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Perspectives : Optimisme prudent pour 2017

Campagne agricole prometteuse, entrée en vigueur du décret sur les délais de paiement, lancement des banques participatives, Charte de l’investissement…Plusieurs bonnes nouvelles font dire aux opérateurs économiques que la nouvelle année sera meilleure. 

Sous quels auspices s’annonce 2017 ? Après une année en berne, les opérateurs économiques nourrissent de grands espoirs sur la nouvelle année pour redresser la barre et renouer avec la croissance. Campagne agricole faible, échéances électorales qui ont ralenti (et continue de ralentir) la roue de l’économie…plusieurs facteurs ont rendu l’année écoulée difficile. Résultat, une chute drastique du taux de croissance, puisque la Banque centrale a revu à la baisse ses prévisions et table, en effet, sur 1,2% pour 2016. Donc, l’année que nous entamons sera à coup sûr mieux que sa devancière. Le wali de Bank Al-Maghrib prédit une accélération de la croissance qui devrait atteindre 4,2%. Les opérateurs économiques sondés par Les Inspirations ÉCO sont, de leur côté, optimistes dans leur majorité. Pour certains, il y a plusieurs indicateurs qui laissent espérer une bonne année, mais il n’en demeure pas moins qu’il y a aussi des incertitudes qui font craindre un effet négatif.

Bonnes nouvelles ?
Au niveau international, la reprise de l’économie mondiale se poursuit, tirée par l’amélioration de l’activité dans les principaux pays avancés. «Elle reste toutefois lente et entourée de fortes incertitudes liées notamment aux modalités de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne et à l’orientation future des politiques commerciale et budgétaire des États-Unis», tempère la Banque centrale. Dans la Zone euro, la croissance devrait se situer à 1,6% en 2016 avant de progresser à 1,8% en 2017. «Cela veut dire que la demande adressée au Maroc, de son principal partenaire économique, devrait stagner ou progresser légèrement», commente Hakim Marrakchi, vice-président de la CGEM. Sur les marchés des matières premières, le prix du pétrole a enregistré une hausse sensible et s’est stabilisé, par la suite, autour de 54 $/baril. Il devrait augmenter à 51,6 $/baril en 2017.

Dans tous les cas, on est loin de la hausse spectaculaire, enregistrée il y a quelques années avec un prix du baril qui culmine à plus de 100 dollars. Autre bonne nouvelle, et non des moindres, l’entrée en vigueur, à partir du 1er janvier 2017, du décret sur les délais de paiement et les intérêts moratoires des commandes publiques. Certes, seules les transactions et marchés conclus à partir de cette date sont concernés par ce nouveau dispositif, mais cela est de nature à rassurer les opérateurs économiques quant à l’avenir.

Les retards de paiement de certaines administrations et entreprises publiques donnent, en effet, du fil à retordre aux entreprises privées. Désormais, l’ordonnancement et le paiement des marchés publics doit s’effectuer dans un délai maximum de 60 jours, contre 90 jours auparavant. Au-delà de l’échéance légale, les entreprises peuvent appliquer des intérêts moratoires (le taux équivaut au taux moyen pondéré des Bons du Trésor à 3 mois émis par adjudication le trimestre précédent et majoré de 1 point). Toujours sur le volet du financement, les banques participatives devraient commencer très prochainement. C’est en tout cas ce que promet Abdellatif Jouahri. «On fait de notre mieux pour délivrer les agréments et un démarrage de ces banques avant la fin de l’année 2016, mais il y a encore des points à régler», avait-il indiqué, lors du point de presse qui a suivi le dernier Conseil de Bank Al-Maghrib.

Le Comité des crédits et des établissements financiers a examiné toutes les demandes déposées et a demandé des documents supplémentaires sur certains volets (contrat, publicité…). «La balle est dans le camp des concernés qui doivent faire vite», explique Jouahri. Enfin, le dernier changement, qui devrait s’opérer, dès le deuxième semestre de l’année, est relatif à la flexibilité du change. «Le Fonds monétaire international a estimé que le Maroc est prêt et peut y aller en début 2017. Mais j’ai opposé une fin de non-recevoir pour décaler de 6 mois. L’introduction de la flexibilité du change devrait avoir lieu au deuxième semestre 2017», confirme le wali de la Banque centrale.

