Climat : le bilan carbone n’est pas un phénomène de mode
Depuis la rencontre action climat sur la thématique de l’engagement des acteurs économiques marocains dans la transition bas-carbone résiliente aux changements climatiques, organisée le 26 octobre 2021, la Fondation Mohammed VI pour la Protection de l’Environnement et la CGEM poursuivent la sensibilisation des entreprises au bilan carbone. L’objectif étant d’amplifier le mouvement à court, moyen termes.
La Fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement et la CGEM poursuivent leur action de sensibilisation et d’incitation des entreprises à entamer leur transition vers une économie bas carbone et résiliente. Lundi 13 décembre, le tandem a tenu son quatrième atelier sur le sujet. Un atelier visant, comme les précédents, à amplifier ce mouvement, pour ensuite constituer un vivier de champions climat marocains qui seront invités à rejoindre la «Race to Zero» et la «Race to Resilience», les deux initiatives mondiales du Partenariat de Marrakech, soutenues par la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (CCNUCC) (Voir encadré). C’était donc l’occasion de présenter, à nouveau, aux chefs d’entreprises l’approche, les enjeux de la décarbonation, l’outil bilan carbone ainsi que les différents éléments constitutifs du programme Qualit’air que vulgarisent les deux partenaires. Il leur a été ainsi rappelé que face au phénomène global du réchauffement climatique, il est essentiel qu’ils estiment la contribution de leur (s) entreprises (s) à l’émission de gaz à effet de serre, et d’identifier les marges de manœuvre pour les réduire.
un outil de management environnemental …
Il leur a été aussi signifié que ce n’est pas un phénomène de mode. Au contraire, en lançant leur(s) entreprises dans la décarbonation, ils sont doublement gagnants. Premièrement, ils vont baisser les factures énergétiques de leur(s) société(s) en évitant la dépendance aux énergies fossiles qui deviennent de plus en plus onéreuses en raison de leur rareté. Ensuite, en se lançant dans la décarbonation au plus vite, leur(s) entreprise(s) se donnent toutes les chances de conserver leur(s) client(s). En effet, réaliser son bilan carbone, c’est devancer les réglementations nationales, voire internationales, qui se profilent à un proche horizon. Par exemple, l’Union Européenne (UE), le marché où 65% des exportations marocaines sont acheminées à mis en place plusieurs barrières non-tarifaires pour protéger à court, moyen termes son économie. Après avoir annoncé que les véhicules à essence et diesel ne seront plus acceptés sur son marché à partir de 2035, l’UE vient de prendre une nouvelle mesure qui vise à interdire l’importation de certains produits qui contribuent à la déforestation, comme le soja, le bœuf, l’huile de palme, le bois, le cacao, le café ainsi que des produits dérivés tels que le cuir, l’ameublement… Par ailleurs, la réglementation va prochainement aller vite sur le marché carbone au niveau national et il vaut mieux être du bon côté pour en profiter au maximum. Alors, comment faut-il s’y prendre ? La Fondation Mohammed VI pour la protection de l’environnement a, encore une fois, détaillé le mode opératoire à l’occasion de l’atelier. Après la phase de sensibilisation où les entreprises intéressées par un bilan carbone sont identifiées, elle procède à cinq autres phases, à savoir : la collecte des données climat de l’entreprise, le traitement des données, la présentation du bilan GES de l’entreprise, la définition des objectifs de réduction et d’un planning, et enfin la mise en œuvre et le suivi.
… qui offre plusieurs avantages
À signaler que l’outil Bilan GES de la Fondation est un outil de management environnemental. Il permet de faire l’inventaire de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre (GES) générées par une entreprise, à partir de données facilement quantifiables. Il en détermine l’impact carbone de l’entreprise et sa contribution au réchauffement climatique. C’est un outil de diagnostic et d’aide à la décision. Gracieusement mis à la disposition des entreprises qui souhaitent établir leur bilan GES, il se présente sous la forme d’un tableur Excel, lié à une base de facteurs d’émission spécifiques. La Fondation et la CGEM veulent embarquer à court terme un grand nombre d’entreprises dans l’aventure bilan carbone. Pour le moment, aucune information n’a filtré sur le nombre d’entreprises ayant déjà franchi le pas. La CGEM n’a pas en effet souhaité communiquer là-dessus. En attendant d’en savoir plus, ultérieurement, rappelons que le “Pacte Qualit’air” est le fruit d’un partenariat historique liant la Fondation Mohammed VI pour la Protection de l’Environnement et la CGEM dans une démarche proactive ayant pour vision de mobiliser l’ensemble des parties prenantes pour agir en faveur du climat. Ce partenariat a abouti en 2016 au lancement du Pacte Qualit’Air en marge de la COP22.
