La SAMIR liquidée !
Une page de l’industrie nationale se tourne. La Société anonyme de l’industrie du raffinage (SAMIR), unique entreprise de raffinage du pays sera liquidée. L’avenir du secteur et des salariés est incertain.
Sans surprise, le Tribunal de commerce de Casablanca (TCC) a confirmé, le 1er juin, le jugement en première instance de la liquidation judiciaire de la société la SAMIR. Le juge a estimé que la situation de l’entreprise est «irrémédiablement compromise», en se référant à l’article 619 du Code de commerce.
À la recherche d’un repreneur
C’est la fin d’une époque et le début d’un long processus de «dessaisissement» des créances de l’entreprise. Mohammed Karimi, le syndic nommé par le tribunal, est à pied d’œuvre pour relancer la production de la raffinerie. Le syndic est en cours d’élaboration d’un cahier des charges pour les futurs repreneurs avec une évaluation de l’entreprise. Les salariés de la SAMIR s’accrochent à l’espoir de l’arrivée d’un ou plusieurs repreneurs. Tout ce processus devrait prendre une année. La reprise, ou pas, de l’activité devrait donner des indications sur la capacité de la raffinerie à retrouver ce fameux repreneur. L’article 620 du Code de commerce est explicite : «Lorsque l’intérêt général ou l’intérêt des créanciers nécessite la continuation de l’activité de l’entreprise soumise à liquidation judiciaire, le tribunal peut autoriser cette continuation pour une durée qu’il fixe, soit d’office soit à la demande du syndic ou du procureur du roi». En première instance, le tribunal avait fixé la durée de la reprise pour trois mois. Cette reprise devrait prendre fin le 21 juin prochain. La raffinerie pourra-t-elle redémarrer d’ici deux semaines ?
Les créanciers impatients
À 9h30, le jugement du TCC est tombé comme un couperet. Les avocats de Mohammed Al Amoudi, actionnaire majoritaire de la SAMIR miroitent encore la possibilité d’un nouveau recours au niveau de la Cour de cassation. «Corral peut toujours contester ce jugement. Pour le moment, cette décision n’a pas été prise», explique Me Abdelkabir Tabih, avocat d’Al Amoudi, dans une déclaration à l’agence Reuters. La décision du 1er juin clôture, au moins pour le moment, le processus judiciaire. Tout démarre en novembre 2015, Al Amoudi demande la protection judiciaire. En novembre 2015, le TCC désigne trois experts pour évaluer la situation de l’entreprise. Leur verdict : «La situation financière de la SAMIR est compromise». Cette conclusion est justifiée par le niveau d’endettement de 45 milliards DH.
Le 21 mars 2016, le jugement en première instance annonce la liquidation de l’entreprise. Les créanciers, l’État en tête, veulent recouvrir leurs dettes. Il s’agit de 20 milliards DH de prêts bancaires, d’importateurs au Maroc et à l’étranger, 13 milliards de la douane et 7 milliards auprès de divers prestataires et fournisseurs. D’ailleurs, les principaux créanciers s’opposent à la piste du redressement judiciaire. Les créanciers s’appuient sur l’article 623 du Code de commerce : «Des unités de production composées de tout ou partie de l’actif mobilier ou immobilier peuvent faire l’objet d’une cession globale». Dans ce cas, le syndic suscite des offres d’acquisition et fixe le délai pendant lequel elles sont reçues. Pour leur part, les syndicats de l’entreprise n’ont pas de visibilité sur l’avenir de l’entreprise et leurs emplois. «Nous espérions une autre décision que celle prise aujourd’hui pour mieux préserver le droit des salariés», affirme une source au sein de la FDT-Samir. Les employés ont reçu leurs salaires du mois de mai amputés de la prime de ramadan de 3.000 DH.
Dans un communiqué de la CDT-Samir, le syndicat insiste sur «le retour de la production de la raffinerie». Ce retour de la production doit s’accompagner de plusieurs mesures. En premier lieu, «la fin de toutes les formes de mauvaise gestion». En deuxième lieu, «le retour de l’État dans le capital». En troisième lieu, «la régulation de l’approvisionnement du marché national des hydrocarbures». Enfin, ce syndicat appelle à l’ouverture d’une «enquête pour clarifier les responsabilités dans cette crise». Du point de vue de ce syndicat, ces mesures sont «les seules possibles pour mettre à niveau l’industrie nationale de raffinage du pétrole et lui assurer un rôle dans l’économie du pays».