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Conjoncture : une croissance prometteuse en dépit de vents contraires

Après une année 2024 marquée par des défis économiques, le Maroc entame 2025 avec des perspectives de croissance optimistes. Selon BKGR, le PIB pourrait atteindre 5% en 2025, soutenu par le dynamisme des secteurs non agricoles et l’attractivité des investissements. Pourtant, cette reprise reste fragile. Inflation en hausse, déficit commercial creusé, tensions budgétaires…, autant de signaux qui appellent à une vigilance accrue.

Alors que le Maroc amorce l’année 2025 avec des perspectives de croissance encourageantes, les tensions inflationnistes et les déséquilibres budgétaires rappellent que la reprise reste sous pression. Selon un rapport de BMCE Capital global research (BKGR), le PIB devrait enregistrer une progression de 3,3% en 2024 et 5% en 2025.

Cette dynamique repose principalement sur le secteur non agricole, alors que l’agriculture souffre d’une pluviométrie insuffisante.

Dans un contexte international marqué par des incertitudes géopolitiques et une volatilité des matières premières, le pays doit composer avec une inflation en hausse, un déficit budgétaire qui se creuse et un commerce extérieur sous tension. Pourtant, la résilience du marché financier couplée, à la bonne dynamique du tourisme et des IDE, offre des motifs d’optimisme.

Un rebond de la croissance freiné par l’inflation et les déficits
Si la croissance du PIB national devrait s’accélérer en 2025, l’inflation continue d’inquiéter. BKGR souligne une hausse des prix de 2% en glissement annuel et de 0,8% en mensuel à fin janvier 2025, une tendance qui risque d’éroder le pouvoir d’achat des ménages, en particulier durant ramadan, période traditionnellement marquée par une flambée des prix.

En parallèle, le déficit commercial s’est creusé de 13,3%, atteignant -24,5 milliards de dirhams (MMDH). Cette détérioration s’explique par le recul des exportations des deux piliers de l’économie marocaine : l’industrie automobile et les phosphates. Malgré une baisse des importations pétrolières, la balance commerciale peine à s’équilibrer.

Autre signal d’alerte, le déficit budgétaire se creuse à -3,9 MMDH contre un excédent de 2,3 milliards un an plus tôt. Cette situation s’explique par une hausse spectaculaire des dépenses ordinaires (+75,7%), notamment en raison des politiques sociales et des subventions allouées à certains secteurs clés. Certes, les recettes fiscales ont progressé de 25,3%, atteignant 32,3 milliards, mais cela ne suffit pas à compenser l’explosion des dépenses publiques.

Bourse : un risque d’essoufflement à surveiller
Malgré ce climat macroéconomique tendu, la Bourse de Casablanca affiche une performance exceptionnelle depuis le début de l’année. Le MASI a progressé de 13,20% YTD, tandis que le MASI 20 affiche une hausse de 14,06%. Le portefeuille BKGR se distingue particulièrement, avec une surperformance de 18,28% par rapport au MASI-RB (13,20%).

Cependant, un ralentissement semble s’amorcer en février, avec une progression plus modérée du MASI (2,93%) et un volume d’échanges en baisse avec 450 millions de dirhams (MDH) contre 571 millions un mois plus tôt. Les valeurs les plus performantes incluent Sonasid (43,30%), Itissalat Al-Maghrib (39%) et TGCC S.A (38,40%), tandis que LafargeHolcim Maroc affiche une contre-performance de -1,8%.

Cette évolution du marché financier traduit un regain d’intérêt des investisseurs, mais aussi une certaine prudence face aux incertitudes économiques.

Tourisme et IDE, des leviers de croissance solides
L’un des points positifs de ce début d’année réside dans la dynamique du secteur touristique, qui confirme son rôle moteur dans l’économie marocaine. Le nombre de visiteurs étrangers a bondi de +27% en janvier 2025, atteignant 1,2 million, et les recettes voyages progressent de 10,1% pour atteindre 8,8 MMDH.

Dans le même temps, les investissements directs étrangers (IDE) ont augmenté de +16,9%, atteignant 3,2 MMDH. Ces capitaux viennent renforcer les réserves de change, désormais estimées à 368 milliards (3,3% y-o-y), garantissant ainsi une relative stabilité financière au pays.

En revanche, les transferts des Marocains résidant à l’étranger (MRE) stagnent (+0,5%), ce qui pourrait ralentir la consommation intérieure, l’un des moteurs traditionnels de l’économie nationale.

Les défis à relever : emploi, consommation et tensions internationales
Si la croissance s’annonce dynamique, le marché de l’emploi reste un défi majeur. Le gouvernement ambitionne de ramener le taux de chômage à 9% d’ici 2030, en créant 1,45 million d’emplois pour un budget de 15 MMDH.

Un objectif ambitieux qui nécessitera une mobilisation accrue des secteurs en expansion, notamment les énergies renouvelables et l’industrie. La consommation intérieure pourrait également être affectée par la hausse des prix et la stagnation des revenus des MRE, ce qui pose un risque de ralentissement de l’activité dans les prochains mois.

Enfin, les tensions géopolitiques mondiales constituent un facteur d’incertitude. BKGR met en avant les divergences croissantes entre l’Europe et les États-Unis, notamment avec la politique protectionniste de la nouvelle administration Trump. De plus, la guerre en Ukraine et les menaces de taxation des produits européens pourraient impacter les exportations marocaines.

Une reprise sous conditions
Dans ce contexte économique contrasté, le Maroc se trouve à la croisée des chemins. La croissance est bien engagée, mais son maintien dépendra de plusieurs facteurs : le contrôle de l’inflation, la réduction des déficits, le renforcement de l’investissement et la résilience du marché financier.

BKGR insiste sur la nécessité d’un soutien accru aux secteurs porteurs, notamment le tourisme, les énergies renouvelables et l’industrie. Une stratégie ciblée pourrait permettre d’amortir les chocs extérieurs et de garantir une croissance plus équilibrée. Si les défis sont nombreux, le pays dispose d’atouts solides pour les relever.

La diversification économique, l’attractivité des IDE et la résilience du secteur financier constituent des leviers essentiels pour consolider la reprise. À condition d’adopter une approche prudente et proactive, afin de transformer cette reprise sous tension en une véritable dynamique de croissance durable.

Sanae Raqui / Les Inspirations ÉCO



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