Ce Pacte permet de sensibiliser et de mobiliser les acteurs publics et privés à la lutte contre les changements climatiques. Il permet aussi de les accompagner à travers des formations dédiées et des outils pour la réalisation de leur bilan carbone, mais également à travers un mécanisme volontaire de compensation de leurs émissions CO2 notamment grâce à la mise en place de projets d’énergie, de mobilité, de gestion des déchets et de plantation. Rappelons aussi que cet atelier est le quatrième organisé depuis la rencontre action climat sur la thématique de l’engagement des acteurs économiques marocains dans la transition bas-carbone résiliente aux changements climatiques, tenue le 26 octobre 2021.
A cette occasion, Ryad Mezzour ministre l’Industrie et du commerce avait indiqué que « grâce à la Vision Clairvoyante de Sa Majesté Le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste, la décarbonation de l’outil industriel représente un avantage majeur permettant à l’industrie marocaine de gagner en compétitivité et de concurrencer les bases industrielles les plus intégrées au monde». Et d’ajouter que «la décarbonation permettra non seulement de sécuriser l’accès de nos exportations aux marchés étrangers notamment d’Europe, après la mise en place de taxes carbone, mais aussi de développer, de manière substantielle, nos parts de marché dans les pays qui ont, avec la pandémie, fait le choix de relocaliser dans des pays proches et fiables de nouvelles sources d’approvisionnement». Leila BENALI, ministre de la Transition énergétique et du développement durable, avait souligné «que la Stratégie bas-carbone récemment développée, apportera plusieurs opportunités pour notre pays dans le contexte de relance Post-Covid 19 notamment, en termes de développement des énergies durables. Elle a également indiqué que le Maroc sera présent à la COP26 avec une importante délégation composée de représentants des secteurs publics et privés, des organismes de recherche et d’ONG, pour consolider le leadership de notre pays, sous la conduite éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu l’assiste. L’objectif étant, de faire valoir le modèle marocain en matière de transition énergétique et écologique, continuer à promouvoir les initiatives marocaines entreprises depuis la COP22, et attirer de nouveaux investissements étrangers.».
Pour sa part, Chakib Alj, président de la CGEM avait rappelé «que la décarbonation est l’une des 10 priorités fixées par la CGEM dans son Livre Blanc, qui apporte des mesures concrètes de mise en œuvre du Nouveau Modèle de Développement. Elle constitue un enjeu que l’entreprise doit appréhender sous l’angle de sa compétitivité et non de manière conjoncturelle, du fait des multiples opportunités qu’elle présente. Nous sommes ravis de constater que les entreprises marocaines s’inscrivent de plus en plus dans cette dynamique». Alors que l’Ambassadeur de Grande Bretagne au Maroc, Simon Martin, avait souligné que «le bilan de longue date de l’action climatique du gouvernement et de la société marocaine, ainsi que l’urgence et les avantages de se joindre à l’effort pour créer un avenir résilient à faible émission de carbone, plus de 70 % du PIB mondial s’étant désormais engagé à atteindre un niveau net zéro d’ici 2050».
À propos de «Race to Zero» et de «Race to Resilience»
“Race to Zero” est la campagne lancée par la CCNUCC, fortement soutenue par le Royaume-Uni. Elle s’appuie sur le Partenariat de Marrakech, lancé en 2016, pour rassembler des acteurs non étatiques dans une coalition représentant 733 villes, 31 régions, 3.067 entreprises, 173 des plus grands investisseurs et 622 établissements d’enseignement supérieur. Ces acteurs de “l’économie réelle” rejoignent 120 pays dans la plus grande alliance jamais engagée pour atteindre des émissions nettes de carbone zéro d’ici 2050 au plus tard. “Race to Resilience” est la campagne jumelle du “Race to Zero”, lancée le 25 janvier 2021 par Alok Sharma, président désigné par le Royaume-Uni de la COP26, en marge du Sommet pour l’adaptation aux changements climatiques 2021. Cette campagne vise à mobiliser des entreprises, des investisseurs, des villes, ainsi que des membres de la société civile pour renforcer la résilience de 4 milliards de personnes dans les communautés vulnérables au changement climatique d’ici 2030.
Aziz Diouf / Les Inspirations ÉCO