Sur ce dossier, Jouahri joue la prudence pour négocier ce virage avec succès. «Notre problème est à la fois celui de la formation, de l’information et de la sensibilisation. Départements gouvernementaux, administrations, opérateurs économiques, banques…toutes les parties prenantes doivent être prêtes avant de sauter le pas», indique-t-il. Et d’ajouter : «On ne plonge pas dans un chantier aussi crucial sans prendre toutes les précautions. Soutenabilité budgétaire à moyen terme, système financier résilient, réserves de change importantes…ces prérequis doivent être valables», insiste Jouahri. Du côté des opérateurs économiques l’on reste prudent : «Dans notre secteur, on fait beaucoup d’importation. Il ne faut pas que la libéralisation des changes se traduise par une dévaluation du dirham, ce qui pourrait impacter négativement notre activité, comme d’ailleurs toutes les filières qui importent», explique Abderrahim Souiri, président de la Fédération des industries métallurgiques, mécaniques et électromécaniques (FIMME). 

 

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Ahmed Ouayach, président de la Confédération marocaine de l’agriculture et du développement rural (Comader)

Agriculture
Nous entamons cette année 2017 avec un grand optimisme grâce à l’arrivée des pluies qui a permis de marquer une rupture avec la campagne passée, d’autant plus que les réserves en eau se sont nettement améliorées. En cette fin d’année 2016, l’état des pâturages et du cheptel est satisfaisant et nous espérons que cela se poursuivra durant les prochains mois. Nous nous attendons à une grande production de céréales qui sera bénéfique pour nos échanges extérieurs. Cela veut dire que l’on importera moins et que l’on aura donc une bonne économie de devise par rapport aux données de l’année passée. Nous réaliserons également des économies sur la consommation animale et sur les coûts de production de lait et de viande. Pour l’export, nous espérons que nos expéditions continueront de croître tant en quantité qu’en prix et en qualité. En fin de compte, si la bonne commercialisation fait défaut, nous n’aurons pas transformé l’essai. Sur le plan stratégique, l’arrivée du nouveau gouvernement permettra la poursuite de l’exécution du Plan Maroc vert (PMV) avec notamment le lancement du plan de développement rural et l’intégration de l’agro-industrie pour une meilleure valorisation de la production agricole

Abdellatif Kabbaj, président de la Confédération nationale du tourisme (CNT)

Tourisme
Nous constatons malheureusement que notre secteur n’avance pas. Nous en sommes toujours à 10 millions de touristes et cela n’a pas changé malgré tous les efforts consentis. Le premier problème auquel nous devons faire face, c’est l’image des pays du Maghreb dans les marchés touristiques traditionnels. Sur ce point, nous devons mieux communiquer sur la stabilité et la sécurité du pays. La deuxième difficulté, c’est celle de l’aérien. Un point sur lequel l’Office national marocain du tourisme (ONMT) travaille en vue d’améliorer les dessertes. Ce que l’on sait aujourd’hui, c’est que pour rentabiliser des établissements touristiques, nous devons nous situer à un taux d’occupation de 65%. Or, nous ne dépassons pas aujourd’hui un taux de 45% dans des destinations comme Marrakech. À cause du recul des marchés traditionnels comme la France, l’Espagne ou le Royaume-Uni, nous continuons à stagner. Cela étant dit, nous sommes très confiants concernant 2017 qui, nous l’espérons, connaîtra une amélioration de l’activité. Un objectif que l’on ne pourra atteindre sans mettre l’accent sur l’aérien et un budget suffisant pour promouvoir la destination. À ce titre, nous pensons qu’il faut miser sur le balnéaire. C’est le cas dans les régions du Sud, notamment Agadir et Tantan. Si nous arrivons à installer 400.000 lits, nous pourrons facilement aller vers 20 millions de touristes. Nous n’avons pas intérêt à trop investir sur le Nord, mais plutôt à capitaliser sur le Sud où nous disposons d’une meilleure saisonnalité. Par ailleurs, si nous voulons continuer à développer le tourisme, nous avons intérêt à aider des opérateurs nationaux à se développer à l’étranger. Il nous serait bénéfique de disposer de grands tour-opérateurs qui s’implantent un peu partout dans nos marchés cibles. L’administration doit trouver des moyens de financement pour ces Marocains qui veulent s’implanter à l’étranger. Ce n’est pas seulement dans les grands salons que l’on peut attirer des clients

Iqbal Kettani, directeur général de la Fédération nationale des promoteurs immobiliers (FNPI)

