Chine-OMC : Plaidoyer contre le protectionnisme américain
La Chine vient de publier un livre blanc dans lequel elle liste ses réalisations depuis son adhésion à l’OMC en 2001. Elle souhaite s’ouvrir davantage sur l’extérieur à travers des facilités pour, notamment, créer des filiales autonomes, principalement dans l’industrie automobile. Le pays veut un ALE avec le Maroc qui soit précédé d’une étude de faisabilité pour mettre en confiance les entreprises locales.
La crise économique, aux allures de guerre commerciale, entre les États-Unis et la Chine a poussé cette dernière à agir pour contrecarrer le protectionnisme dont le président Donald Trump a fait montre depuis son arrivée à la Maison blanche. Dans ce sens, le bureau de l’information du Conseil des affaires d’État de Chine a publié, le 28 juin dernier, un livre blanc intitulé «la Chine et l’Organisation mondiale du commerce». Ce document recense les avancées en termes d’ouverture économique de la Chine depuis son intégration à l’OMC en 2001.
Pour expliquer l’opportunité de ce livre blanc, une conférence a été organisée, hier à Rabat, par l’ambassade de Chine. D’entrée de jeu, Jing Ning, conseiller économique et commercial de l’ambassade, annonce la couleur en affirmant que sur les 17 dernières années, la Chine a mené des réformes économiques ayant considérablement amélioré le climat des affaires et l’attractivité du pays. Le livre blanc est une contre-offensive de type soft power qui montre tout le chemin que le pays a parcouru pour s’ouvrir complètement à l’économie mondiale, prouvant que le socialisme peut se familiariser avec -voire apprivoiser- l’économie de marché.
«Notre position quant au soutien de l’OMC est inébranlable, et nous nous opposons à tous les actes unilatéraux ou politiques protectionnistes en rapport avec le commerce international», a souligné Ning. Il en veut pour preuve les engagements respectés en matière de baisse des droits de douane sur les marchandises, qui sont passés de 15,3 en 2001 à 9,8% en 2010. Il a ajouté en guise d’illustration que le droit moyen sur les produits industriels a baissé de 14,8 à 8,9%, et celui des produits agricoles de 23,2 à 15,2%, soit le quart du droit moyen mondial. Dans le domaine du commerce de services, la Chine, en bon élève de l’OMC, aura réalisé toutes ses promesses en 2007. Pas moins de 100 filiales d’entreprises mondiales dans le secteur des services ont élu domicile en Chine, sachant qu’un investisseur étranger a aujourd’hui le droit de choisir parmi 54 sous-secteurs dont les services banquiers, les assurances, le transport ou encore la logistique.
Dans le domaine de la construction automobile, la Chine veut faire tomber toutes les barrières durant les 5 prochaines années, permettant ainsi aux constructeurs étrangers de s’implanter sans être obligés de passer par des joint-ventures. Avant 2001, les droits de douane sur les voitures importées en Chine était de 100%, et il est passé graduellement à 25% non sans laisser de séquelles sur l’industrie locale, engendrant la faillite de plusieurs entreprises, selon Ning. Dans cette même dynamique d’ouverture, la Chine organisera pour la première fois, du 5 au 10 novembre prochain à Shanghai, un Salon mondial de l’importation. Clin d’œil à la politique de Trump, le livre blanc explique que depuis l’entrée du pays à l’OMC, les importations chinoises augmentent de 13,5% chaque année, soit 6,9% de plus que le reste du monde. Il est aujourd’hui le deuxième pays importateur du monde. Sa participation à la croissance mondiale est aujourd’hui de 30%, ce qui en fait un véritable moteur de l’économie mondiale. À ce sujet, les chiffres sont éloquents: les importations de services ont fait un bond de 39 milliards de dollars à 467 milliards de dollars entre 2001 et 2017. Plus encore, la Chine a signé 16 accords de libre-échange avec 24 pays dans le monde. Et les négociations sont en cours avec les Îles Maurice pour la conclusion d’un ALE qui sera, selon Ning, le premier en Afrique. Quid des relations économiques entre le Maroc et la Chine ? Selon Ning, il y a encore du chemin à faire. Un mémorandum d’entente a été signé en novembre 2017, mais la Chine veut un ALE à l’image des 56 pays avec lesquels le Maroc s’est lié d’un accord similaire.
«Il y a une réelle volonté de la part de la Chine de s’engager dans des négociations avec le Maroc dans la perspective d’un ALE», confie Ning. Mais il comprend aussi que des industries et des entreprises locales aient peur du choc qu’un ALE puisse provoquer. C’est la raison pour laquelle le responsable propose de commencer par une étude de faisabilité pour défricher le terrain à tout éventuel accord du genre avec le Maroc. Aujourd’hui, les échanges entre les deux pays se portent plutôt bien. Leur volume a atteint 3,8 milliards de dollars en 2017, avec une hausse de 5,3%. Les importations chinoises en provenance du Maroc ont totalisé 650 millions de dollars, assorties d’une progression de 17,4%.
La Chine fera preuve de résilience
Les États-Unis ont mis en place des droits de douane de 25% sur l’ensemble des produits provenant de Chine, ce qui correspond à 34 milliards de dollars. Réaction normale, la république a été obligée de faire pareil. Mais le gouvernement de Trump a menacé de revoir son imposition initiale à la hausse (de 10%), portant ainsi le montant des droits de douane sur la Chine à 100 milliards de dollars. Pour cette dernière, il s’agit d’une déclaration de guerre à son encontre, mais aussi à l’encontre du monde. Selon le FMI, la nouvelle politique protectionniste américaine risque de faire baisser de 5% le commerce internationale en seulement 10 ans, ce qui risque d’impacter négativement le niveau de vie dans le monde. Toutefois, selon Jing Ning, conseiller économique et commercial de l’ambassade de Chine à Rabat, son pays fera preuve de résilience en se tournant vers un marché intérieur de plus en plus dynamique, tout en diversifiant ses relations économiques, principalement avec les pays africains.