Institut Thomas More: Le Maroc, pôle de stabilité politique et religieuse
Dans sa région et même au-delà, le Maroc constitue « un pôle de stabilité politique et religieuse dans la région et au-delà ». C’est ce qu’a affirmé l’institution Thomas More dans une étude récemment publiée sur « Nation et religion : L’expérience marocaine » et signée par Sophie de Peyret, chercheure associée à l’Institut.
Dans ce document, le groupe de réflexion passe sous scan l’exemple du Maroc « qui constitue un exemple singulier de construction politico-religieuse »
«Un souverain à la fois autorité temporelle et spirituelle, une orientation religieuse qui cherche à promouvoir la voie de la modération, une volonté de s’imposer non pas comme un modèle mais comme une voix alternative, sont autant de caractéristiques qui justifient qu’on analyse en détails» cette «spécificité » marocaine, affirme Sophie de Peyret.
Selon elle, la difficile articulation entre Islam et politique constitue l’un des principaux facteurs de déstabilisation des sociétés contemporaines. La montée du fondamentalisme islamique partout dans le monde contraint les Etats à reconsidérer leurs modes de fonctionnement et leur relation au fait religieux. Tous les pays, partout sur la planète, dans le monde musulman et au dehors, sont à la recherche de nouveaux équilibres. «Dans ce contexte et parmi les multiples modèles, l’expérience marocaine apparaît comme un exemple singulier de construction politico-religieuse », souligne-t-elle.
«Alors que le pays a fêté les vingt ans de règne de Mohammed VI, il est en effet intéressant d’étudier la manière dont le Maroc s’empare des problématiques contemporaines à l’Islam et de chercher à comprendre dans quelle mesure ses particularités concourent à assurer un pôle de stabilité politique et religieuse dans la région et au-delà ». D’où l’intérêt de cette étude.
Au moment où de nombreux pays du monde arabo-musulman peinent à trouver un équilibre entre politique et religion, le Maroc se tient depuis des siècles fermement campé sur deux piliers fondamentaux : la religion musulmane et la Monarchie. Cet équilibre singulier vient de loin, relève-t-elle.
« Au fil des siècles et grâce au triptyque malékisme-asharisme-soufisme, lui-même adossé au concept d’Al-Wasatiyya, l’Islam du juste milieu, le Royaume chérifien s’est ainsi forgé un socle doctrinal solide, à la lecture mesurée et islamiquement orthodoxe. Les particularités de l’Islam au Maroc apparaissent comme le fruit d’une histoire qui se poursuit encore aujourd’hui et qui relève tout autant de l’identité nationale que de la norme religieuse », commente l’auteure de l’étude.
Dans son analyse, Sophie de Peyret relève également « l’exception monarchique marocaine où le Roi est aussi Commandeur des Croyants, une commanderie qui se fonde sur un pacte conclu entre le Souverain et son peuple ». D’ailleurs, ajoute-t-elle, « la récente Constitution adoptée en 2011 consacre ce double statut : le Roi est à la fois chef d’un Etat doté d’une Constitution et d’un Parlement et plus Haute Autorité dans le champ religieux, garant du respect des principes islamiques ».
« Alors qu’ailleurs dans le monde arabo-musulman, l’autorité légitime est soit politique soit religieuse, le monarque marocain est ainsi le seul à agréger les pouvoirs spirituels et temporels. (…) Cette double légitimité procure au Roi une importante latitude dans les sujets qu’il aborde mais surtout une autorité considérable dans les décisions qu’il prend. Garant des normes civiles comme religieuses, c’est parce que le Roi détient cette double compétence qu’il peut les unifier et les concilier et ainsi couper court aux interprétations radicales qui secouent périodiquement le monde arabo-musulman », explique l’auteure de l’étude.
Relevant « la conjugaison réussie du sécuritaire et du préventif » dans la lutte menée par le Maroc contre le terrorisme et les discours radicaux, Sophie de Peyret souligne que le pays, conscient que la solution ne pouvait pas être exclusivement sécuritaire a fait en sorte que l’éducation et l’anticipation trouvent leur juste place dans la stratégie de lutte contre le terrorisme et les discours radicaux. Elle a cité dans ce contexte le programme de lutte contre la radicalisation dans les prisons Musalaha.
Pour l’auteure, « les spécificités du système marocain en interdisent son exportation. Le statut du Souverain, l’homogénéité du rite et de la doctrine, aboutissent à une articulation juridico-politique unique qui ne saurait être copiée. Le système se révèle d’autant moins transposable que le Royaume n’envisage en aucun cas d’imposer ou de promouvoir unilatéralement son modèle au-delà de ses frontières sans que cela ne relève d’une requête extérieure ». « Les autorités ne cessent d’ailleurs de rappeler que le Maroc ne fait aucun prosélytisme », affirme-t-elle.
Mais si l’expérience marocaine se révèle non exportable en l’état, elle produit néanmoins des fruits bénéfiques en contribuant à instaurer un pôle de stabilité politique et religieuse aux portes de l’Europe qui a grand besoin de partenaires fiables dans la région, observe la chercheuse, pour qui « l’équilibre institutionnel et politique que le Maroc a su instaurer », serait un argument suffisant pour le considérer comme « un partenaire incontournable de l’Occident».
Et de conclure que « face aux menaces sécuritaires et à l’expansion de l’Islam radical, le Maroc a indéniablement une carte à jouer en offrant un autre discours ».
Avec MAP