Immobilier   
Au vu des chiffres dont nous disposons, nous constatons des prémices de relance, surtout en ce qui concerne la production de ciments, et les derniers chiffres concernant les taux de crédit et de financement sont encourageants. Les promoteurs émettent toutefois des réserves concernant la bonne tenue du secteur en 2017. En cause, les problèmes de réglementation qui inquiètent de plus en plus les opérateurs. La loi 66-12 telle qu’adoptée actuellement pourrait poser des problèmes concernant l’état d’avancement des chantiers, sans oublier les mesures administratives qui posent souvent des difficultés, y compris sur le plan fiscal. Les opérateurs sont décidés à accompagner la politique publique en matière de réduction du déficit, mais ces mesures sont souvent sources de blocage pour nous. Les pistes de croissance se situent surtout dans le segment du moyen standing et du logement pour la classe moyenne. Il est grand temps de lancer ces produits et ce n’est que grâce à de nouvelles mesures urbanistiques que l’on y arrivera. Ces mesures permettront d’introduire plus de verticalité, autorisant la construction en hauteur. Pour le segment du logement social, si les conditions de financement -notamment du Fogarim- sont relancées, le secteur continuera à bien se tenir. Quant au haut standing, celui-ci ne représente que 5% du marché et continuera à obéir à la règle de l’offre et de la demande.

Karim Tazi, président de l’Association marocaine des industries du textile et de l’habillement (AMITH)

Textile   
Nous vivons une vraie contradiction dans notre secteur, entre un marché à l’export performant et un marché national qui souffre. Notre export aujourd’hui est concurrentiel notamment en Europe où nous réalisons la 2e meilleure progression de croissance dans le monde après le Vietnam. Un exploit rendu possible grâce aux opportunités offertes par les écosystèmes industriels. Malheureusement, c’est tout le contraire que nous vivons sur le marché local qui souffre d’une contrebande massive et d’une concurrence déloyale de la part d’enseignes étrangères, notamment turques. Nous sommes actuellement dans une phase d’attente liée au retard sur la formation du nouveau gouvernement. Le prochain Exécutif devra notamment activer les moyens d’accompagnement pour la mise en œuvre des projets lancés dans le cadre des écosystèmes industriels. Sur le plan de l’export, la dynamique devrait se poursuivre grâce au Plan d’accélération industrielle, à condition que l’Europe ne soit pas affectée par une crise de la consommation. Nous avons de bonnes raisons de croire que cette dynamique se poursuivra. De notre côté, nous devons poursuivre l’exécution des projets afin d’encourager la croissance de nos exportations. Or, toute la dynamique de l’export ne serait bénéfique sans que le marché local prenne part à l’effort. Nous préparons actuellement, dans le cadre des écosystèmes, l’exécution de plusieurs projets. Pas moins d’une centaine sont prévus, ce qui est supérieur au cumul des cinq dernières années. Sur le plan local, notre priorité sera de rendre plus accessible le marché domestique. Nous y arriverons dans un premier temps en nous attaquant à la contrebande. Nous ne pouvons vraisemblablement pas faire disparaître cette pratique, mais nous pouvons au moins la freiner. Par ailleurs, nous étudions actuellement l’opportunité d’une démarche antidumping contre les importations turques. Si toutes les conditions sont réunies – ce que nous croyons fortement – nous ne nous interdirons aucune démarche réglementaire

Tajeddine Bennis, président du Collège industrie de l’Association marocaine pour l’industrie et le commerce automobile (AMICA)
Automobile   

L’année 2016 s’est parfaitement inscrite dans ce qui était attendu avec un chiffre d’affaires à 60 MMDH. De nombreux équipementiers ont signé des contrats d’investissements au Maroc durant cette année, ce qui nous a permis de créer pas moins de 41.000 emplois sur les contrats engagés depuis 2014. D’autres projets sont aujourd’hui en cours de finalisation avec notamment, à la clé, la construction de nouvelles usines. L’année 2017 connaîtra d’ailleurs le démarrage d’une vingtaine d’usines notamment à Tanger et à Meknès. De nouveaux équipementiers et opérateurs devraient démarrer leurs activités, notamment dans des métiers pionniers et les nouvelles technologies. De nouvelles opérations, du secteur de l’amortissement à l’outillage en passant par la connectique, verront bientôt le jour. 2017 s’inscrira donc dans la continuité, notamment suite à la mise en place de nouveaux fournisseurs à Kénitra, Meknès et Tanger. Une vraie dynamique sera impulsée par l’usine de Peugeot PSA et le nouvel écosystème Renault. Nous disposons d’une bonne visibilité grâce à ce qui est déjà tracé dans la feuille de route du Plan d’accélération industrielle. 

