Opinions

Guerre Hamas-Israël Sommet de la paix au Caire : pour un cessez-le-feu et l’annulation de l’opération terrestre israélienne sur Gaza

Par Jawad Kerdoudi
Président de l’ Institut marocain des relations internationales (IMRI).

L’Égypte a accueilli, samedi 21 octobre 2023, un sommet pour la paix au 15e jour de la guerre entre Israël et le mouvement palestinien Hamas. Le pays se veut en première ligne sur le conflit israélo-palestinien, parce qu’il a été le premier pays arabe à avoir signé la paix avec l’État hébreu en 1979, et qu’il contrôle, à Rafah, l’unique point de passage sur le monde de la bande de Gaza, en dehors d’Israël. Ont participé à ce sommet 30 pays, l’ONU, et trois organisations régionales : Ligue arabe, Union africaine et Union européenne. Les Chefs d’État et de gouvernement présents étaient ceux d’Égypte, Jordanie, Autorité palestinienne, Espagne, Italie. Les pays représentés par leurs ministres des Affaires étrangères respectifs étaient le Maroc, la France, la Grande-Bretagne et l’Allemagne. Y ont assisté également les représentants de l’Arabie Saoudite, la Russie, la Chine, le Japon, le Canada et les États-Unis. Le Roi de Jordanie Abdallah II a plaidé pour un cessez-le-feu immédiat, et a déploré que «les vies palestiniennes valaient moins que les vies israéliennes».

De son côté, le secrétaire général de l’ONU a déclaré qu’il faut agir maintenant pour mettre fin au cauchemar de la bande de Gaza qui est sous siège complet, et a besoin d’un acheminement d’aide massif. Trois filiales de l’ONU, à savoir l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le Programme alimentaire mondial (PAM), et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) ont qualifié la situation humanitaire à Gaza de catastrophique. Seuls 20 camions ont été autorisés à y entrer par le point de passage de Rafah, alors qu’il en faut 100 par jour pour alimenter et soigner la population de l’enclave qui s’élève à 2,4 millions de personnes.

Le premier ministre espagnol Pedro Sanchez a dit qu’il faut éviter une crise régionale, alors que le président Mahmoud Abbas a demandé la fin de l’occupation des territoires palestiniens par Israël, affirmant que les Gazaouis ne partiront pas, afin d’éviter une nouvelle «Nakba» (catastrophe) comme celle de 1948 qui a obligé 760.000 Palestiniens à quitter leur pays. Le représentant de la Turquie a dénoncé l’aide militaire considérable accordée à Israël par l’Occident, ce qui ne sert qu’à perpétuer l’occupation. Quant au représentant de l’Arabie saoudite, il a dénoncé le rejet par les pays occidentaux des deux résolutions du Conseil de sécurité demandant l’arrêt immédiat des hostilités à Gaza. Le président Sissi a déclaré que «l’unique solution passe par le respect du droit des Palestiniens à établir un État».

Le Maroc, par la voie de son ministre des Affaires étrangères Nasser Bourita, a défendu cinq propositions.

La première est de réduire l’escalade, de cesser l’effusion de sang et les agressions militaires, d’épargner à la région les affres d’un conflit qui risque d’anéantir ce qui reste de chances de paix et de stabilité.

La deuxième est de protéger les civils conformément aux principes du droit international et humanitaire.

La troisième est de permettre l’acheminement des aides humanitaires de façon rapide et fluide, en quantité suffisante, au profit des habitants de la bande de Gaza.

La quatrième est le rejet de tout projet visant à déplacer ou déporter les Palestiniens et à mettre en danger la sécurité des pays voisins.

La cinquième proposition est de lancer un véritable processus de paix qui mène à la solution à deux États sur la base des frontières du 4 Juin 1967.

La position des pays occidentaux présents au Sommet du Caire diffère de celle des pays arabes. C’est ainsi que le président du Conseil européen Charles Michel a déclaré que «nous condamnons fermement l’attaque terroriste ignoble qui a été menée par le Hamas contre Israël et son peuple, et nous demandons la libération des otages sans condition et sans délai». Il a ajouté que «nous affirmons le droit d’Israël à se défendre, mais ceci doit se réaliser en conformité avec le droit international humanitaire». Il a appelé à ouvrir des accès humanitaires pour faire en sorte que les plus vulnérables aient accès à l’eau, à l’électricité, à la nourriture et à des médicaments. Il a en outre demandé d’œuvrer de concert pour éviter l’escalade régionale, notamment par le Hezbollah au Liban et par l’Iran, contenir le conflit, et mettre fin au cycle de violences. Il a enfin affirmé la nécessité de tout mettre en œuvre pour une solution durable qui doit être fondée sur la solution à deux États. Quant à la ministre française des Affaires étrangères, Catherine Colonna, elle a aussi indiqué qu’Israël a le droit de se défendre face aux actes terroristes du Hamas, mais que ce pays avait aussi le devoir de respecter le droit international. Dès le début du conflit, la France a fait une priorité de l’accès sans entrave et durable de l’aide humanitaire, et compte fournir une aide supplémentaire de 10 millions d’euros aux Gazaouis. Enfin, elle a précisé que la France prône la solution à deux États permettant de trouver les moyens d’assurer à Israël son droit à la sécurité et aux Palestiniens leur droit à un État.

En conclusion, le Sommet du Caire, consacré au conflit entre Israël et le Hamas, s’est achevé sans accord sur un arrêt des violences, et n’a pas donné lieu à un communiqué commun au vu des divergences entre les pays arabes et les Occidentaux. Cette situation peut encourager Israël à lancer son opération terrestre sur Gaza, qui serait une catastrophe humanitaire et pourrait entrainer un conflit régional, et un embrasement dans les pays arabes. Les pays occidentaux doivent faire pression sur Israël pour éviter l’opération terrestre.

Cette opération, si elle a lieu, est susceptible de mettre en danger la vie des 210 otages entre les mains du Hamas. Israël veut, dit-elle, détruire le Hamas. Or, comment peut-il faire la distinction entre un membre du Hamas et un civil gazaoui, d’autant plus qu’il y a une population dense de 2,4 millions d’habitants. En plus, le bilan macabre est déjà en faveur d’Israël qui n’a subi «que» 1.400 décès contre 4.385 pour Gaza. On ne peut que déplorer et condamner la mort de civils (hommes, femmes et enfants) qu’ils soient Israéliens ou Palestiniens dans cette tragédie de Gaza. Contrairement à ce que disent les occidentaux, le Hamas est un mouvement de résistance islamique qui a gagné les élections législatives de 2006, et est arrivé au pouvoir légalement à Gaza en 2007. Le renforcement du Hamas provient de l’affaiblissement de l’Autorité palestinienne, qui n’a obtenu aucune concession de la part d’Israël.

Au contraire, le gouvernement israélien a continué à faire de Jérusalem une ville juive qu’il a proclamée unilatéralement capitale de l’État d’Israël, et a procédé à de nouvelles implantations coloniales en Cisjordanie, et au blocus total de la bande de Gaza depuis 2007. Les occidentaux, même les États-Unis, se disent favorables à la création d’un État palestinien mais ne font rien pour sa réalisation. C’est par des pressions et des sanctions contre Israël que l’État palestinien sera créé.

Pour le moment, il faut impérativement imposer un cessez-le-feu, négocier pour libérer les otages, et attendre que les tensions s’apaisent pour entamer les discussions pour la création d’un État palestinien vivant côte à côte avec Israël.



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