primordial dans ce sens.
Quel est l’apport de cet ouvrage pour la communauté scientifique marocaine et pour les praticiens ?
Je vous remercie pour cette question qui me paraît, universitaire que je suis, importante. Au niveau de la communauté scientifique, cet ouvrage a le mérite d’être considéré comme un recueil d’informations disponible aux chercheurs toutes catégories confondues. Dans ce sens, l’ouvrage présente des statistiques, analyses des stratégies et des informations fortes et intéressantes pour ce public. Au niveau professionnel, l’ouvrage est destiné en premier lieu aux investisseurs pour donner une image réelle du secteur. Ce n’est pas un guide d’investissement mais tout simplement un support d’information pour affiner la compréhension de chaque secteur présenté dans l’ouvrage. Dans un souci de partage de l’information, l’ouvrage n’est pas en vente. Il est placé dans les différentes bibliothèques et université du royaume et est distribué gratuitement pour les différents acteurs de notre économie (administrations, gouvernements, CGEM, etc…). Je tiens par la même occasion à remercier l’Université Hassan II Casablanca d’avoir contribué financièrement à cette première édition de l’ouvrage. L’équipe est en train de réfléchir à la traduction de l’ouvrage en anglais afin de présenter notre économie à d’autres acteurs et plus de visibilité à l’international.