Usine Nissan de Sunderland : L’incroyable modèle britannique
Au Nord de l’Angleterre, l’usine de Nissan tourne à plein régime et sans jamais s’arrêter avec une rapidité et une dextérité rarement vues dans l’industrie automobile. Visite dans les coulisses de la production du pionnier et leader des SUV, le Qashqai.
«Good morning and welcome to NMUK !». Voilà en substance ce que nous lance, tout sourire, la responsable communication du site, Lucie Banwell, dès notre arrivée à Nissan-Motor Manufacturing UK (NMUK). Moins souriant (et on le comprend), le vice-président de l’usine, Kevin Fitzpatrick, nous fait une présentation complète de ce complexe industriel qu’il dirige brillamment. Créée en 1984 et mise en service en 1986, l’usine, implantée par Nissan à Sunderland, est tout sauf une mince affaire. De 5.000 véhicules assemblés, lors de sa première année, l’usine est passée à plus de 500.000 unités produites annuellement depuis 3 ans déjà. De ce fait, elle est le plus grand producteur automobile du Royaume-Uni qui en absorbe 20% de la production totale ! Il n’est pas surprenant d’apprendre qu’un véhicule sur trois produits sur le marché britannique est une Nissan ! En revanche, il est curieux d’apprendre que sur ce site qui compte quelque 6.700 employés (directs), le salaire moyen est d’environ 1.800 Livres Sterling. Un coût de main d’œuvre assez élevé, qui n’empêche pourtant pas cette usine d’être parmi les plus compétitives au monde. Incroyable !
Intégration totale
Il faut dire aussi que cette usine est à la fois gigantesque et totalement intégrée. Sur 362.000 m², (soit l’équivalent d’une cinquantaine de terrains de foot), le site abrite un atelier presse, une unité pour la carrosserie, une autre pour la peinture, un studio de design, un centre technique, un centre de formation, des halls d’assemblage de véhicules, une piste d’essais, des installations logistiques, un parc de 10 éoliennes et des unités de production pour composants en tous genres (ailes, pare-chocs, suspensions, batteries, moteurs, boîtes de vitesses etc). Sans donner le taux exact d’intégration locale, le numéro 2 de l’usine indique que celle-ci est «fully integrated» (totalement intégrée).
En fait, une bonne partie des composants utilisés pour la production des Qashqai, Juke, Note, Leaf et Q30, provient d’équipementiers basés en Europe à l’image du vitrage, fourni par le leader en la matière, le français Saint-Gobain. On apprend aussi que cette usine fournit à Renault des moteurs diesel et des suspensions (pour le Kadjar), et produit des châssis pour le compte de Mercedes.
Qualité et rapidité
La présentation finie, nous entamons un vaste tour du site. Un parcours qui nous mène de l’atelier de carrosserie à celui des presses, en passant par la partie soudures. Dotée d’environ 1.000 robots et d’instruments de mesure au laser, l’usine est à la pointe de la technologie avec une obsession du zéro défaut ! C’est surtout un site qui tourne à grande vitesse. Ici, chaque ouvrier ne dépasse jamais plus d’une minute pour accomplir une opération, qu’il s’agisse de monter une porte ou de fixer un pare-brise. Les process sont rôdés et la machine bien huilée.
Et il faut le voir pour le croire : lorsqu’un léger souci se présente pour entraver la chaîne de montage, c’est la panique générale pour débloquer la situation. Ici, les secondes valent de l’or ! Il faut savoir qu’un Qashqai utilise plus de 3.500 pièces, passe par 90 postes de travail et nécessite 1h30 pour être produit de bout en bout. Plus techniquement, le processus de fabrication commence dans l’atelier de presse, puis se scinde en deux lignes de montage. La première, dédiée au Qashqai, produit 59 véhicules par heure, tandis que la seconde, produisant notamment le Juke, atteint 57 véhicules par heure. Des ratios très élevés dans l’industrie automobile. Mieux encore, cette cadence sera consolidée au fur et à mesure que les travaux d’extension de la seconde ligne évoluent.
Extension de la ligne 2 pour Infiniti
En effet, depuis juin dernier, Nissan a entrepris l’élargissement de la deuxième ligne de montage afin d’assurer le montage de la Q30, la compacte d’Infiniti. Un investissement de 37 millions de Livres qui va se traduire par l’ajout d’une huitième ligne de presse qui sera unique en son genre dans l’Alliance Renault-Nissan. Opérationnelle en 2017, elle devrait porter la capacité totale de NMUK à plus de 550.000 véhicules, tout en accompagnant la croissance commerciale d’Infiniti dans le monde.
En attendant de voir un jour cette marque faire son entrée sur notre marché, il apparaît clairement que l’usine de Sunderland est un melting-pot des best-practices dans l’industrie automobile mondiale. Surtout, on a fini par comprendre pourquoi le Qashqai est un succès planétaire.
Kevin Fitzpatrick
Vice-Président de NMUK
Les inspirations ÉCO : Comment expliquez-vous la bonne compétitivité de cette usine parmi ses semblables dans le monde ?
Kevin Fitzpatrick : Je pense que pour être compétitif dans l’industrie automobile, il faut avoir un beau véhicule, une bonne dose de qualité et des coûts de production maîtrisés. Si l’on ne répond pas à ces trois exigences, on ne peut réussir. Notre usine a pendant longtemps produit 300.000 véhicules par an, mais ce sont les nouveaux modèles (NDLR : Qashqai, Juke, Note…) qui lui ont permis d’atteindre les 500.000 unités par an. Or, lorsqu’on arrive à des volumes aussi élevés, les coûts de production s’améliorent naturellement.
Serait-il envisageable de voir votre usine s’approvisionner auprès des équipementiers installés au Maroc, notamment autour de l’usine de Tanger ?
Nous sommes toujours à la recherche de nouveaux fournisseurs, mais pour le moment, nous nous focalisons surtout sur la production. Cela étant, si une opportunité de travailler avec l’un des équipementiers basés autour de Tanger se présente un jour, nous la saisirons.
Comment voyez-vous l’avenir de cette usine en termes de capacité de production ?
L’avenir me paraît plutôt bon, tant que l’on reste compétitifs. Notre usine a remporté l’accord de production de la prochaine génération du Juke, ce qui ne devrait qu’accroître notre compétitivité. Il y a un élément clé dans notre approche à savoir que nous ne pouvons pas nous accommoder de cette réussite, sinon nous reculerons. Et il est de mon devoir de ne pas devenir complaisant face à notre réussite. Ceci étant, et pour répondre à votre question, je pense que notre capacité de production annuelle devrait atteindre à terme les 550.000 unités.