Officialisation de la langue amazighe : où en est le gouvernement ?
Une commission permanente sera mise en place et aura pour mission le suivi des étapes de l’officialisation de la langue amazighe.
La mise en œuvre de la loi organique 26-16 qui fixe les étapes de l’officialisation de la langue amazighe et les modalités de son intégration à l’enseignement et aux services publics devra davantage se confirmer durant la rentrée. Le décret qui instaure la commission permanente présidée par le chef de gouvernement a été adopté lors du dernier Conseil du gouvernement, ce qui est synonyme de l’entame du processus du suivi des projets qui seront conçus pour une pleine application de la loi organique. Tous les plans d’action sectoriels devront être soumis à l’appréciation de la commission permanente, de même que la nouvelle structure devra élaborer un rapport annuel qui détaille avec précision les délais de réalisation des projets lancés. La commission se réunira deux fois par an dans l’optique de fédérer l’ensemble des intervenants dans le processus de l’officialisation. Il s’agit essentiellement de prendre l’avis de l’ Institut royal de la culture amazighe (IRCAM) et du Conseil supérieur de l’éducation durant toutes les sessions de la commission, comme cela est prévu par le décret qui fixe le statut de la nouvelle instance.
L’agenda de la mise en œuvre
La finalisation du statut de la commission permanente est synonyme de l’amorce du calendrier de la mise en œuvre qui a été instauré par la loi organique. La loi a reçu l’aval de la Cour constitutionnelle en 2019 et a pu entrer en vigueur durant l’année 2020, mais en prenant en compte les articles 31 et 32 qui prévoient que plusieurs dispositions entreront en vigueur dans un délai compris entre 5 et 15 ans et que les ministères, les collectivités territoriales et les institutions constitutionnelles doivent mettre en place des plans d’introduction progressive de la langue amazighe dans la vie publique. En ligne de mire à court terme l’amélioration de la généralisation de l’apprentissage de l’amazigh dans l’enseignement ainsi que dans l’audiovisuel. Il faut dire que toutes les institutions sont appelées à se conformer aux dispositions constitutionnelles concernant la mise en œuvre du statut officiel de l’amazigh de manière progressive, mais le processus est constitutionnellement irréversible. D’un autre côté, les retombées de certaines «nuances» n’ayant pas été discutées auparavant s’avèrent considérables à l’heure actuelle. Le caractère officiel de la langue amazighe renvoie directement à son usage par les services administratifs et judiciaires. Les craintes des tenants de cette approche sont évidemment liées aux difficultés pratiques que provoquerait une telle transposition légale et les fractures que cela pourrait engendrer. L’étape de la mise en application des nouvelles dispositions légales et réglementaires destinées à diffuser la deuxième langue officielle de l’État passe inéluctablement par l’Institut royal de la culture amazighe (IRCAM), qui a préparé une série de projets destinés à rendre plus effective la pénétration de la langue amazighe dans le système éducatif, mais également chez les adultes. La réalisation de projets de recherche contractuelle dans plusieurs domaines, dont l’élaboration des ouvrages de référence en morphosyntaxe est également à l’ordre du jour. La didactique et la pédagogie de la langue amazighe sont prévues par le programme d’action de l’institut, qui a pu réaliser des manuels d’écriture en tifinaghe, en plus de didacticiels destinés aux adultes.
Une place centrale pour le Conseil national des langues
L’instance constitutionnelle dont le statut a été finalisé aura un rôle essentiel dans le suivi de la mise en œuvre de l’officialisation de la langue amazighe. La démarche qui prévaut consiste à mettre en place des modalités de promotion de l’amazigh, mais aussi des mesures destinées à assurer la protection des langues arabe, amazighe et hassania et surtout de la facilitation de la maîtrise des langues vivantes. À rappeler que la composition mixte du conseil devra lui permettre d’être au centre des instances qui devront collaborer avec la nouvelle commission permanente. Son règlement intérieur devra davantage élucider la nature des domaines qui seront traités conjointement avec le Conseil national des langues.
Younes Bennajah / Les Inspirations Éco