Efficacité énergétique : l’audit, un passage obligatoire
Tout projet d’efficacité énergétique, quel qu’il soit, doit obligatoirement passer par une opération d’audit, qui vise à identifier les possibilités d’optimiser les dépenses énergétiques de l’entreprise désirant baisser sa facture. Comment l’opération de contrôle est-elle organisée dans le Royaume ? Qui peut être auditeur énergétique au Maroc ? Les réponses.
Depuis le 1er décembre 2019, le gouvernement marocain a mis en œuvre sa toute première mesure d’envergure visant à éviter le gaspillage et à réduire la facture énergétique du pays. En effet, c’est à cette date que le décret N°2-17-746 relatif à l’audit énergétique obligatoire et aux organismes d’audit énergétique, qui a été publié au bulletin officiel du 2 mai 2019, est entré en vigueur.
L’audit énergétique rendu obligatoire par le décret N°2-17-746
Sont notamment concernés par ledit décret, les établissements, les entreprises et les personnes physiques dont la consommation d’énergie thermique dépasse un certain seuil. Selon le décret, qui comprend les obligations générales qui doivent être respectées par les assujettis à l’audit énergétique obligatoire et les organismes d’audit, le niveau de consommation d’énergie soumis à l’audit énergétique est de 1.500 tep (tonne équivalent pétrole) par an pour les entreprises et les institutions du secteur industriel, et de 500 tep par an pour celles exerçant dans le secteur tertiaire (transport, distribution d’énergie, tourisme, santé, éducation, enseignement, services et commerce). S’agissant des autres secteurs, leurs seuils de consommation seront définis progressivement, d’un commun accord entre le ministère de la Transition énergétique et du développement durable, et leurs départements de tutelle respectifs, à travers des arrêtés conjoints, est-il expliqué. En attendant, il faut noter que depuis la publication du décret, les entreprises concernées sont invitées à entamer l’audit sur l’ensemble de leurs activités, procédés industriels, bâtiments et véhicules exploités et à communiquer les données recueillies à l’Agence marocaine pour l’efficacité énergétique (AMEE), qui est chargée de les analyser et de transmettre un rapport détaillé à sa tutelle. Par la suite, l’entreprise est tenue de communiquer chaque année ses données énergétiques à l’AMEE et de renouveler l’audit tous les 5 ans, en se dotant d’un bilan énergétique (voir encadré).
Les organismes d’audit sont agréés pour une durée de 7 ans, renouvelable plusieurs fois
Ces opérations d’audit sont notamment destinées à identifier les causes de surconsommation d’énergie et à proposer des actions concrètes pour la faire baisser et éviter ainsi le gaspillage, lequel pourrait représenter 45% d’économie dans l’industrie à l’horizon 2030. L’entreprise le fera avec l’aide d’organismes agréés par l’autorité gouvernementale chargée de l’Énergie. C’est à dire des organismes d’audit énergétique dont le décret a, également, défini tous les attributs. En effet, selon ce texte, l’organisme d’audit doit disposer d’au moins deux auditeurs énergétiques, ou un auditeur et deux agents placés sous sa supervision, pour prétendre au statut d’auditeur énergétique agréé. Ensuite, il doit déposer une demande d’agrément auprès du comité composé des représentants de l’autorité gouvernementale chargée de l’Énergie, de la tutelle du secteur concerné et de l’Agence marocaine de l’efficacité énergétique. Ce comité dispose d’un délai de 90 jours pour rendre sa décision. Enfin, l’agrément octroyé porte sur une durée de 7 ans, renouvelable plusieurs fois, tant que l’organisme en question est en activité. La seule condition, c’est que ce dernier présente une demande de renouvellement 6 mois avant l’expiration de l’agrément en cours.
Les entreprises certifiées ISO 50001 ne sont pas concernées
À noter que seuls les établissements dont les activités sont couvertes par un système de management de l’énergie seront dispensés de l’audit énergétique. C’est-à-dire ceux qui sont certifiés selon la norme ISO 50001 sur la gestion efficace de l’énergie, une norme qui permet, en effet, de maximiser les économies d’énergie et les gains de performance. Il faut juste que, comme dans le cas de l’audit énergétique, la certification couvre au moins 80% de la facture énergétique de la société. Et dans ce cas là, plusieurs organismes de la place proposent déjà aux entreprises un service d’accompagnement à la certification ISO 50001, qui couvre toute la cartographie de leurs consommations d’énergie, ceci grâce à des outils de mesure et d’évaluation performants qui permettent aussi de définir des mesures correctives et leur mise en œuvre. À signaler que ce décret sur l’audit énergétique obligatoire est le premier d’une série de textes qui seront publiés prochainement pour réglementer et encadrer davantage l’efficacité énergétique.
C’est quoi un bilan énergétique ?
C’est un audit très détaillé du comportement énergétique d’un bâtiment industriel. Cette étude poussée porte, notamment, sur tous les éléments de construction : le chauffage, les systèmes de ventilation, les comportements et habitudes des collaborateurs, etc. Autrement dit, il s’agit d’un schéma de déperdition thermique d’un bâtiment ou d’un site industriel basé sur une analyse chiffrée et précise des points faibles, de l’isolation jusqu’aux systèmes de chauffage en passant par les équipements de ventilation, etc. Une fois ces points à améliorer mis en évidence, les industriels peuvent donc entreprendre des travaux selon leur ordre de priorité et les recommandations des prestataires spécialisés en vue de réaliser des économies d’énergie plus conséquentes. Ces opérations doivent être conformes à la réglementation thermique en vigueur et s’étaler dans le temps. À partir de là, on parle de Plan de performance énergétique (PPE). À signaler que ces opérations d’audit sont également étendues à la flotte de l’entreprise. Pour contribuer à la baisse de ses émissions de Gaz à effet de serre (GES) et améliorer son bilan énergétique, l’entreprise doit aussi investir dans une flotte de voitures hybrides et/ou électriques, en lieu et place de ses véhicules diesel ou essence plus polluants.
Aziz Diouf / Les Inspirations ÉCO