Saloua Karkri-Belqziz, présidente de la Fédération marocaine des technologies de l’information, des télécommunications et de l’offshoring (APEBI)

Nouvelles technologies et offshoring   
2016 était porteuse d’excellentes nouvelles pour notre secteur. Nous avons pu concrétiser deux contrats-programmes concernant, respectivement, l’offshoring et la stratégie Maroc Digital. Toutefois, le retard sur la formation du nouveau gouvernement est inquiétant. Nous attendons notamment la mise en place de nouvelles structures chargées de l’application et du suivi de ces stratégies. Il s’agit notamment d’activer l’Agence pour l’économie numérique ainsi que la cellule d’animation pour le secteur de l’offshoring. Seuls ces organes permettront d’opérationnaliser les stratégies validées. Or, nous devons disposer d’une loi des finances afin de pouvoir débloquer ces mesures. En attendant, le secteur continue de souffrir. Tout notre espoir repose sur l’année 2017. Nous craignons une perte sur le premier semestre de l’année 2017 en raison des retards sur l’investissement public. Les difficultés du secteur ont démarré en 2014 et se sont poursuivis jusqu’à cette année 2016. Aujourd’hui, certaines de nos entreprises affiliées ne sont même pas capables de payer leurs cotisations, c’est dire ô combien la situation est inquiétante chez certains opérateurs. Nous sommes également très affectés par la problématique des délais de paiement, ce qui se traduit par un taux de défaillance d’entreprises important. D’après ce que l’on a pu constater à l’APEBI, 10 à 15% des entreprises ont connu des défaillances sur les 3 à 4 dernières années seulement. ­ 

Abdelhamid Souiri, président de la Fédération des industries métallurgiques, mécaniques et électromécaniques (FIMME)

Sidérurgie
Nous espérons une reprise de l’activité l’année prochaine et, personnellement, j’estime que les grands projets lancés et les mesures prises dans le cadre du projet de loi de finances 2017, notamment le budget alloué à la commande publique, sont de bon augure. En tant qu’industriels, l’on attend avec impatience le vote de la Charte de l’investissement qui devrait donner un vrai coup de boost l’industrie, en encourageant les investissements dans ce secteur. Cela dit, il y a quelques changements attendus l’année prochaine qu’il faudra suivre de très près. Il en est ainsi, à titre d’exemple, de la flexibilité des changes. Dans notre secteur, on fait beaucoup d’importation. Il ne faut pas que la libéralisation des changes se traduise par une dévaluation du dirham, ce qui pourrait impacter négativement notre activité, comme d’ailleurs toutes les filières qui importent.

Hakim Marrakchi, vice-président de la CGEM

CGEM
On s’attend à ce que 2017 soit un peu mieux que sa devancière. En tout cas, c’est ce que laissent espérer plusieurs indicateurs. La campagne agricole s’annonce prometteuse ; le prix du pétrole ne devrait pas connaître une grande hausse ; il y a un effort des pouvoirs publics à travers notamment les mesures de la loi de Finances, même si cela n’est pas suffisant pour une vraie relance de l’économie…En revanche, la conjoncture internationale demeure morose. À la lumière de l’évolution des économies des pays partenaires du Maroc, l’on ne s’attend pas à une forte demande adressée au Maroc. La croissance en Europe reprend en effet d’une manière fragile. Côté entreprises, le problème du financement, et plus particulièrement des délais de paiement, continuera de donner du fil à retordre aux opérateurs économiques.   

El Mouloudi Benhamane, président de la Fédération nationale du BTP

BTP
La baisse d’activité se poursuit et se confirme pour fin 2016 ; tout permet de penser que la situation risque de s’aggraver pour 2017. En effet, nous ne pensons pas que la situation va s’améliorer, car la baisse visible ou déguisée de la commande publique est une tendance lourde qui va perdurer avec tous ses effets néfastes. En effet, rapportée au PIB, la commande publique est en baisse depuis 2012 et quand on sait que les ressources financières publiques se raréfient, il est clair que la tendance baissière continuera. Dans mon discours, lors de la séance plénière de notre Assemblée générale du 13 octobre 2016 dernier, j’ai dressé un tableau parlant de la situation très difficile que traverse notre secteur pourtant vital pour l’économie du pays, par sa contribution majeure à la création des richesses et des emplois et à la construction du pays. En dépit de son importance, notre activité a souffert et continue de souffrir de cette situation. 



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