Crise Maroc-Espagne : quid de l’opération Marhaba ?
Le plus important mouvement de personnes et de véhicules entre l’Europe et le Maroc risque d’être compromis, une fois de plus. Mais cette année, contrairement à la précédente, c’est le gel de la coopération bilatérale entre Rabat et Madrid qui pourrait saborder l’opération Marhaba.
Alors que la majorité des pronostics penchaient pour un scénario d’apaisement dans les relations maroco-espagnoles, suite à la convocation du chef du Polisario, Brahim Ghali, pour une audition le 1er juin devant le juge d’instruction de l’Audience nationale et l’annonce faite par son entourage à propos de son intention de comparaître, les récentes déclarations de Cherkaoui Habboub, directeur du Bureau central d’investigation judiciaire (BCIJ) ont montré que la tension est encore bien présente.
Dans une interview accordée à la presse électronique, le responsable marocain a agité la menace de suspension de la coopération policière avec son voisin du nord. Ceci, même si le ministre espagnol de l’Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, a tenté de montrer que le ciel est dégagé en assurant, en cours de semaine dernière, que la coopération policière entre les deux pays est bel et bien maintenue.
Que devient alors l’opération Marhaba 2021? Sera-t-elle compromise ? Eu égard au contexte, d’aucuns parient que cet important mouvement de vacanciers marocains regagnant la patrie n’aura pas lieu cette année aussi. Ce serait, du moins, valable pour la version classique de cette opération, c’est-à-dire suivant les mêmes procédures que celles adoptées jusqu’à la 32e édition organisée en 2019. Si la situation sanitaire laissait déjà planer la menace de la suspension sur l’opération Marhaba, à présent, la tension diplomatique et politique se sont ajoutées au tableau. La coopération et la communication fluide en Rabat et Madrid étaient pourtant les piliers de la gestion de ces flux humains.
En effet, l’Espagne déploie un important dispositif sécuritaire durant la traversée, à l’image des 808 agents mobilisés en 2019 lors de la dernière édition, avec une réserve de 73 en cas de besoin.
Le Maroc, de son côté, ne lésine guère sur les moyens pour accueillir ses citoyens. Or, la mise en veilleuse de la collaboration signifie la suspension du transit.
Que pourrait-il se passer ?
Parmi les scénarios possibles, nous souffle-t-on, figure l’option d’une ouverture contrôlée à partir d’août et la fin des festivités marquant la célébration de l’Aïd Al Adha. Il s’agirait, par exemple, de programmation réduite de dessertes, comme dans le cas des dispositifs de rapatriement via le port de Tanger-Med.
De sources consulaires, il semble que les autorités marocaines s’attendent à une ruée des Marocains résidents à l’étranger en cas de réouverture des frontières. Après deux années de restriction, la plupart des Marocains du monde envisagent de rentrer cet été au bercail. «Il y a une forte demande sur la renouvellement des cartes d’identité et les passeports au niveau de notre consulat. J’imagine que cette situation est pareille dans l’ensemble des circonscriptions consulaires, non seulement en Espagne, mais partout en Europe où il existe une forte présence de la communauté marocaine», témoigne ce membre d’une représentation consulaire en Espagne.
De fait, et malgré la détention d’une double nationalité, plusieurs Marocains ont choisi de renouveler leur titre de voyage marocain, au cas où l’accès au royaume serait réservé uniquement aux nationaux. En tout cas, les responsables des ports espagnols croisent les doigts et espèrent l’organisation de la traversée des vacanciers. Comme nous l’ont confirmé des sources au sein de l’autorité portuaire d’Algésiras, le plus important terminal durant cette opération.
Amal Baba Ali, DNC à Séville / Les Inspirations Éco