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Impôts. Faut-il supprimer les dépenses fiscales ?

La réponse à cette question divise les parties prenantes à la consultation menée en préalable des Assises de la fiscalité prévues les 3 et 4 mai à Skhirat.

La problématique des dépenses fiscales sera un des principaux axes du débat lors des Assises de la fiscalité prévues le 3 et 4 mai à Skhirat. Déjà la note de cadrage de ce rendez vous important a classé ce sujet comme un «des questionnements importants» découlant de l’observation des performances du système fiscal actuel ». Les Assises comptent poser la question de «l’optimisation des dépenses fiscales en en évaluant l’impact sur la production de la valeur ajoutée nationale ?», s’interrogent les auteurs de ce document. La Direction générale des impôts (DGI) questionne aussi le système d’incitation fiscale actuel: «Quels systèmes d’incitation pour l’amélioration de la productivité, la compétitivité, l’investissement, l’innovation et la recherche dans une économie déjà mondialisée, de plus en plus numérique, de plus en plus axée sur la connaissance», ajoutent les organisateurs des Assises. Si la CGEM défend le maintien de ces incitations, d’autres associations de la société civile appellent clairement à leur suppression ou leur limitation, notamment OXFAM au Maroc et le mouvement Maan. Pour sa part, le ministère de l’Économie et des finances (MEF) avait démarré depuis 2017 une opération de toilettage de ces incitations.

Révision en cours
«Les niches et les dépenses fiscales représentent un coût pour la communauté, consacrent l’injustice et l’inégalité face à l’impôt et sortent l’État de sa neutralité dans le processus de création de richesses. Il faut par conséquent les réduire, voire les éliminer», recommande le Mouvement Maan, jeune association qui a présenté un mémorandum intitulé «40 idées pour une fiscalité de croissance, juste et équitable». Même son de cloche de la part d’OXFAM : «la fiscalité est encore trop largement utilisée au service des intérêts de minorités, qu’il s’agisse des particuliers les plus aisés (faible taxation du capital, impôt très peu progressif), ou de grandes entreprises (exemptions et des intérêts de minorités, qu’il s’agisse des particuliers les plus aisés (faible taxation du capital, impôt très peu progressif), ou de grandes entreprises (exemptions et exonérations fiscales pour certains secteurs ou activités). Au prétexte de stimuler l’activité économique, l’État se prive ainsi de montants considérables de recettes fiscales qui sont pourtant essentielles pour réduire les inégalités ». Cette association suggère de «mettre fin aux exemptions et incitations fiscales inefficaces». Pour sa part, l’association Maan propose que dans le cas particulier où l’État veut octroyer des avantages fiscaux de le faire «sous forme de crédits d’impôts conditionnés par l’atteinte d’objectifs de création de la valeur ajoutée et de l’emploi». Face aux multiples critiques adressées aux dépenses fiscales, le MEF a entreprend une réforme de ce système depuis deux ans. Le passage de l’ancien système fiscal de référence au référentiel cible pour l’année 2017 s’est traduit par un effectif de mesures dérogatoires de 84 au lieu de 117 mesures fiscales qui ont été considérées par l’ancien système fiscal de référence, soit une baisse nette de 33 mesures dérogatoires (-28%). Le nouveau référentiel considère que ces mesures devraient être évaluées au taux de 20%. L’écart entre la nouvelle norme (20%) et le taux appliqué (10%) est considéré, par conséquent, comme dépense fiscale selon le référentiel cible.


Khalid Cheddadi
Vice-président  de la CGEM en charge de la compétitivité et l’environnement des affaires

Quelles sont les raisons qui poussent la CGEM à défendre le maintien des niches fiscales ?
Les incitations fiscales ont été critiquées car elles ont été mal gérées. Elles ont créé un effet d’éviction et de distorsion économique. Par exemple, les mesures relatives à la promotion immobilière ont attiré quasiment tout le monde vers ce secteur. Ce mouvement a «fait souffrir» l’investissement dans le secteur industriel. Dans ce cas de figure, ces incitations sont critiquables. Par contre, d’autres incitations fiscales, notamment pour l’export, sont importantes pour stimuler la compétitivité de l’offre Maroc et l’entrée des devises. Des incitations fiscales bénéficient aussi à des territoires au Maroc. Ce soutien permet de développer l’activité économique dans ces régions. Donc, sur le principe, les incitations ne sont pas mauvaises. Maintenant, il faut savoir les gérer pour qu’elles n’aient pas d’effet néfaste sur les autres activités économiques.

Faut-il réduire le nombre de ces incitations, qui sont au nombre de 84 ?
Tout à fait, il faut que leur nombre soit raisonnable ainsi que leur coût fiscal. Il faut exiger qu’elles aient un retour d’investissement pour l’économie du pays. Les incitations sont un manque à gagner pour les recettes de l’État, elles ont un coût pour le citoyen et pour l’État. Donc, il faut gérer tout ce dispositif fiscal de manière raisonnable.

Le projet de loi-cadre sur la fiscalité permettra-t-il de réduire les différends lors de la discussion des lois de Finances?
Le débat devrait forcement continuer. La loi nous permettra d’avoir un débat mieux cadré. Si les principes sont clairement arrêtés, les lois de Finances devront les décliner en mesure. La discussion devrait porter sur l’échéancier de mise en oeuvre de chaque mesure en cohérence avec l’équilibre budgétaire et les besoins de l’entreprise.



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