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Plan d’accélération industrielle : Elalamy fait le point

Destruction d’emplois, recul de la valeur ajoutée du secteur secondaire, désindustrialisation … les critiques se multiplient depuis plusieurs années à l’encontre de la stratégie industrielle du royaume. Ces questions ont été étudiées lors de la 22e rencontre du Centre marocain de conjoncture (CMC), tenue mercredi dernier à Casablanca, durant laquelle ont été explorées les voies de l’émergence pour le Maroc à l’horizon 2030.

Faut-il croire les chiffres ?
«Les chiffres sont têtus», lance le ministre de l’Industrie, Moulay Hafid Elalamy. «Je crois au concret, aux contrats que nous avons signés et aux emplois que nous avons créés», précise le ministre. La question des statistiques de l’industrie ont été au centre des débats de cette 22e rencontre du CMC. «Les données de structure dont nous disposons datent toutes de 2007, c’est-à-dire avant le lancement de toutes les stratégies du Maroc», précise Mohamed Chafiki, directeur des études et des prévisions financières au ministère de l’Économie et des finances. «Toute la question est de savoir comment nous pouvons développer de nouvelles études de structures qui nous permettront de prendre en compte les véritables dynamiques qui sont en cours dans le pays», s’interroge Chafiki. La présence du ministre de l’Industrie, du commerce, de l’investissement et de l’économie numérique a été particulièrement remarquée. L’officiel marocain a tenu à apporter un éclairage nouveau sur la «réalité du terrain» de l’industrie, loin des chiffres officiels «approximatifs».

23% de part de l’industrie dans le PIB en 2020
«Le retard du Maroc est principalement industriel. Nous constatons ces dernières années un repli du secteur secondaire, une désindustrialisation qui affecte une grande partie de nos industries traditionnelles», regrette le président du CMC. Une vision à laquelle n’adhère pas entièrement le ministre de l’Industrie. Ce dernier affirme que «la désindustrialisation a touché tous les pays et que nous avons reçu un impact moins important que celui encaissé par d’autres pays». L’indicateur majeur, à savoir la part de l’industrie dans le PIB, est aujourd’hui de 14%. «C’est aujourd’hui la situation dans laquelle se trouvent certains pays très développés», commente Moulay Hafid Elalamy. Le ministre de l’Industrie promet désormais 23% de part de l’industrie dans le PIB pour 2020. Le détail de cette nouvelle configuration de l’industrie dans l’économie sera révélé durant les prochaines Assises de l’industrie, dont la date n’a pas encore été annoncée.

Les ALE, une arme de compétitivité
Il est loin, le temps où l’on critiquait les accords de libre-échange à tout va. Aujourd’hui, les ALE sont plutôt perçus comme un atout majeur à faire valoir dans la course à la compétitivité. «Nous considérons aujourd’hui qu’il s’agit d’une nouvelle arme qu’il faudra exploiter. Nous devons avoir une économie compétitive tournée vers l’export», souligne Habib El Malki. Un point de vue que semble partager le ministre de l’Industrie qui avoue s’être opposé, durant son mandat au sein du patronat, à ces accords, mais qu’il considère aujourd’hui comme un attrait majeur des investissements étrangers. «C’est grâce à ces ALE que nous pouvons intéresser des pays comme la Chine qui viennent investir au Maroc comme plateforme industrielle vers 51 pays», affirme Moulay Hafid Elalamy, qui rappelle que la balance commerciale est en constante amélioration grâce notamment à l’amélioration des exportations de l’automobile et de l’aéronautique, à la résilience des phosphates et au recul des importations grâce notamment à une stratégie de protection commerciale plus intransigeante.

Le Maroc protectionniste ?
La nouvelle stratégie de commerce extérieur du Maroc a essuyé plusieurs critiques dès son adoption fin 2013, y compris de la part de nos partenaires commerciaux dont les représentations diplomatiques ont rapidement soulevé le risque de protectionnisme. Pour le ministre de l’Industrie, «Le Maroc a été trop gentil avec ses partenaires, au-delà de ce qui est acceptable». Dorénavant, le royaume n’hésite plus à activer ses mesures de défense commerciale, dès lors qu’un dumping est avéré. «Nous sommes déjà à la dixième enquête anti-dumping et nous n’entendons plus nos partenaires se plaindre», précise le ministre. Moulay Hafid Elalamy affirme d’ailleurs que le Maroc fera jouer désormais pleinement les règles de l’OMC, «ce qui jouera à la fois en notre faveur et en notre défaveur». L’officiel marocain reste toutefois prudent, estimant qu’il subsiste «des trous dans la raquette de l’OMC» favorisant les pays riches au détriment des pays en développement, et que l’activation de ces mesures prenait beaucoup trop de temps pour permettre réellement de sauvegarder nos industries.

Un recueil de l’emploi grâce aux écosystèmes
L’adéquation entre formation et besoin des entreprises continue de poser problème. «Nous avons continué à former des chômeurs. Nous avons décidé de ce qui était du goût de l’entreprise sans savoir si cela répondait réellement à ses besoins», regrette le ministre. La démarche du département de l’Industrie, dans le cadre de la stratégie d’accélération industrielle, a consisté à déterminer, grâce à la quarantaine d’écosystèmes lancés avec différents secteurs et filières industrielles, les vrais besoins des entreprises. «Résultat : nous avons élaboré un vrai recueil de l’emploi avec une grande précision en termes du besoin des industriels par région avec des échéances précises», affirme Moulay Hafid Elalamy. Un recueil qui permettra d’agir comme une véritable boussole dans le cadre de la formation professionnelle.

Automobile: 50 MMDH de VA sur les pièces détachées
Pas de doute, l’export automobile connaît un bel essor. Depuis 2013, nous sommes passés de 32 MMDH d’exportations, à près de 50 MMDH en 2015. «Nous atteindrons les 100 MMDH en 2020», promet Moulay Hafid Elalamy, qui affirme que cet objectif est quasi-assuré, grâce à la signature des récents contrats avec Renault et Peugeot PSA. «Nous avons 2 MMDH d’achats obligatoires de pièces détachées par Renault, 1 MM d’euros chez PSA et 600 millions d’euros chez Ford». Avec un taux d’intégration prévisionnel de 65% dans les pièces détachées, le Maroc devrait atteindre 50 MMDH de valeur ajoutée industrielle, dans le secteur, à l’horizon 2020.


 

Bientôt 7,3% de croissance ?
7,3% de croissance dans le PIB, est-ce seulement possible ? Le chiffre peut sembler astronomique, mais les experts du CMC estiment qu’il s’agit d’une piste théoriquement plausible. La recette miracle du centre dirigé par Habib El Malki est de passer à une modèle de croissance basé sur la notion de «croissance potentielle». «Concrètement, il s’agit de mettre à profit toutes les forces de production disponibles et de prioriser l’industrie», explique Habib El Malki. Pour ce dernier, nous assistons à un essoufflement du modèle de croissance privilégié jusqu’ici. Alors que nous assistions à des niveaux de croissances aux alentours de 2,8% durant les années 90, marqués par 3 années de sécheresse successives, nous sommes passés au début des années 2000 à des taux de croissance allant jusqu’à 4,8%. Mais cette dynamique semble s’essouffler à partir de 2010 avec un retour à des taux de croissance à 3%. «Cette réalité marque une instabilité et une vulnérabilité de notre croissance économique», tranche El Malki, pour qui des changements structurels s’avèrent nécessaires afin d’instaurer une croissance moyennement forte mais régulière. L’industrie semble être la clé de voûte à ce niveau.



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