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TotalEnergies : vers un transfert de la cotation à New York ?

Confronté à la réflexion de TotalEnergies quant au transfert de la cotation principale du groupe à New York, le ministre français de l’Economie et des Finances Bruno Le Maire a affirmé jeudi qu’il comptait se battre pour que ce déménagement de la Bourse de Paris «n’ait pas lieu».

«Je suis là pour faire en sorte que ça n’ait pas lieu, parce que je pense que c’est une décision qui est grave», a déclaré Bruno Le Maire sur BFMTV/RMC.

«Est-ce que l’intérêt suprême de la nation est de garder le siège social de Total en France et la cotation principale de Total en France? Oui, et donc je me battrai pour ça», a ajouté le ministre français des Finances. «Nous avons besoin de Total», a-t-il souligné, mentionnant le plafonnement à moins de 2 euros du litre du carburant dans ses stations françaises.

L’affaire est partie des déclarations surprises de Patrick Pouyanné à l’agence Bloomberg. Dans un entretien publié le 26 avril, le PDG de TotalEnergies avait dit réfléchir à une cotation principale à la Bourse de New York. Près de la moitié de l’actionnariat du géant français de l’énergie est désormais constituée d’actionnaires institutionnels (fonds de pension, gestionnaires d’actifs, assureurs…) nord-américains.

«Ce n’est pas une question d’émotion. C’est une question d’affaires», avait ajouté le dirigeant de l’entreprise, tout en assurant que le siège social de ce fleuron du CAC 40 resterait bien à Paris. Son argument principal: «une base d’actionnaires américains qui grossit», ce qui amène l’entreprise à s’interroger sur la façon de «donner accès plus facilement aux actions pour les investisseurs américains», a-t-il expliqué aux analystes, le 26 avril.

Les investisseurs européens frileux
Las du manque d’appétit des investisseurs européens pour le secteur pétrogazier, alors que le groupe estime investir beaucoup dans les énergies vertes, le PDG chercherait à se rapprocher des investisseurs américains moins contraints par des règles d’investissement durable.

«Les politiques au sens large ESG (environnement, social et de gouvernance, NDLR) en Europe ont plus de poids», a ainsi justifié le patron de TotalEnergies lundi devant des sénateurs français.

Le PDG observe que «la base d’actionnaires européens de TotalEnergies diminue, notamment la base française» qui a reculé de «7% au cours des quatre dernières années, largement à cause des réglementations, de la pression qui est faite sur eux». En filigrane, le patron pointe du doigt le changement en France du label Investissement socialement responsable (ISR), qui exclut désormais les entreprises exploitant du charbon ou des hydrocarbures non conventionnels, une mesure décidée par Bercy lui-même fin 2023.

Ahmed Ben Salem, analyste du groupe financier Oddo BHF, nuance ce point en indiquant que les fonds labellisés ISR représentaient 1,7% de l’actionnariat de TotalEnergies. Pendant que l’UE muscle sa réglementation pour flécher les investissements vers la transition écologique, aux États-Unis la pression de certains États, comme le Texas, pour ne pas délaisser les entreprises d’énergies fossiles a poussé de grands gérants d’actifs à abaisser leurs ambitions climatiques.

«Nous observons clairement plus d’appétit pour les actions d’entreprises des secteurs énergétique, pétrole et gaz du côté de l’Amérique du Nord qu’en Europe», a dit M. Pouyanné aux analystes.

Conséquence de ce manque d’appétit: une valorisation moins importante. TotalEnergies avance «exactement les mêmes résultats trimestriels qu’une entreprise comme Chevron». Le groupe énergétique américain est valorisé 300 milliards de dollars en Bourse, contre 175 milliards pour TotalEnergies.

En attendant l’UMC…
La faute au cloisonnement des marchés financiers en Europe, selon Bruno Le Maire, qui avait dans un premier temps estimé dimanche sur LCI qu’il fallait offrir à TotalEnergies «les moyens de se développer» en accélérant sur l’union des marchés de capitaux (UMC) dans l’UE. L’UMC permettrait d’augmenter la taille du marché boursier européen pour que les entreprises s’y financent davantage.

Ahmed Ben Salem n’est cependant pas convaincu des changements éventuels pour TotalEnergies: «Il faut des acheteurs sur le secteur, pas seulement des liquidités.»

La moindre valorisation de TotalEnergies «est aussi subie par les autres majors européennes», explique-t-il à l’AFP, citant l’exemple du britannique Shell qui «est dans la même réflexion» concernant une cotation principale à New York. Au Sénat, le patron n’a pas exclu de reconsidérer la question si «plus d’actionnaires européens (…) rachètent du TotalEnergies».

Sami Nemli Avec Agence / Les Inspirations ÉCO



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