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Agriculture : Les pluies sauveront-elles la campagne ?

Les dernières pluies, inespérées, ont certes remonté le moral des agriculteurs. Elles n’ont cependant pas pu laver complètement le scepticisme qui s’installe, notamment quant à la réussite de la présente campagne agricole.

L’agriculture nationale est-elle sortie d’affaire? L’engouement dont font preuve les agriculteurs depuis les récentes clémences pluviométriques semblent le suggérer. Hro Abrou, à la tête de la direction de l’Office régional de mise en valeur de la région Souss-Massa (ORMVA/SM), fait partie de ceux qui gardent une position optimiste, malgré les craintes formulées -et en partie confirmées- quant au succès de la campagne agricole 2015-2016. Contacté par les Inspirations ÉCO, Abrou a fait part de sa confiance en la capacité des stocks au niveau des barrages de la région dont il a la charge, qui suffiraient à répondre aux besoins en irrigation de l’ensemble du périmètre labouré. Les dernières pluies ont certes réduit le besoin en approvisionnement (quoique légèrement); il n’en demeure pas moins que, face à la sécheresse prolongée, une stratégie avait été déployée à temps pour protéger les exploitations.

La région ne montrerait des signes d’essoufflement, des suites de la raréfaction des pluies, que si le phénomène se prolongeait sur plusieurs exercices. Le directeur de l’ORMVA/SM s’attend ainsi à une récolte aussi importante que celle réalisée une campagne plus tôt. Cependant, l’euphorie n’étant pas contagieuse, d’autres régions ainsi que des sous-secteurs se montrent beaucoup moins confiants et, surtout, beaucoup plus prudents quant à la concrétisation de l’hypothèse de la loi de Finances 2016, les 70 millions de quintaux en l’occurrence.

C’est le cas de la Direction régionale de l’agriculture de Dakhla-Oued Eddahab qui, pour palier le déficit pluviométrique, a eu recours à des mesures d’urgence des plus draconiennes afin de contrebalancer les effets catastrophiques escomptés, notamment au niveau de la partie littorale où le cumul n’a été que de quelques millimètres insignifiants. Un programme régional de lutte contre les retards de pluies qui consiste à approvisionner l’ensemble de la région en 1.600 tonnes d’orge subventionné à un prix fixé à 2 DH par kilogramme. La distribution de ces aides est assurée par le centre relais de proximité de la région.

Aussi, le transport de la denrée subventionnée est assuré par l’État, qui s’est également investi dans la distribution d’aides directes aux éleveurs bovins. Une aide plafonnée à 5 têtes par éleveur à raison de 200 DH par tête pendant trois mois. Parallèlement, et étant donné que l’élevage reste l’une des principales ressources de la région, l’abreuvement du cheptel fait l’objet d’une priorité régionale et sera assuré via un programme d’aménagement et d’équipement de 6 points d’eau au niveau des localités les plus achalandées, avec la mise à disposition des exploitants de 300 citernes souples, ainsi que 10 camions citernes. Par ailleurs, le ministère de l’Agriculture et de la pêche maritime, instigateur du programme, a pris la décision de généraliser l’expérience au niveau national, en approvisionnant pas moins de 145 points de vente en orge subventionnée, distribuée en 4 tranches jusqu’à fin mars, pour un volume total de 3,9 millions de quintaux.

Déjà, le secteur ressent les bienfaits de cette campagne d’aides qui a lourdement participé de la stabilité des prix des aliments de bétail au profit de quelque 30 millions de têtes, dont 19,2 millions d’ovins, 3,2 millions de bovins, 6,2 millions de caprins et 200.000 chameaux et dromadaires. C’est en grande partie ce qui explique la relative stabilité de la courbe du prix des viandes rouges par rapport à celles blanches. Pour sa part, la région de de Casablanca-Settat, dont le déficit potentiel a été estimé à 50% par les services du ministère de l’Agriculture, a bénéficié de 570.000 quintaux.

Le programme national aura coûté près de 4,5 MMDH, auxquels il faut ajouter 1,25 milliard en soutien aux cultures céréalières et printanières. Le royaume, qui assure traditionnellement 100% de ses besoins en viande, fruits et légumes, 82% de ses besoins en lait, 50% de ses besoins en sucre, 60% de ses besoins en céréales et 20% de ses besoins en huile, se trouve cette année dos au mur, et ce sont principalement les besoins en céréales qui se font le plus sentir. Preuve en est avec les importations en blé tendre en provenance de la France qui ont représenté 23% de ses exportations hors Europe. Pas moins de 235.000 tonnes de blé tendre ont, en effet, été acheminées afin de garantir les approvisionnements des marchés nationaux.

Dans le détail, entre juillet 2015 et janvier 2016, la France a écoulé quelque 518.000 tonnes de blé tendre à destination du marché marocain, ce qui équivaut à une hausse de 50% par rapport à la campagne précédente. Les records atteints durant le seul mois de janvier ont fait du Maroc le premier marché non-européen de la France. Une situation suffisamment incongrue pour faire le tri dans les priorités du gouvernement. Ce dernier se concentre en effet sur l’encadrement intensif de l’utilisation de l’eau qui sera assuré par des comités mixtes comprenant des représentants du ministère de l’Agriculture ainsi que ceux du département en charge de la ressource hydrique.

L’objectif étant de s’assurer que la productivité est boostée au maximum afin de survivre à la présente campagne et préparer le terrain en vue de la prochaine dans une optique de provisionnement contre le risque de persistance des aléas climatiques. Une posture rencognée quoiqu’ambitieuse puisqu’elle se fixe également pour objectif la maîtrise de la disponibilité des produits de consommation courante à des prix relativement maîtrisés.

L’exemple le plus probant restera celui de l’oignon, dont l’insuffisance en volume a obligé le pays à recourir à l’importation de cet aliment, notamment en provenance d’Espagne. Coutumier des 2 DH/kilogramme en moyenne, l’oignon a largement dépassé la barre des 15 DH. Une envolée que les professionnels n’attribuent pourtant qu’à hauteur de 20% aux importations.



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